Noir - Orchidée

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Noir-Orchidée

De l'ailleurs, j'aurais fait le paradis
J'aurais tissé la soie dans les pétales
J'aurais déposé le ciel sur ta peau
Je t'aurais bâti un temple de pur silence
Et j'aurais baisé ton front chaque soir
Pour que tu puisses songer en dormant
J'aurais pu nous faire toucher le soleil
Et nous étendre dans ses rayons
J'aurais pu t'offrir ton rêve
Et tous ses horizons.
Alors pourquoi sommeilles-tu
Dans cette eau claire
Où je suis l'inconnu ?

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Il est un marcheur blanc, au corps taché, qui traverse les rues de l'absence.

Il est un être vagabond, aux vêtements coulants, confondu dans le silence.

Dans les allées pleines de mystères des quartiers les plus hauts, l'eau a tracé son chemin, l'eau est résorbée, s'évanouissant dans quelques replis de la cité.

Combien ? Combien en reste-t-il. Combien de gens. Survivants. Combien de chœurs massacrés entre les murs d'une église. Combien de cœurs crevés sur le béton cru. Combien de chair tendre percée sous les coups aveugles du noir. Noir. Combien de points blancs sur l'asphalte de roche aux pores qui dégoulinent. Un. Les larmes ont coulé. Combien de morts. Et combien de fleurs. Combien de gens. Survivants. Et combien d'oubliés. Et combien d'entre eux n'ont jamais existé. Et combien ? Combien de temps. Reste-il. Peu. Et combien ? Combien d'homme en noir. Un. Et puis il y a. Tous les autres. Ensuite. Qui se rassemblent. A l'intérieur. De lui.

Comme il n'y a plus rien, on n'aperçoit pas le marcheur sous les néons qui se rallument. Le tissu blanc coule sur le sol. Et ses pieds nus frôlant le goudron s'imprègnent de tout ce passé qui traîne là, douloureusement remémoré. Et ce corps n'attend plus. Le fleuve va ; le marcheur va aussi. Et là où il passe la lumière revient. Comme des fleurs qui poussent, une à une.

Ce sont des orchidées, offertes aux disparus.

Ce sont des orchidées, pour tout ce qu'ils ont perdu.

La ville est soudain devenue impavide.

Sur la route familière du souvenir, son corps était intenable, irrésistiblement attiré par le parterre, par une force innommable, qui alourdissait ses membres de sommeil, et ce fut les gouttes longeant ses os saillants, qui le réveillèrent constamment.

Je te poursuis. Dans les brumeuses vallées. Il est l'heure.

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Profondeurs
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Un groupe de personnes en plein silence, entre un hangar et un pont, sous un demi toit de pierre, assises dans la poussière autour d'une vague clarté qui interpelle. L'un des hommes est recroquevillé sur lui même, dans un fauteuil de voiture terrestre que quelqu'un a sûrement arraché, et que d'autres ont sûrement trimballé jusqu'ici, dans l'oubli. Un autre gars est assis sur une caisse de métal, en tailleurs. Les autres sont sur le sol. Ils dorment. Ou alors c'est ce qu'on espère. Au milieu du cercle, un cylindre rouillé laisse échapper une lueur vacillante. Teinte violacée.

Ou orange.

Celui sur le fauteuil lève les yeux pour apercevoir l'ombre mouvante qui approche. Il murmure un son incompréhensible à l'adresse de l'autre. L'autre fixe les flammes artificielles, n'entend pas. Il n'entend que le froid.

Ou alors il entend tout.

« -Jin. »

A son nom, il lève la tête. Un être marche vers lui, vers eux, vers cette orchidée orange qui danse dans la nuit inexorable. La silhouette se dessine et devient nette, plus nette que tous les paysages brouillés qu'ils ne verront jamais. Le gars du fauteuil se redresse alors que le visage de l'étranger apparaît dans la lumière. Pureté réprouvée. Damnation juvénile. Le gars se lève. Ses yeux sont largement ouverts. A croire que son visage a encore la force d'être étonné. L'autre se dresse immobile, le regard plongé dans les fausses flammes qui réchauffent son visage.


« -Hé. Tu es trempé. »

Tu vas tomber malade.

« -Qu'est-ce que tu fais là ? Tu t'es perdu ? Les gens sont dangereux, tu sais. »

Je ne crois pas que tu sois dangereux.

« -C'est quoi ton nom ? »

Je ne le dis jamais.

« -Je m'appelle Hoseok. Comment tu t'appelles ? »

Dis moi ton nom s'il te plaît.

« -Regarde-toi. Tu meurs de froid. »

Tu m'as dit que tu mourrais pas.

« -Approche-toi du feu. »

Ça doit être beau un feu.

« Qu'est-ce que tu fais ? »

Rien. Je vis. C'est tout.

« -C'est du sang sur tes vêtements ? Quelqu'un t'a fait du mal ? »

Je n'ai jamais fait ça avant.

« -Hé ? »

J'aimerais que tu fasses comme dans mon rêve.

« -Tu as perdu tes amis, dis ? »

Souviens toi, tu as promis.


« -Qu'est-ce que tu fais ?

-Je dessine mon rêve. »


L'étranger lève la tête. Deux brasiers. Deux feux de forêt. Figés dans la glace.

« -Alors, comment tu t'appelles ? »

JungKook.

« Kim TaeHyung. Mon nom est Kim TaeHyung.

Je cherche quelqu'un. »



« C'est tout ?

Non. »


« Il y a des fleurs au bord de la rivière. »

Minuit - TaeKookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant