Chapitre XIV

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Sept mois passèrent durant lesquels Antonio avait fait copier ses partitions pour débuter les répétitions et les finaliser. Le compositeur ne dormait plus très bien depuis sa crise d'angoisse, ayant à présent peur de la solitude nocturne. Morphée ne restait à ses côtés qu'une heure ou deux avant de le laisser. Enchaînant terreurs nocturnes sur paralysies du sommeil, il avait fini par refuser de regagner sa chambre, restant la plupart du temps au rez-de-chaussée. Il occupait ses nuits comme il le pouvait, composant sans se poser de question, allant parfois aux fumeries d'opium pour se détendre sans se douter que cette drogue pouvait être la cause de ses troubles du sommeil. Le Maître de Chapelle ne se sentait plus en sécurité dans sa propre demeure, mais ne pouvait rien faire pour ôter ce sentiment d'inconfort. Il avait tenté de dormir avec Dante pour calmer sa nouvelle peur de la solitude mais cela n'avait strictement rien changé. Enfin si : Son état avait empiré, car son domestique était comme une figure fraternelle pour lui et chaque nuit, ses cauchemars concernaient la trahison familiale que son subconscient prenait un malin plaisir à déformer. Seule une personne pouvait calmer ses craintes, apaiser son esprit mais l'Italien n'osait pas le déranger, se contentant de subir les conséquences de ses troubles. Heureusement, aucune crise de terreur nocturne ne le faisait se mutiler et aucune hallucination due à ses paralysies du sommeil ne lui montrait son père essayant de le tuer, le gardant en bon état physique. Son moral en prenait un coup chaque nuit et ses domestiques se demandaient comment faisait-il pour rester debout après toutes ces difficultés.

L'automne s'était installé sur Vienne, un vent froid faisait danser les feuilles mortes qui jonchaient les pavés des rues pendant que le compositeur prenait la direction de la maison de Wolfgang, emmitouflé dans l'une de ses plus lourdes vestes. Il frappa à la porte et attendit que le blond vienne lui ouvrir. Celui-ci se fit désirer et tira la plaque de bois avant de l'attraper par le bras, le collant contre lui pour lui dérober un baiser. Levant les yeux au ciel, le brun referma la porte en s'adossant à un mur.

« Tu es retard. Commenta-t-il en lâchant un soupir

-Désolé, désolé ! Je terminais simplement d'écrire une lettre à mon père.

-Vous vous êtes encore disputés ?

-Non, pas du tout ! Il veut juste marier Nannerl contre son gré, j'essaye donc de défendre un minimum ma sœur.

-C'est bien quelque chose de bonne famille les mariages arrangés...

-Que veux-tu, on ne changera pas les traditions !

-Non, en effet. Hâtons-nous, nous allons finir en retard.

-Tu es sûr de vouloir aller travailler ? Tu ne veux pas rester ici avec moi ?

-Ce n'est pas ton jour de repos, que je sache. Le mien est demain, mais j'irai de toute façon au palais.

-Pourquoi tu ne restes pas chez toi ?

-Plus loin je suis de ma maison, mieux je me porte.

-Tu devrais demander des congés, tu as l'air extenué. Peut-être que passer du temps loin de Vienne t'aidera à te sentir mieux.

-Et où veux-tu que j'aille ? En Italie ? J'y ai déjà passé deux mois en début d'année, ça m'a largement suffi !

-Pourquoi tu t'énerves ? Tu es plus à fleur de peau qu'à la normale, tu vas finir par m'inquiéter.

-Ce n'est rien. Ça passera.

-Antonio, qu'est-ce qui ne va pas ? Tu sais que tu peux me parler de tout ce qui te passe par la tête.

-Je te dis que ce n'est rien ! Allons-y.

-Antonio... »

Le blond resta planté dans le salon comme un idiot, les bras ballant, fixant son amant sans comprendre. Celui-ci avait l'air fatigué et plus énervé que d'habitude. Wolfgang s'approcha doucement et posa une main sur son bras, les sourcils tristement froncés.

MaestroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant