Chapitre VIII

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Le Maître de Chapelle travailla des heures et des heures sur le duo, réarrangeant parfois la hauteur de certaines notes pour plus de facilité. Vers treize heures, un homme frappa à la porte pour annoncer le déjeuner mais le musicien le congédia, lui disant qu'ils n'avaient pas besoin de manger. Le serviteur s'en alla donc, laissant le maestro et l'endormi tranquille. Soupirant, Salieri se reconcentra sur ce qu'il faisait, corrigeant quelques fautes dans les paroles, ajustant de nouveau les notes pour amener le tout à un semblant de perfection. Grognant devant un accord particulièrement disharmonique qu'il avait écrit, le brun lâcha sa plume avant de s'étirer. Il devait absolument tester cet accord avec un instrument, peu importe lequel pour savoir comment le rendre plus audible. Un Ré, un Si et un Fa... Mais il n'avait ni violon ni piano à sa portée et devait changer de pièce s'il voulait le jouer. L'Italien se leva avec sa partition et se dirigea vers le salon où il avait vu un piano auquel il ne tarda pas à s'installer. Il commença à jouer cet accord parfaitement ignoble, cherchant à changer le Fa en quelque chose d'un peu mieux. Il tenta d'abord le Do, puis le Mi avant de s'orienter sur un Sol bémol. Arquant un sourcil, il rejoua plusieurs fois l'accord avant de sourire très légèrement. Il l'avait enfin, son accord mélodieux. Antonio laissa l'instrument en paix pour retourner à la chambre et corrigea sa partition. Vérifiant chaque note et chaque accord, le maestro passa encore du temps à corriger quelques détails, harmonisant le tout. Lorsqu'il tira les rideaux pour réveiller Wolfgang, il constata que la nuit commençait à s'installer sur Postdam, l'horizon se teintant de pourpre et de bleu nuit. Le compositeur réveilla doucement son comparse, le secouant légèrement. Un grognement lui répondit puis l'Autrichien se décida à ouvrir les yeux, ayant pour sublime image au réveil le visage de son ami souriant doucement. Un sourire empreint de fierté. Le plus jeune se redressa et s'étira longuement, baillant. Il avait apparemment bien dormi.

« C'est la première fois que je te vois sourire autant, que se passe-t-il ?

-J'ai fini le duo. Tu peux regarder les partitions, j'ai modifié plusieurs accords et des lignes entières mais pas ce que tu as écrit si cela te rassure.

-Tu as...tout fini ?! Déjà ?! Mais il est quelle heure ??

-Le soleil vient tout juste de se coucher, il doit être environ vingt heures.

-Et nous avons commencé à.. ?

-Presque dix heures, je pense.

-Tu as planché pendant dix heures et tu as fini ?! Mais comment fais-tu ??

-Eh, calme-toi. Ce n'est pas un opéra, ni une symphonie. C'est un simple duo, ce n'est pas très long. Et puis, je ne suis pas si doué que cela pour composer rapidement. Regarde, ma symphonie, je la travaille depuis six ans et elle n'est toujours pas achevée.

-Tu es bien trop modeste ! Allons fêter notre première collaboration !

-Collaboration ou non, nous devions déjà manger dehors de toute façon. Sors du lit maintenant. »

Mozart fit la moue et sortit du lit, se dirigeant vers l'armoire qu'ils allaient partager durant encore deux jours. Il fouilla dans les vestes et en sortit une appartenant à son comparse. C'était une lourde et épaisse veste en velours noir mais pailletée. Il se tourna vers le propriétaire du vêtement avec un grand sourire. Comprenant la tacite question, Antonio roula des yeux et lui fit un signe de main signifiant qu'il pouvait la prendre. Lui se saisit d'une autre longue veste, en coton cette fois mais de la même couleur. L'Autrichien voulut sortir mais fut arrêté par son ami qui l'attrapa par le poignet en secouant la tête.

« Je veux bien te prêter ma veste mais change de veston.

-Pourquoi ?

-Du violet pastel avec ma veste noire ? Hors de question.

MaestroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant