Chapitre 25

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La soirée se passa plutôt bien et Gabrielle me demanda même l'adresse de mon traiteur tellement ma pizza maison aux légumes grillés lui avait plu. Après ça, nous nous étions vautrées sur mon canapé pour voir la suite de la série que nous avions commencé en mangeant. A la publicité, je filai aux toilettes et à mon retour Gab avait réussi à mettre la main sur le magazine people, sur lequel j'étais en couverture, que m'avait donné Charles.

- Non, mais tu te rends compte, gronda-t-elle. Si elle croit qu'il l'aime, elle se goure.

- Où as-tu trouvé ça ? lui fis-je mécontente qu'elle fouille partout.

- Dans ton sac, je voulais un chewing-gum !

Je vins la rejoindre sur le canapé et effectivement, elle mâchonnait nerveusement.

- Si ça se trouve ce n'est pas un coup d'un soir ! tentai-je de me défendre.

- Pas un coup d'un soir ? pouffa mon amie. Tu plaisantes ? Ce mec-là est une machine, c'est bien connu. Il n'y a que le cul qui l'intéresse.

- Qu'est-ce que t'en sais ?

- Ouais ben moi je l'ai pratiqué et je peux te dire que c'est pas un tendre.

J'étais extrêmement mal à l'aise par rapport à plein de choses. Tout d'abord à cause de cette réputation d'homme brusque qui prenait les filles et les jetait comme des mouchoirs et ensuite parce que je ne me sentais pas d'avouer à Gab que lui et moi étions plus ou moins ensemble à présent. J'aurai voulu la questionner, c'est vrai, sur la manière dont les choses s'étaient déroulées, comment ils s'étaient rencontrés, où ils l'avaient fait et s'ils s'étaient revus, mais eus peur d'entendre les réponses. Du coup, je déviais sur autre chose, l'air de rien et ça marcha. Gab n'y vit que du feu car elle avait l'habitude que je ne prête qu'une demi-oreille à ses histoires de jambes en l'air.

Quand Gabrielle fut rentrée chez elle vers vingt-trois heures, je sautais dans mon pyjama et me mis au lit en compagnie de squeezy. Je rallumai enfin mon téléphone et il sonna presque instantanément. Je n'eus même pas besoin de regarder qui m'appelait pour le savoir.

- Bon sang tu m'avais promis, rugit la voix de Charles à l'autre bout du téléphone.

- Bonsoir à toi aussi !

- Tu devais toujours répondre à mes appels, continua-t-il sur sa lancée. Tu me l'avais promis, je me suis fait un sang d'encre.

- Inutile de t'inquiéter comme ça ! tentai-je de le rassurer.

- Pourquoi as-tu coupé ton téléphone ?

- Je dînais avec Gab à la maison et comme elle n'est pas au courant pour nous deux j'ai préféré l'éteindre plutôt que de le laisser sonner et qu'elle me pose plein de questions, lui expliquai avec le ton qui rend les choses compliquées.

- Pourquoi ne pas lui avoir dit ?

- Parce que c'est délicat. Je n'ai pas l'habitude de sortir avec des garçons, qu'en plus tu es un cas à part et que vous avez couché ensemble...

- Je vois ! accepta-t-il. Ce détail va-t-il me poursuivre toute ma vie ?

- Je pense que oui, le taquinai-je.

- Dans ce cas tu ne dormiras jamais tranquille !

- Oui Gabrielle ne fait que de me parler de ton imposante liste de conquêtes, grognai-je. Ce n'est pas ça le problème.

- Alors c'est quoi ?

- C'est mon amie et tu as couché avec elle, fis-je ma jalouse pour la première fois de ma vie.

- C'était avant que nous soyons ensemble, se défendit-il.

- Mais tu me draguais pendant cette période non ?

- Techniquement, après la gifle que j'avais reçue, j'ai cru que je ne te reverrais plus jamais.

- D'accord, balle au centre, me rendis-je. Je te promets de ne plus jamais te reparler de ton aventure avec Gab si tu ne me reparles plus jamais de cette gifle !

- Ce n'était pas une aventure, mais marcher conclus. Alors, comment as-tu trouvé les fleurs ?

- Ravissante, merci ! Au fait, j'aime beaucoup votre majordome Monsieur Potens, imitai-je Paul. Il est charmant. Il avait un message à me transmettre de ta part, mais nous n'avons pas eu le temps d'en discuter plus que ça. Tu avais quelque chose à me dire ?

- Rien d'important, Paul se chargera des détails avec toi, éluda-t-il rapidement pour changer de sujet. Je serai revenu pour le week-end.

Si vite ? Mon sang ne fit qu'un tour. J'appréhendais le moment où nous nous retrouverions seuls tous les deux. Je ne voulais pas qu'il se fasse d'illusions en s'imaginant que, maintenant que nous étions ensemble, j'étais à sa disposition pour assouvir ses pulsions.

- Déjà ? feignais-je la surprise. Tu ne m'as même pas dit où tu étais.

- À Londres !

- Pour le travail je suppose.

- Tu supposes bien. J'ai quelques conférences à faire pour présenter le cœur et je reviens aussi sec.

- Tu me le montreras ?

Il marque une drôle de pause avant de répondre sur un ton très touchant, comme s'il avait toujours voulu que je lui pose la question.

- Ça t'intéresse réellement ?

- Pourquoi tu dis ça ? m'offusquai-je presque.

- Parce que tu n'as jamais trop montré ton intérêt pour ce que je faisais. Tu es même partie de ma conférence au moment où je l'ai présenté.

- Je te promets de me rattraper, mais j'ai peur de ne rien y comprendre.

- Il n'y a rien à comprendre. Quand tu auras le cœur artificiel devant toi, quand tu le vois battre dans la poitrine de quelqu'un, tu restes ébahi devant la prouesse et tu remercies les miracles d'avoir lieu tous les jours.

- Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un miracle, le contredis-je. Tu es brillant et tout ça c'est possible grâce à ton travail. J'ai vraiment hâte de te connaître, lui avouai-je.

- De me connaître ? s'étonna-t-il. Tu sais, il n'y a pas grand-chose à savoir sur moi.

- Je refuse de croire que ta description s'arrête au fait que tu sois intelligent, riche et terriblement charmeur.

- Évidemment, là c'est très raccourci ! rit-il.

- Parle-moi de toi, le poussai-je à se confier.

- Une autre fois peut-être et on parlera de toi, trancha-t-il.

J'étais un peu déçu qu'il ne veuille pas m'en dire plus sur lui, mais j'avais déjà détecté chez lui une grande pudeur qu'il tentait par tous les moyens de dissimuler derrière une confiance en lui exacerbée.

Je ponctuai la fin imminente de notre conversation d'un bâillement que je ne pus retenir plus longtemps. Il se faisait tard et demain j'avais rendez-vous chez ma psychologue, ou au Yoga selon certains points de vue. Nous nous dîmes tendrement bonne nuit sans trop faire étalage de nos sentiments pour le moment et Charles ne put s'empêcher de me faire une dernière recommandation avant de raccrocher.

- Margaret ! me héla-t-il.

- Oui ?

- Décroche quand je t'appelle !

Cœur ArtificielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant