Chapitre I

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Un air de fête régnait sur Vienne et son palais. Le Maître de Chapelle allait enfin donner une nouvelle représentation. Beaucoup se demandaient pourquoi était-il resté dans l'ombre si longtemps avant de revenir composer. Son retour faisait le plus grand bien aux aristocrates et courtisans à qui l'Italien avait énormément manqué. Pendant deux longs mois, Antonio avait quitté la capitale de la musique pour retourner en Italie et se ressourcer un peu. C'était assez difficile à croire à la vue de sa pâleur cadavérique et des cernes creux sous ses yeux sombres mais le compositeur allait bien mieux qu'avant son départ. Cependant, il espérait que durant ces deux mois d'absence, son rival aurait quitté la ville pour les villes voisines ou capitales étrangères mais rien du tout. Mozart était toujours là à écrire ses opéras outrageant la noblesse et ses partitions compliquées.

Antonio s'était éloigné pour oublier le jeune homme mais cela s'était avéré parfaitement inutile. Les Noces de Figaro restaient gravées dans sa mémoire et refusaient de laisser son esprit en paix. Tout empira lorsque Wolfgang vint saluer son comparse d'une courbette extravagante. Le plus âgé laissa s'échapper un soupir exaspéré, croisant les bras face au blondinet.

«Que me vaut-ce salut exagéré, Mozart ?

-Salieri, mon ami, vous m'avez énormément manqué, vous savez. Répliqua l'indécent adolescent avec un sourire narquois aux lèvres

-Dommage que votre gloire cesse dès le moment où je pose le pied dans le palais. Rétorqua l'Italien d'un air mauvais

-Oh je vous en prie, Salieri ! Ne soyez pas aussi méchant ! Je sais très bien que ma musique vous plait.

-Vous osez qualifier cela de musique ? À votre place, j'aurai plutôt honte de ces horreurs. Maintenant, si vous voulez bien m'excuser, j'ai du travail.

-Mais bien sûr. À plus tard ! »

Mozart lui offrit une autre révérence moqueuse et Antonio lui jeta un regard noir avant de s'en aller en direction de son bureau où il s'installa pour parfaire le morceau qu'il allait présenter. Il trouva plusieurs notes à changer pour plus d'harmonie mais se surprit à siffloter Les Noces de Figaro. Secouant la tête, le brun souffla bruyamment.

Sérieusement, qu'est-ce qu'il me prend de chanter cela ? Même s'il compose bien, il ne m'arrive pas à la cheville!

Il arrêta la plume sur un morceau de papier, perdu dans ses pensées orgueilleuses et prétentieuses. Rosenberg vint frapper à sa porte, le tirant de sa rêverie. Le compositeur leva les yeux au ciel et lui demanda d'entrer, se tournant vers lui.

« Salieri, pourquoi vous chantiez cette ignominie ?

-Je ne chantais pas. Pourquoi gâcherai-je ma voix pour cela ? Demanda Antonio hautainement

-J'ai dû rêver alors. Avez-vous fini votre nouvel opéra ?

-Bien évidemment. Vous m'avez pris pour Mozart qui met des jours et des jours pour composer ? Allons, vous savez que je vaux mieux que cela.

-Je n'en doutais pas du tout. L'Empereur attend énormément de vous, vous savez.

-Je sais, je sais et je ne le décevrai pas. Douteriez-vous de mon talent ?

-Non, nullement ! Vous êtes bien meilleur que cet écervelé !

-Cela, je me le demande...Soupira le compositeur à lui-même

-Vous avez dit quelque chose ?

-Non. Maintenant, sortez. J'ai besoin de repos.

-Assurément ! »

MaestroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant