Ciel-Rouge
Le monde est à eux.
JungKook et TaeHyung marchent à travers une ville déserte et ensevelie par la nuit. Suivant les traces du fleuve qui a quitté son lit, ils marchent des heures. Ils vont jusqu'au bout de la ville. Et au bout de ce chemin qui n'a plus rien de douloureux, la carapace s'ouvre en une brèche immense. Lorsque le fleuve a inondé la ville les digues ont été brisées. C'est une porte au milieu de la nuit. C'est une fente d'espoir substituée à l'oubli.
Ils se tiennent sur un tas de gravas et regardent ce vaste amas noir, illimité, qui s'étend devant eux. Un aperçu de l'Ailleurs vu depuis le bord de la ville. Des points de lumière alignés leur éclairent une route. Ils voient ces lumières, ils voient l'inconnu quasiment invisible, sentent le souffle mélancolique de la ville dans leur nuque et n'y pensent pas longtemps. JungKook attrape la main de TaeHyung, ils s'enfoncent à travers la brèche et rejoignent la route.
C'est une large avenue de béton fissuré, sur lequel on a peint des lignes infinies et gardées par de simples barrières. Sur ces routes ils croisent parfois des tas de ferraille vieux de plusieurs millénaires. Ils sont là, laissés à l'abandon, retournant progressivement à l'état de poussière. Et plus ils avancent moins il y en a, plus les points de lumière s'espacent, plus les lignes sur le sol s'atténuent. Et plus ils s'éloignent plus le souffle froid de la ville devient fade et infime.
Puis il arrive un instant soudain où plus un bruit ne survient, où plus un vent ne souffle, où plus une pensée ne les habite. JungKook écarquille les yeux et monte sur une des épaves pour observer au loin. TaeHyung le regarde en souriant sagement. C'est une chose merveilleuse, fulgurante et innommable qui se dresse droit devant lui, pas à la fin de la route, mais comme située à l'infini. C'est une chose intouchable mais présente, comme un rêve, comme un sentiment. Elle envahit ses yeux, l'espace entre ses cils, sa bouche entrouverte, les moindres pores de sa peau, se précipite à l'intérieur et semble y combler chaque vide.
Amante passionnée qui remplit d'abord le ciel de couleurs claires
Puis de moins en moins mystérieuse, elle lui fait un cadeau
Poussant derrière une ligne droite, une fleur de feu illumine de monde
JungKook sourit. Il n'a jamais souri de cette façon là.« -TaeHyung, tu avais raison. »
Le sang des planètes
S'est dilué dans le ciel
Et nous a offert l'aube
Jaillissant à l'horizon« -C'est le jour. »
TaeHyung le regarde comme s'il était la seule aube qui soit. Il le regarde avec amour reprendre ce à quoi il a droit. Et quand JungKook court vers le soleil, il le suit comme il peut.
Le soleil se lève. A l'échelle de leur vie, c'est la première fois. C'est le jour. Le premier jour après tout ce temps passé dans le noir. Ils n'ont plus de ville. La ville ne les a plus. Et jamais ils ne se retournent pour lui jeter un dernier regard. Et toute cette lumière, et cet horizon infini qu'ils voient pour la première fois, JungKook se dit que c'est la liberté enfin.
Bientôt la route et ses alentours disparaissent. A force de courir et d'avancer, le soleil se déploie et de nouvelles couleurs apparaissent. Le béton gris s'enfonce dans une terre brune, presque pourpre, humide et tiède. Le ciel est d'un bleu très clair et sa lumière est reflétée par les gouttes de rosée sur l'herbe verte. Des terrains vagues couverts de collines et de verdures. L'air y sent bon. Il n'y a pas de vent, mais une agréable brise. Il n'y fait pas froid mais frais. Les rayons du soleil plongent sur leur peau pâle et lui donnent une teinte plus beige. Ce faible picotement parcourt le visage de JungKook. Il le tourne vers le ciel, ferme les yeux, détend ses sourcils, sourit suffisamment pour ne plus ressentir que cette chose indéfinissable, en lui.
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Minuit - TaeKook
FanfictionMinuit, dans une ville. Minuit, en haut des immeubles. Minuit, des perles dans les yeux. Minuit, et un ciel sans dieux.