Chapitre 77

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Avant, le retour de Charles, je me ruai sous la douche et laissai exploser ma colère et ma détresse. Comment le destin pouvait-il être cruel au point de m'infliger ça au moment même où je commençais à me reconstruire ? Je passai un temps interminable sous la douche, me servant de grattoir en fibre de bambou de l'hôtel pour débarrasser chaque centimètre carré de ma peau de l'affreux souvenir de ses mains se glissant partout sur mon corps, de ses lèvres et de sa langue prenant possession de moi. Je m'attelai à la tâche avec un rituel bien précis en tête. Je laissai s'échapper du rideau de pluie au-dessus de ma tête l'eau la plus chaude possible, tandis que je grattai minutieusement mon épiderme dans le but d'en faire apparaître un nouveau.

À certains endroits, ma peau devint si rouge vif que je parvins même à me faire saigner. Mes avants bras étaient complètement abrasés. Lorsque je sortis de la douche, je m'emmitouflai dans un peignoir blanc en matière éponge, ce qui n'eut pas spécialement le don de calmer mes brûlures. Je quittai la salle de bains au moment où Charles rentra. Mon cœur battait à mille à l'heure.

Bien que je sois encore sous le choc de ce qui venait de m'arriver, j'avais tout de même réussi à retrouver une certaine paix intérieure. À vrai dire, à cet instant, j'étais plus exténuée que ravagée par le chagrin. J'étais dans une phase différente.

- On peut savoir ce qui t'a pris ? gronda-t-il sans préambule en se rapprochant de moi.

- Charles, il faut que je te parle ! tentai-je de le calmer en posant mes mains sur son torse ce qui eut l'effet de faire remonter les manches de mon peignoir plus que je ne l'avais prévu.

- Qu'est-ce que..., commença-t-il en prenant l'un de mes bras entre ses mains pour en observer les toutes récentes traces de mutilation. C'est toi qui t'aies fait ça ?

Honteuse, je ne réussis qu'à me cacher le visage entre les mains, une fraction de seconde, avant d'avoir le courage de faire face à mes actes. Debout, face à moi, Charles n'en croyait pas ses yeux. Il attrapa l'autre de mes bras et constata les mêmes sévices.

- Margaret réponds-moi ! me hurla-t-il.

- Ne me cris pas dessus ! crachai-je plus fort encore.

Je ne me souvenais pas lui avoir un jour parlé comme de cette manière. Il en resta bouche bée un instant, avant de devenir rouge de colère.

- Il faut que je te parle, repris-je plus calmement.

- C'est à cause de cet homme qu'on a croisé tout à l'heure ? Le père de ton amie d'enfance ? Je t'ai vu changer de comportement quand il est arrivé. C'est quoi l'histoire ? Vous avez couché ensemble ?

Je ne savais pas si c'était la jalousie qui le faisait dire ce genre de choses, mais le fait est qu'il n'était pas si loin de la réalité. Je me cramponnai à ses accusations pour tenter de lui dire la vérité qui refusait de sortir de ma bouche. Chaque fois que je devais avouer cet épisode de ma vie à quelqu'un c'était comme si on me violait une fois de plus. Le sentiment était bien au-delà de la honte, c'était indescriptible et incontrôlable.

- Oui ! lâchai-je la gorge serrée.

- J'en étais sûr, PUTAIIIIN ! s'égosilla-t-il. Tu m'as menti !

- Oui !

- Donc tu n'es pas vierge ? enchaîna-t-il au bout de nerf.

- Non !

- Et c'est tout ce que tu as à dire ? Pourquoi tu m'as menti ?

- C'est compliqué, commençai-je à ne plus pouvoir retenir mes larmes.

Cœur ArtificielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant