Noir-Sang
Son dos comme une plaine
Balayée par les vents
Et sous les brises, des fontaines
Célestes, se précipitent
A toute vitesse
Contre les vitres
De deux yeux fidèlesTaeHyung s'est endormi, figé dans l'écroulement soudain. Il s'est évanoui sous la douleur et le plaisir de ne plus être grand chose. Bercé par le chemin qui court, qui ne sait pas où il va, qui se tait et reste vide. TaeHyung est un passager absent, flottant dans l'inconscience. Et lentement, l'inconscience se transforme en rêve. Il ressasse. Il ressasse des choses qui n'existent pas, et qui peut être, n'ont jamais existé. La vitre brisée tremble. Et à la surface de son poing, des blessures sans peau, des brûlures sans teinte, des cratères roussis. Ils se languissent. Et une peinture dont il ne connaît pas la couleur coule le long de la vitre. Coule le long de ses mains. Coule le long de son front, rentre sous ses paupières, résorbe ses pupilles vides. Et il les voit dans sa tête, les maudites, les sacrées,
les foutues gouttes de sang.
Il y en a tellement ! Tellement que ça forme une flaque. Tellement qu'elle n'est pas rouge la flaque. Elle est toute noire. C'est de l'encre, c'est du pétrole. C'est la trace fluide de sa peine. Son corps au bord du quai, allongé sur ce cercle qui coule et plonge jusque la voie. Son corps muet et immobile qui n'ouvre pas les paupières. Et au milieu de sa bouche ouverte, peut être sortie de sous sa langue encore humide, une fleur pousse. Elle grandit, éclot, se dépose sur le rebord de sa lèvre inférieure, ressort puissante au dessus de son menton pâle. Puis une autre la succède. Finalement quand il regarde bien, il s'aperçoit qu'elles ne sont pas si sombres. Que les pétales sont comme l'améthyste brisée, que les feuilles fortes sont des cœurs comme des sapins. D'autres fleurs viennent encore, là, de sous sa main, sa main portée à sa poitrine, et les fleurs la recouvrent, et les feuilles aussi, et sous ses ongles sales il voit encore les tâches pleines de nuit. Et c'est une nuit sans étoiles qui coule tout le long du quai, et c'est une drôle de fleur rouge, béante, qui brille entre ses doigts. Et c'est un drôle de souffle celui qu'on entend pas. TaeHyung s'effondre sous le sol.
Les fleurs sont résorbées dans le sang.
TaeHyung ne se souvient que peu de choses. Quand le rêve s'est arrêté, il s'est réveillé, et à ce moment là, il ne voyait plus les couleurs. Le train était toujours en mouvement. Mais il n'y avait plus de couleurs. Il a vu la vitre brisée. Et il s'est rendormi.
Il s'est réveillé une heure plus tard. A peine ses yeux se sont-ils ouverts qu'ils se sont mis à pleurer. Le faisceau d'une lampe torche avait été orienté droit sur son visage. Ou alors ce n'était pas une lampe torche. Il ne sait plus bien. On a détourné la clarté aveuglante. Il a continué de pleurer. Il a entendu des voix. Il a vu des visages flous se pencher vers lui. Il a senti qu'on le ramassait. Il a voulu dire qu'il avait mal aux mains. Il croit qu'il n'a rien pu lâcher d'autre qu'un grondement sourd. On l'a attrapé par les bras, par les jambes, on l'a tiré vers il ne sait où. Il a voulu tendre les doigts. Mais ses doigts n'ont touché nulle part. Puis soudain il s'est senti lourd.
Et il s'est rendormi.
Les fleurs sont résorbées dans le blanc.
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Minuit - TaeKook
Fiksi PenggemarMinuit, dans une ville. Minuit, en haut des immeubles. Minuit, des perles dans les yeux. Minuit, et un ciel sans dieux.