Le lendemain, Antonio ouvrit péniblement les yeux, agressé par le froid mordant de la demeure, le feu s'étant éteint durant la nuit. Il se leva en soupirant longuement. Il se dirigea vers sa salle d'eau et parut surpris de constater que ses domestiques commençaient déjà à travailler. En effet, deux d'entre eux préparaient la bassine d'eau chaude du maître de maison pendant qu'un autre s'occupait du petit déjeuner, au rez de chaussée. Le compositeur les fit sortir de sa salle de bain. Une fois seul, il osa tourner la tête vers le miroir et y vit un homme aux cheveux ébouriffés, emmêlés, dont le maquillage noir assombrissait le visage, la pâleur de ce dernier devenait inquiétante. Salieri n'avait jamais été quelqu'un de très joyeux mais là, il se reconnaissait à peine dans cette tristesse et cette négligence. Un soupir lui échappa alors qu'il commençait à se déshabiller, après quoi il se glissa dans la bassine de bois. Antonio saisit le savon et commença à se laver, les yeux perdus dans le vide. Il resta dans l'eau chaude un petit moment, jusqu'à ce que Dante frappe à la porte et lui apporte ses vêtements.
« Monsieur ? Votre ami, Monsieur Alarich, est arrivé. Il vous attend dans le salon. »
Pour toute réponse, le brun hocha doucement la tête et attrapa sa serviette pendue non loin de lui avant de se sécher en sortant après que son serviteur soit parti. Il s'ébouriffa les cheveux avec le tissu puis remit correctement sa mèche en place, démêlant ses fins cheveux bruns. Il s'habilla, laissant une partie de sa chemise ouverte, enfila son veston et descendit rejoindre son ami. Le compositeur fit signe à ses domestiques de leur amener de quoi grignoter un peu pendant que le plus vieux s'installait au piano, suivi d'Alarich. C'était un beau jeune homme, un petit blond aux yeux verts, âgé de tout juste seize ans, un virtuose du violon. Antonio, étant un peu touche à tout, s'était proposé d'être son professeur. Habituellement, la communication était plutôt simple, malgré le mutisme du garçon mais cette fois, ils étaient deux à ne pouvoir parler. Surpris de ne pas entendre son ami, le cadet lui tapota doucement l'épaule, la tête inclinée sur le côté. Salieri lui montra sa gorge et le blond hocha doucement la tête avant de prendre le violon posé à côté du piano, commençant à jouer. Son professeur l'écouta avec attention, souriant très légèrement en constatant les rapides progrès de l'élève, se joignant à lui avec son clavier. Il releva quelques fautes et fausses notes du cadet pour les lui indiquer après, le surveillant tout de même du coin de l'œil. Le duo continua un long moment et fut interrompu par un domestique qui posa un plateau sur la table basse. Sentant une bonne odeur de thé, Alarich ouvrit immédiatement les yeux et reposa le violon pour boire et manger un peu. Son mentor ne tarda pas à le rejoindre, riant intérieurement de la bouille enfantine du violoniste. Salieri saisit deux tasses de porcelaine qu'il remplit avant d'en tendre une à son cadet qui avait la bouche pleine de petits gâteaux. Il termina de manger ce qu'il avait et prit la tasse avant de souffler dessus. Antonio en fit de même et donna un sucre à son ami. Il fixa le vide, ses pensées se tournant de nouveau vers le fiasco de la veille. Ses yeux se voilèrent de tristesse alors qu'il serrait le récipient dans sa main. Celle-ci exerça une pression si forte que la porcelaine se brisa, blessant le compositeur. Le liquide lui brûla la main, le faisant sursauter. Alarich écarquilla les yeux devant ce spectacle et courut chercher Dante qui changeait les draps de la chambre du maître des lieux. Il s'agita devant le domestique et le tira jusqu'au salon où Antonio fixait sa main et la plaie d'où le sang s'échappait. Cette vision ne le gêna pas, au contraire il semblait fasciné par le liquide rouge qui coulait de sa paume écarlate. Dante poussa un cri de surprise en voyant le brun dans un tel état et courut chercher de quoi le soigner, demandant à deux autres hommes de nettoyer ce carnage. Il apporta de l'eau froide et des bandages, nettoyant d'abord la plaie avant de la bander. Sachant très bien que le brun ne le prendrait pas mal, il lui donna une claque derrière le crâne.
« Monsieur, c'est stupide de votre part d'avoir fait cela ! Éclater votre tasse ne vous fera pas recouvrer votre voix alors par pitié, ne refaites plus jamais cela ! »

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Maestro
FanfictionAntonio Salieri, compositeur officiel de la Cour de Vienne, a des journées bien mornes et chargées. Tentant de s'éloigner de cet énergumène, il finit néanmoins par s'en rapprocher. Malheureusement, l'époque de cette histoire ne leur permettait pas...