Chapitre II

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Le lendemain, la lumière du soleil qui passe à travers les vitres de la voiture de la corse réveille cette dernière très tôt. Elle se redresse sur sa banquette avec le sentiment de dégoût énorme envers elle-même. Elle a froid, très froid et elle peine à articuler ses mouvements. Jenifer se laisse donc le temps de reprendre toutes les sensations de son corps et de se débarrasser des fourmis qui courent dans ses jambes. Un homme passe devant sa voiture, elle le reconnait, c'est le gardien du studio. Elle se glisse hors de sa voiture et rapidement s'approche de l'entrée des studios, le plus discrètement possible. Devant les grandes portes, des techniciens attendent déjà, elle les observe entrer et enfin entre à son tour sans dire bonjour à personne, la tête baissée et sans être vue. Elle court à sa loge et verrouille la porte à clé. Elle se douche et se lave plusieurs fois de suite. A peine rincée elle remet du savon. Elle forte sa chair à en devenir rouge, elle veut faire disparaître chaque centimètre des traces de l'homme. Elle s'acharne sur son suçon mais rien n'y fait, il ne part pas. Quand elle sort enfin elle se sèche puis se maquille pour cacher ses bleus et ses cernes mais, pour ça, rien à faire. Alors elle enfile une paire de lunettes de soleil. Elle se change et fourre au fond d'un panier son linge sale. Matt frappe à la porte. La brune sursaute, et pousse un petit cri aiguë au passage. Elle ouvre la porte timidement et laisse entrer le blond dans sa loge après l'avoir reconnu.

Matt : Oh tranquille c'est juste moi. Ça va ?

L'espace d'une seconde elle le regarde dans les yeux avec l'envie de tout lui raconter mais la honte est si forte et si présente qu'elle ne le peut pas.

Jen : Oui, euh... T'as pas un cachet ? J'ai mal à la tête.
Matt : Si attends je vais les chercher. Tu en veux...
Jen : Rapporte la boîte.
Matt : Ok. Sinon les lunettes c'est...
Jen : La lumière j'ai mal aux yeux.
Matt : Mais il y avait quoi dans ton verre hier ?
Jen : Je sais pas.

Matt part et revient avec les cachets. Entre-temps, Garou est arrivé.

Garou : Dis-donc tu nous cache un mec toi, dit-il en regardant le cou de la brunette.
Jen : Non ça c'est ma ceinture de sécurité je me suis brûlée avec hier en freinant fort.
Matt : Ah j'ai cru que tu étais rentrée en taxi... j'étais presque sûr d'avoir reconnu ta voiture sur le parking hier. Alors que je suis parti bien après toi.
Jen : Tu sais dans le noir comme ça une voiture noire... c'est facile de confondre.
Matt : Oui.
Garou : Bref, je te crois pas mais je suis un mec bien alors je fais genre que si.
Jen : Oui...bah merci Garou. Bon on y va.

Sur le plateau Jenifer habituellement en robe est aujourd'hui en pantalon. Un aïe lui échappe quand elle s'assoit.
Matt : Ca va?
Jen : Oui je me suis cognée le coude c'est tout.

Les talents font leur entrée et une jeune fille nommée Carla arrive. Elle chante L'aigle noir de Barbara. Cette chanson qui a déjà un grand effet sur la chanteuse en temps normal la fait ici fondre en larmes, mais au point où, à la fin de la chanson, Nikos demande une pub. La corse quitte le plateau sans attendre que les caméras soit coupées. Elle fonce dans les coulisses en ignorant ses fans et surtout le talent qui n'a pas encore prononcé un mot. Toute la salle reste abasourdie par la réaction de la star. Matt se lève alors timidement et va la rejoindre.

Matt : Jen.
Jen : Laisse-moi j'ai juste besoin de temps là.
Matt : Mais ça va ?
Jen : Oui, oui.

Matt reste à côté et il entend la jolie brune pleurer. Elle pleure comme il ne l'avait jamais entendu pleurer, pourtant il a souvent été là dans ses peines et ses moments difficiles alors c'est loin d'être les premières larmes que Jen verse devant lui. C'est si intense, si fort. Il semble à cet instant impossible pour elle de respirer. Ça ne dure pas très longtemps, elle se reprend en main au bout de trois minutes. Matt tante d'ouvrir la porte, mais elle est fermée à clé.

Matt : Jen... Ouvre-moi.

Le petit bruit de la serrure se fait entendre et au moment où Matt pose sa main sur la poignée la porte s'ouvre et la brune passe comme si de rien n'était ; elle s'est même remaquillée.

Matt : Stop. Fais pas ça.
Jen : Ça, quoi ?
Matt : Jen, cette chanson tu l'as écoutée un milliard de fois et tu t'es jamais mise dans cet état. Et bien que cette petite chante très bien ça mérite quand même pas... ça.

Il la regarde de haut en bas, le regard plein d'inquiétude. Elle voudrait se jeter dans ses bras, qu'il la serre fort jusqu'à ce qu'elle s'étouffe. Mais c'est impossible elle se sent salie, humiliée et très seule.

Jen : Oui bah voilà. Je sais pas moi j'ai peut-être un problème d'hormones.
Matt : Pffff bon aujourd'hui tu veux pas me parler mais je sais que comme toujours ça va finir par exploser.

Il part. Une larme échappe à la Corse et ils retournent tous sur le plateau. Carla va évidemment dans l'équipe de Jenifer qui lui fait promettre de ne plus jamais lui chanter du Barbara. Tout ça sur le ton de l'humour même si le cœur n'est pas vraiment là...

Jen : Matt, tu peux me ramener chez moi s'il te plaît ? dit-elle en le rattrapant sur le parking.
Matt : Bah et ta voiture ?
Jen : Elle marche plus.
Matt : Elle marchait ce matin pourtant.
Jen : Oui mais là elle marche plus.
Matt : Bah monte.

Le blond ramène Jenifer dans un silence glacial jusqu'à chez elle. Elle a si mal. C'est tellement  dur d'être à côté de son allié de toujours et de ne rien pouvoir dire. Elle voudrait briser le silence, briser le malaise qui règne mais elle a peur de se mettre à pleurer ou de dévoiler tout ce qui s'est passé. Il est hors de question de parler de ça. Elle veut juste faire comme si rien n'était arrivé et puis il ne faut pas que quelqu'un le sache, encore moins Matt, elle l'aime si fort. Elle ne veut pas que le regard qu'il porte sur elle change. C'est évident pour elle ; il serait dégoûté par elle s'il savait.

Jen : Merci Matt, à demain.
Matt : De rien ma belle, à plus.

Une fois dans son appartement, elle retourne encore à la douche où elle se lave encore et encore. Habituée a dormir en débardeur et short même en hiver, là, elle n'y arrive pas. Elle enfile un gros pull et un legging pour se cacher à elle-même, pour ne pas voir les marques de bleus sur son corps. Elle part se coucher exténuée, et sans manger.

Ça fait si mal Où les histoires vivent. Découvrez maintenant