5: Calvaire, jour 1

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Izuku a le nom de son ami d'enfance sur le bord des lèvres quand il se réveille tant l'idée qu'il vienne vivre chez lui pour la semaine a hanté sa nuit.

Il ne peut pas s'empêcher de soupirer en fermant les yeux, essayant tant bien que mal de chasser la tête blonde qui tourne en boucle sous ses paupières, épuisé et agacé d'être incapable d'avoir une nuit reposante même lorsqu'il ne fait pas de cauchemars.

Un coup d'œil en direction de son réveil lui fait savoir que c'est le quatorze mai, qu'il fait 7°C à l'extérieur et qu'il est trop tôt pour qu'il se prépare pour l'école mais bien trop tard pour essayer de se rendormir.

Ignorant la douleur sourde de ses muscles, Izuku se traîne péniblement jusqu'à la salle de bain pour prendre une douche chaude.

Habituellement, il ne lèverait même pas les yeux pour voir son visage mais ce matin, pour une raison qu'il ne comprend pas, il laisse sa serviette tomber au sol après l'avoir passé dans ses cheveux humides à la place de continuer sa routine sans réfléchir et se plante devant le miroir.

Il peut voir l'ombre de quelques muscles se dessiner sur son torse et ses bras et même s'il voit plus que bien ses clavicules il commence à avoir l'illusion que ses épaules ne sont pas constituées que d'os et de peau.

Il pourrait être content de voir son corps changer comme ça si d'autres choses ne restaient pas immuables, inchangées et éternelles... comme les bleus qui tachent son corps de toutes leurs couleurs, allant du violet au jaune, lui rappelant que ni les muscles d'hier ni ceux qu'il aura demain ne peuvent le protéger.

Il touche un bleu du bout de ses doigts, se surprenant à grimacer quand il appuie dessus, étonné de voir que son corps n'a toujours pas abandonné la folie qu'est d'essayer de le soigner pour plutôt le rendre engourdi. Izuku sent bien que sa peau est tout de même un peu endormie autour des bleus et il se demande à quel point ça serait agréable d'être bleu de partout pour ne plus rien sentir.

Il ne pense pas qu'il pourrait être bien plus laid, peint d'hématomes, et ça ne serait pas vraiment un problème puisque le seul qui le voit nu ne l'a pas choisi pour sa beauté.

Izuku a l'impression de revenir dans son corps quand il cligne des yeux et il ouvre l'armoire à pharmacie pour prendre l'arnica et commencer à en appliquer sur chaque tâche qu'il voit, ravalant sa honte quand il voit celles qui viennent du bus.

Il se débrouille pour panser les endroits de son dos où sa peau s'est brisée pour ne pas tacher sa chemise puis enfile son uniforme d'hiver avant de descendre prendre un petit déjeuner léger.

Ce n'est pas rare pour le jeune homme d'aller se percher sur le bord des falaises qui sont juste contre la mer quand il ne se sent pas très bien ou qu'il a besoin de penser. Et comme il en a régulièrement besoin, il a son petit coin bien à lui, sa falaise. Ce n'est pas vraiment la sienne mais personne n'est là pour le contredire puisque personne n'a pour habitude de venir de ce côté, des rumeurs disant qu'elles sont trop instables et les parents n'ayant pas envie que leur enfants fassent une chute de plusieurs dizaines de mètres par accident repoussent ceux qui sont trop curieux.

Izuku lui, il se met toujours au bord de celle qui fait une pointe et regarde la grande étendue d'eau grisâtre venir s'écraser plus bas. Parfois il se met à parler, dans le vide ou en s'imaginant que la mer l'entend, juste pour sortir des mots, pour ne pas oublier comment parler.

Quand il regarde l'heure sur son téléphone, il est déçu de voir qu'il doit déjà partir pour ne pas rater son bus.

Il descend la rue quand il voit son ami d'enfance plus loin, marchant avec les épaules beaucoup trop courbées pour qu'il soit de bonne humeur et en tapant régulièrement dans un caillou qui doit être de son avis. Izuku prend tout de même la décision de l'aborder et inspire un grand coup pour se donner du courage.

Sous nos apparences trompeusesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant