1:Presentation

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Le pire pour Izuku, c'est peut-être de savoir qu'il sera toujours en danger quand il rentre à la maison. C'est injuste, vraiment injuste mais d'un autre côté il n'est pas sûr de pouvoir imaginer les choses autrement. C'est comme ça: le ciel est bleu, un plus un font deux et Izuku n'est pas en sécurité dans sa maison. Il s'y est presque fait et ne le questionne plus vraiment maintenant.

C'est difficile d'imaginer qu'il est sensé ressentir une paix intérieure quand il sent son cœur bourdonner et se mettre à frapper contre ses côtes comme pour essayer d'en sortir au moindre faux pas, à la moindre erreur. Son cœur bat toujours plus vite que ceux des autres alors l'anxiété qui parfume ses veines et l'état d'alerte dans lequel il est plongé en permanence et qui le fait bondir au premier bruit, c'est un peu sa détente à lui, son état de base.

Et puis parfois il est stupide, comme quand ses pieds font grincer le parquet alors qu'il sait que la troisième marche du grenier fait du bruit et ça le force à se souvenir qu'il n'a pas le luxe de pouvoir oublier des choses comme ça et qu'il n'est rien d'autre qu'un parfait imbécile pour malmener un peu plus son cœur qui mériterait une pause.

Parfois il en a l'illusion, que sa maison est un foyer, qu'il peut baisser sa garde parce que maman lui demande comment il va, si ça s'est bien passé en classe et dans ces moments là il n'a presque pas besoin de se forcer à sourire parce qu'ils sont seuls à la maison.

Le plus souvent ce n'est pas le cas, pour son plus grand malheur. Parfois il n'a même pas le temps de mettre les pieds dans l'allée du jardin qu'il sait déjà que ce n'est pas une bonne soirée pour rentrer à la maison. Parce qu'il a cette façon de garer sa voiture qui lui fait resserrer sa prise sur les lanières de son cartable. Il n'est même pas sûr de savoir comment il fait pour déterminer que ce n'est pas un bon jour mais il ne se trompe jamais. Izuku est presque sûr qu'il le sent dans l'air, que son agacement flotte au dessus d'eux et fuit de la maison par la cheminée dans ces jours de tempête.

Il se demande aussi si sa maman s'en rend compte ou si elle s'est tellement habituée à la tension qui règne entre leurs murs qu'elle ne la quitte plus, comme un parfum ou l'humidité dans une salle de bain. Lui, il la sent. Il la voit même, cette rage, cette pulsion qui suinte des murs, rappelant sa présence même quand il n'est pas là; qu'il existe dans les silences domestiques et que ses yeux sont partout et surtout là où il ne peut pas le voir venir.

Seul le bruit du couteau l'accueille quand il rentre dans la maison avec un petit rythme qui lui indique que maman est dans la cuisine. Il sait que c'est un jour comme ça parce qu'il a serré son sac contre lui avant de pousser la porte et que la voiture est garée de cette façon qu'il ne peut pas expliquer mais qui lui fait dresser les poils des bras.

- Je suis rentré. Il parle à un couloir vide, assez fort pour se faire entendre mais pas assez pour monopoliser l'attention et il n'attend pas de réponse pour retirer ses chaussures et rejoindre sa mère à la cuisine, espérant la trouver seule pour retarder un peu plus l'inévitable.

Sa mère sourit quand elle le voit et il lui rend en s'installant près du congélateur pour l'observer sans la déranger. Il ne veut pas l'aider parce que ça voudrait dire dîner plus tôt.

- Comment s'est passé le collège aujourd'hui? demande Inko en continuant de couper ses carottes.

Il pourrait presque croire qu'ils sont seuls, en train de passer un bon moment mais la cuisine est silencieuse et ça lui rappelle que si l'homme n'était pas là, la radio serait en train de combler leur silence. La maison est toujours si silencieuse quand il est là.

- Très bien, ment Izuku en se rappelant du regard mauvais de sa professeur d'espagnol quand il a sorti ses affaires ou du self où des petites boulettes de pains ont été lancé dans sa direction.

Il passe inconsciemment une main dans ses cheveux et sourit à sa maman en lui posant la même question.

Il l'écoute parler de sa journée sans perdre son sourire, juste heureux de pouvoir écouter sa voix et ne l'interrompant que pour dire qu'il a des courbatures pour avoir une raison de masser son dos engourdi.

Il arrive toujours à presque l'oublier, à presque vivre. Et puis une respiration dans son dos se fait entendre et ses muscles se tétanisent et il se rappelle qu'il a des yeux partout, que les murs sont imbibés -comme un parfum, une salle de bain-, que la troisième marche du grenier grince et que la voiture est garée -comme-ci, pas comme-ça-.

- C'est à cette heure que tu rentres?

Il ne veut pas se tourner pour faire face à son beau-père, mais il le faut bien.

Sous nos apparences trompeusesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant