26: Restrictions scolaires

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J'ATTENDS VRAIMENT VOS RETOURS SUR LE CHAPITRE.

Il était dix-neuf heures. La nuit était tombée depuis plus d'une heure et l'ambiance maussade de novembre se faisait sentir dans l'air. La lune pâlotte se cachait derrière de gros et épais nuages gris qui présageaient déjà l'état dans lesquels les professeurs retrouveraient leurs élèves au début de la semaine d'après. Sur les vitres glacées de Yuei, une couche de buée se dessinait lentement et il n'y avait aucun doute dans le fait que certains élèves y aient déjà laissé la trace de leur main, de smiley ou encore de cœurs durant leurs temps de pause. L'herbe encore présente dans le parc était recouverte d'un givre blanc semblable à une couche de sucre-glace sur un dessert et qui n'attendait rien d'autre que de craquer joyeusement sous les pas d'un étudiant ou d'un professeur. Cependant cela ne risquait pas d'arriver car tous les élèves étaient rentrés chez eux, et quant aux professeurs ils n'étaient tout simplement pas d'humeur à gambader gaiement dans la brise légère automnale puisque depuis deux heures déjà, ils étaient réunis dans une salle bruyante à la table jonchée de tasses vides et de feuilles parsemées de notes.
Aïsawa souffla peu discrètement mais sans pour autant attirer l'attention de ses collègues, trop occupés à débattre vigoureusement. À cette heure, il pourrait être chez lui, son chat pattounant à ses côtés sur son fauteuil en train de gratter le papier tout en râlant sur l'incapacité de ses étudiants en sirotant un thé. Quoi quand y réfléchissant bien, il aurait plus besoin d'un autre café au vu des quelques coups d'œil qu'il avait déjà jeté sur les copies de ses secondes (certains d'entre eux n'avaient rendu qu'une copie gribouillée de quelques phrases tremblantes et il aurait besoin de toute la patience du monde et de celle de son mari pour y venir à bout sans les renvoyer). Il lui lança d'ailleurs un coup d'œil, jaugeant ses légers murmures argumentés face à la virulence de Midnight qui ne cessait de dire et redire ce qu'elle pensait depuis plus d'une heure avec l'appui présent mais pourtant plus effacé de Vlad King. Il lança un autre coup d'œil à la fenêtre qui encadrait la figure du directeur pour y observer les quelques branches de cerisiers éclairées par les lampadaires à la lumière jaunâtre se balancer souplement et faire dodeliner leurs feuilles presque mortes au rythme du vent glacial.
Le principal Nezu se leva soudainement et toussota, décidant que le débat avait assez duré et qu'il était temps que lui et ses collègues se mettent d'accord. Le silence se fit relativement dans la seule salle encore éclairée de l'établissement -bien que les locaux de services luisent encore faiblement dans l'ignorance du monde- et les regards se déposèrent les uns après les autres sur la créature humanoïde pour que le verdict tombe et qu'ils puissent enfin rentrer chez eux.
- Je propose un vote à main levé pour que nous nous mettions d'accord. La réunion a déjà bien trop durée et nous avons tous plus qu'envie de rentrer chez nous.
Les mains se levèrent par deux fois avant qu'il ne reprenne la parole, arborant son habituel sourire surnaturel.
- Bien, bien. Je vous demanderai donc de bien vouloir prévenir vos élèves lundi en ne laissant rien paraître de la situation actuelle. Notre but n'est surtout pas d'affoler leurs parents alors faites comme si tout cela était déjà prévu. Bonne soirée à tous!
-Quand même, murmura Midnight, je ne trouve pas cela prudent...
Comme si ça concluait cette entrevue (personne n'ayant envie de recommencer à débattre), les professeurs commencèrent à se lever et partir, sacs et carnets à la main et Aïsawa ne fut pas en reste, saisissant même ses clefs de voiture avant d'avoir passé la porte principale du bâtiment. Le goudron mouillé était silencieux sous ses pieds et ceux de son compagnon, si bien que s'il ne lui avait pas tenu la porte quelques minute auparavant, il n'aurait eu aucune idée de sa présence. Ce dernier tenait étroitement sa chemise en cuir marron entre ses mains frêles, peu enthousiaste à l'idée de l'échapper dans une flaque et de ruiner le travail qu'il avait fourni.
Aïsawa déverrouilla le véhicule et pris le volant entre ses mains crispées, expira longuement le stress de sa journée alors que son mari faisait claquer la portière. Il sentit une main se poser sur sa cuisse, qu'il recouvrit consciencieusement de la sienne, appréciant le contact du métal froid de l'alliance contre sa paume. Le moteur se mit à ronronner, le chauffage à s'enclencher et il sortit du parking vide pour s'engager sur les routes urbaines trop animées.
- Quel est ton avis sur ces stages? Dis le numéro un, la main toujours sur la jambe de son compagnon alors qu'ils attendaient que le feu passe au vert.
- Je suis d'accord avec toi dans l'ensemble. C'est trop dangereux et je ne comprend pas pourquoi Nezu les mets en place, même avec de telles circonstances.  La voiture se remit à avancer alors que le brun examina la réaction de son conjoint avant de se recentrer sur la route.
- Je ne vois pas vraiment en quoi c'est dangereux... Hormis les attaques mais nous pouvons les gérer.
- C'est là le problème. Répondît l'autre. On surestime trop nos capacités ces derniers temps et ça commence à sérieusement nous jouer des tours. Ces élèves seront sous notre responsabilité et s'il leur arrive quelque chose, c'est encore la réputation de notre établissement qui en prendra un coup. Sa côte est en chute libre depuis la rentrée à cause des attentats. Les parents désinscrivent leurs enfants par peur et on perd de l'argent à causes des attaques répétées. Un silence se fit dans l'habitacle et le blond avala sa salive avant de reprendre.
- Donc si je comprends bien, ces stages sont là pour rassurer les parents d'élèves?
- Et pour redorer notre image, ajouta le brun. Il permettront de remettre du beurre dans les épinards même si pour cela on doit autoriser l'accès à nos cours ce qui est du suicide à mon sens puisque la réputation de l'établissement se fait par son mystère, mais passons. L'établissement compte beaucoup sur ces stages alors ils doivent impérativement se passer sans le moindre accroc.
- Ça veut finalement dire que Nezu a laissé son éthique de côté pour sauver les chèques d'inscription... Le dépit se fit sentir dans la voix d'All Might et il saisit précipitamment l'une des mains posée sur le volant pour y entrelacer ses doigts ayant soudainement un besoin désespéré de réconfort, ce qui lui fut accordé quelques secondes plus tard.

Sous nos apparences trompeusesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant