Acte III, scène 3.

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Jaesa, Estebar, un garde et un inconnu.


La Princesse et le Lord sont sur le chemin principal quittant la Capitale, suivis d'un garde, plus en retrait. Elle demeure dans le silence depuis le début et il la scrute étrangement.

ESTEBAR, à part — Je suis perplexe. Quelques temps en arrière, elle me proposait gaiement un repas, éblouissante comme les étoiles ; et là, elle est aussi terne que la terre en pleine pluie. Je ne comprends pas ce changement. (incertain) E-Est-ce que tout va bien, votre Altesse ?

JAESA Bien sûr. (à part) Quelque chose est advenu. Quelque chose s'est brisé. Ne devrais-je pas être heureuse ? Enfin je quitte le palais. Enfin Estebar n'est rien que pour moi. Enfin je vais savoir ce que nous cache père. Pourquoi ne suis-je pas heureuse ? (à lui) Les Montagnes d'Or sont-elles encore loin ?

ESTEBAR Nous y sommes déjà, votre Altesse.

JAESA  Mais où sont les arbres tout d'or revêtus ? Et les feuilles brillantes qui volettent autour de nous ?

ESTEBAR, attendri — Vous vous attendiez à cela, vous devez être déçue. Ce que vous décrivez ressemble à une histoire pour enfant. Vous ne trouverez rien de tel ici.

JAESA Alors pourquoi a-t-on appelé ces montagnes ainsi ?

ESTEBAR Car il existe plusieurs forteresses dissimulées où l'on entreposait l'or de la nation jadis. Aujourd'hui, elles ne sont plus utilisées, mais nous pourrons toujours nous en servir en cas d'invasion.

JAESA Comme celles que possèdent Zishao.

ESTEBAR En effet, votre Altesse.

GARDE Halte ! Votre Altesse, un intrus devant nous. Dois-je le faire s'écarter ?

Au milieu du passage, un homme était assis.

ESTEBAR Laissez. Je m'en occupe.

Il descend de son cheval et s'approche de l'inconnu.

ESTEBAR Excusez-moi, Monsieur. Vous ne devriez pas vous asseoir sur le chemin. Imaginez qu'une calèche arrive, vous seriez embêté.

INCONNU Que faites-vous, vous, sur la route ?

ESTEBAR, perplexe — Nous la prenons, nous y voyageons, Monsieur.

INCONNU Et pour aller où ?

ESTEBAR, fronce les sourcils — Là n'est pas la question, Monsieur. Vous n'êtes pas en sécurité ici. On pourrait vous blesser par inadvertance. Surtout que nous sommes situés à un tournant. Il est aisé de ne pas vous apercevoir.

INCONNU Et pour aller où ?

ESTEBAR Je-Je... Euh...

Il ne sait que lui répondre, il remonte donc sur sa monture.

JAESA, tout bas — Qu'est-ce qu'il y a ?

ESTEBAR Je l'ignore. Cet homme est étrange. Passons notre chemin, votre Altesse.

Elle descend à son tour.

ESTEBAR Votre Altesse !

Elle rejoint l'homme, rattrapée par le Lord.

JAESA Êtes-vous blessé, Monsieur ? Avez-vous besoin d'aide ? Vos sacs ont l'air lourds et vous ne parvenez plus à les soulever. C'est pourquoi vous êtes là. Est-ce que je me trompe ?

INCONNU Cette enfant est bien plus perspicace que vous, Lord grandes-jambes !

Elle se retient d'exploser de rire, tandis qu'il est offensé.

ESTEBAR P-Plaît-il ?

JAESA Nous pouvons charger vos sacs sur nos chevaux. Habitez-vous loin ?

INCONNU Tout proche, à quelques mètres. Mais cette proposition ne semble pas plaire à Lord grandes-jambes.

JAESA Ne vous inquiétez pas pour lui ; nous allons vous accompagner, Monsieur. Garde ! Approchez, s'il vous plaît.

L'inconnu se lève et, avec le garde, attache ses sacs sur le dos des chevaux.

JAESA Nous avons le temps. Aidons ce pauvre homme.

ESTEBAR, crispé — Je n'ai pas confiance en lui, votre Altesse.

JAESA Est-ce parce que des mouches le suivent ?

ESTEBAR Non, c'est parce qu'elles meurent à son passage. Êtes-vous certaine de vous ? Votre Altesse, je suis censé vous protéger, alors que nous nous dirigeons chez un homme dont nous ne savons rien et à l'apparence douteuse.

Elle lui sourit, malicieuse, et regagne les montures.

JAESA Prenez mon cheval, Monsieur. Un peu de marche ne me fera pas de mal.


Ethrian I - TinudaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant