Chapitre XXI

401 22 168
                                    

Enfin, ils décidèrent de se regarder un court instant avant que l’Italien ne pose sa tête dans le cou de Mozart, fermant les yeux en soufflant doucement sur sa peau. Le compositeur germanique reprit alors ses caresses dans ses cheveux avant de les dériver un peu plus bas, sur son dos, puis sur le bas de son dos, glissant sa main sous son vêtement. Plusieurs frissons traversèrent le corps de l’homme qui se raidit un peu à l’idée que les caresses dégénèrent en quelque chose de plus osé. Le sentant quelque peu réticent, le cadet vint mordiller son oreille, lui murmurant de se laisser aller. Le plus vieux secoua légèrement la tête, refusant de céder à la tentation, anxieux quant à l’idée d’être surpris en train de faire l’amour avec un homme.

« Antonio...laisse-toi faire..c’est promis, je ne te ferai pas de mal...

-La question n’est pas là, Wolfgang... J’ai juste peur..qu’on nous voie...et qui sait ce qui peut nous arriver après...Je te promets que dès qu’on sera à Vienne, je me laisserai faire mais pas maintenant... Excuse-moi si je te frustre...

-Non, je comprends... C’est juste qu’avant..j’étais habitué à faire ça presque quotidiennement alors...je...ça me manque un peu tu vois...

-Hmhm... Désolé de te contraindre alors.. » Souffla-t-il avec une pointe d’amertume

Le brun se laissa choir sur le côté, s’allongeant un peu plus loin, dos à son indécent compagnon. Ce dernier se redressa et le fixa tristement mais n’osa pas parler davantage, se contentant de lui tourner le dos à son tour, les yeux rivés sur la fenêtre alors que ses doigts dessinaient des cercles sur les draps. Aucun mot ne franchit la barrière de leurs lèvres, alors qu’un certain malaise s’installait entre eux. Antonio avait conscience qu’il frustrait son amant mais la peur lui nouait l’estomac et l’empêchait de se laisser aller aux différents plaisirs que pouvait lui offrir Wolfgang, si toutefois ce dernier ne le faisait pas souffrir davantage.

Une heure s’écoula sans qu’aucun des deux maestros n’ait daigné parler. Les ronflements légers de l’Autrichien avait fini par retentir dans la pièce, signe de la somnolence du jeune homme. Un domestique le tira bientôt de son début de sommeil, frappant à la porte. Le Vénète se leva et partit lui ouvrir, conversant rapidement avec lui avant d’hocher la tête et d’aller réveiller Wolfgang, lui annonçant que le repas était prêt. Les amants sortirent de la chambre et rejoignirent les marquis et leurs filles qui étaient déjà installés à la table dressée par les serviteurs. Ils se mirent un peu à l’écart, s’éloignant volontairement l’un de l’autre pour ne pas engendrer de conflit. Le diner se déroula dans un silence pesant, seuls les bruits de l’argenterie contre les assiettes venant apporter un peu de vie au triste tableau. Les amants ne se regardaient même pas, tous deux gênés par leur discussion précédente. Les marquis, quant à eux, n’avaient rien à dire et les deux petites filles semblaient fatiguées. Ce fut dans un silence de mort que chacun quitta la table pour regagner sa chambre. Le brun se glissa presque immédiatement sous les draps, fermant les yeux pour s’endormir.

Antonio dormit très mal cette nuit-là, rongé par la culpabilité et un sentiment d’insécurité permanent. L’Italie ne lui avait jamais semblé aussi fourbe, aussi inhospitalière alors que la majeure partie des personnes qu’il avait rencontrées l’avaient correctement accueilli. Il avait un mauvais pressentiment, comme s’il ne devait pas être ici, à Venise. Cette impression était complètement infondée, puisqu’il passait du bon temps dans cette ville, que tout allait bien. Pourtant, quelque chose clochait et l’Italien n’arrivait pas à savoir quoi. Il sortit du lit en soupirant et partit dans la salle d’eau adjacente pour se laver, et accessoirement se rafraichir, ne revenant dans la chambre qu’une quinzaine de minutes plus tard. Comme il le faisait de nombreuses fois, il ouvrit doucement les rideaux et les fenêtres avant de s’assoir sur le rebord de celles-ci, perdant son regard dans les étoiles. Au loin, il aperçut plusieurs nuages d’orage, le tonnerre grondant doucement au loin. Nul doute que la journée serait aussi tumultueuse que l’eau des canaux après le passage de la pluie. Un vent frais entra dans la chambre et fit frémir le blondinet endormi qui s’enfouit un peu plus sous les couvertures en grommelant. Son amant ne lui jeta pas un regard, ses yeux restant fixés sur l’amas de nuages surplombant une partie de la capitale de la Vénétie. Un long soupir s’échappa de ses lèvres alors qu’il retournait dans la chambre, fermant ce qu’il avait ouvert au préalable avant de retourner s’installer dans le lit, sans pour autant trouver le sommeil. Il se sentait comme perdu et en proie à plusieurs troubles, plusieurs questions trottaient dans sa tête.

MaestroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant