Sous nos apparences trompeuses

7: Calvaire, jour 3

Katsuki était réveillé. Il ne sait pas vraiment ce qui l'a tiré de son sommeil -même s'il suspecte grandement que ça soit les mouvements de l'autre avant qu'il ne se lève- et il sait encore moins pourquoi il ne lui a pas fait sa fête quand il a ouvert les yeux ou au moins grogné pour qu'il s'excuse.

Peut-être que la fatigue était juste trop grande mais il s'est retrouvé seul dans la chambre à fixer le mur, silencieux, et il est resté là à s'écouter respirer pendant un bon bout de temps avant que Deku retourne à petits pas dans la chambre.

Quand l'autre garçon s'est réveillé en catastrophe -il n'y a vraiment pas d'autre mot pour le décrire, non mais quel imbécile- il a d'abord essayé de se rendormir, puis comme il n'a pas réussi il s'est dit qu'il lui ferait sa fête et là encore, surprise.

Surprise parce que quand il a sentit le matelas s'affaisser dans son dos, signe clair et évident que le garçon était en train de s'allonger, il a continué à faire semblant de dormir, comme s'il pouvait entendre la petite voix de sa conscience lui demander pourquoi le garçon mériterait de se faire frapper pour si peu.

Et comme Katsuki n'a pas réussi à lui répondre, il a préféré se persuader qu'il voulait juste voir ce qu'il allait faire s'il ne bougeait pas et s'est concentré sur le garçon pour ne pas penser à la boule inconfortablement serrée dans son torse.

Quand Deku a continuer à bouger, il a essayé de se motiver, se répétant que l'autre l'a réveillé, que ce n'est qu'un sale gosse pourri gâté et que ça lui apprendra peut-être une leçon salutaire mais même cette boucle de pensée n'arrive pas à le convaincre comme elle le fait d'habitude et il n'aime pas l'impression que ça lui donne de lui-même.

Comme s'il se voilait la face, qu'il cherchait des raisons pour être violent, qu'il cherchait une bonne raison pour pouvoir frapper l'autre adolescent.

L'idée jette un grand froid dans ses entrailles, d'horreur et il ignore encore la petite voix dans sa tête qui lui dit que ce n'est pas tout et qu'il le sait.

Peut-être qu'il le sait. Peut-être qu'il ne veut pas non plus y penser, que c'est trop tôt, trop lourd. Effrayant.

Il continue de penser, de se raccrocher à l'idée que l'autre l'emmerde tous les jours avec sa vie toute douce et qu'il est le seul à lui rappeler qu'il n'y a aucune raison pour que ça soit si facile pour lui mais ça commence vraiment trop à sonner comme une excuse, comme s'il avait besoin de se rappeler pourquoi il le déteste parce que -peut-être- ce n'est pas une haine aussi tangible et instinctive qu'il voudrait et plus il y pense, plus il sent la nausée monter et-

Il ferme les yeux, se raccrochant à son image, plantant ses griffes dans l'illusion qu'il se fait de sa vie jusqu'au sang, s'y ancrant pour ne pas tomber dans ces pensées où il n'a aucun repère.

Mais maintenant il sent le doute se frayer un chemin comme une fissure dans un mur, laissant suffisamment d'espace pour que le filet d'air froid de la raison passe dans la faille et fasse se dresser les cheveux de sa nuque.

Il sait maintenant que sa vie n'est pas aussi rose qu'il l'imaginait même si ça le fait grincer des dents, qu'il a beau insister, c'est trop tard pour faire comme s'il n'avait pas entendu les remarques autoritaires de l'homme ou remarqué qu'il ne parle qu'à peine plus qu'au collège et que contrairement à ce qu'il s'imaginait, il a l'air de vouloir se faire oublier plus que tout.

Maintenant il sait. Il sait et il ne peut pas l'ignorer sans accepter que ça serait soit de la stupidité ou de l'acharnement et il ne sait pas laquelle de ces deux options est la meilleure.

Il se fait interrompre par du mouvement à côté de lui et se laisse distraire par Deku qui continue à se tourner et se retourner.

Katsuki sent les muscles dans son bras se tendre par réflexe quand le bras de l'autre passe contre sa taille et qu'une de ses mains se perd sur son ventre.