Chapitre 20

99 12 4
                                    

Je marche dans une forêt sombre avec pour seule lumière, celle de la lune déjà haute dans le ciel. Mes pieds nus foulent la terre humide. Je cours sans savoir pourquoi, j'erre sans but entre les arbres. Tout se ressemble, tout est effrayant. Il n'y a aucun bruit à part celui de mes pas. La forêt semble se refermer sur moi, les arbres essayant de m'attraper avec leurs branches, me blessant au visage.

Mon cœur bat la chamade, j'ai peur. Je ne sais pas pourquoi je suis effrayée mais je cours comme si ma vie en dépendait. Je fuis. Je ne sais pas qui ni quoi je fuis mais je le fais. Mes cheveux détachés volent avec le vent qui vient fouetter mon visage. Ma respiration est saccadée, créant un nuage de buée.

Plus je m'enfonce dans la forêt, plus les arbres sont nombreux et plus il fait sombre. Je place mes mains devant mon visage pour me protéger des branches qui viennent écorcher mes bras et déchirer la robe blanche que je porte. Mes blessures ne guérissent pas, ce que je ne comprends pas, et mon sang chaud coule sur ma peau et vient s'écraser sur la terre froide.

J'accélère de plus en plus, comme si la chose qui me suivait se rapprochait. Je n'entends plus que les battements de mon cœur et ma respiration. L'air se fait de plus en plus rare dans mes poumons. Quelques mèches de cheveux viennent se coller sur mon visage à cause de la sueur. Je ne sais pas pourquoi je cours mais si je m'arrête, cette Chose va me rattraper. Je ne sais pas qui Elle est, ni ce qu'Elle me veut, mais Elle ne doit pas m'attraper.

Sois courageuse ma fille, tu es bien plus forte que n'importe qui. Cette voix résonne dans ma tête. À qui elle appartient ? Je n'en ai aucune idée. Mais elle est là, m'apportant du courage. Si jamais tu essaie de tout gâcher, je te ferai enfermer ici jusqu'à ton dernier jour ! Cette autre voix, féminine, vient se superposer à la première. J'ai soudainement envie de pleurer, pleurer de rage. Pars avec moi, je t'en supplie. Partons loin d'ici, je te promets de te rendre heureuse. Le désespoir m'envahit, accompagné d'une infinie tristesse. Tu es mienne et je suis tien. Mon cœur s'embaume, se gonfle. De l'affection, voilà ce que me fait ressentir cette voix. Tu m'appartiens toujours RF192, ne l'oublies pas ! La peur prend le dessus, infiniment plus intense. Je me mets à hurler à plein poumons, plaquant mes mains sur mes oreilles sans cesser der courir, essayant de faire taire toutes ces voix qui ne veulent quitter ma tête. Ce sont des fantômes, rien que des fantômes.

J'arrive soudainement à un ravin qui m'oblige à m'arrêter. Je cherche une option pour m'enfuir mais Elle se rapproche de plus en plus. Je ne peux pas rebrousser chemin au risque de lui faire face. Je regarde alors de l'autre côté de la rive et j'y vois un magnifique cerf blanc avec des bois immenses. Il me regarde. Je le regarde. Plus je l'observe et plus il se met à étinceler. Il tourne alors la tête et regarde par-dessus mon épaule avant de partir en courant. Elle est là.

J'ose alors de ma dernière option et je saute dans le ravin. Je me retrouve en chute libre durant de longues secondes qui me paraissent être des heures. J'ai envie de crier mais je n'y arrive pas. C'est comme si quelque chose me tenait la gorge et m'empêchait d'émettre le moindre son. Des doigts semblent se refermer sur ma gorge, ma coupant la respiration. Ils se referment de plus en plus mais n'ont pas de propriétaire, seulement une voix qui vient s'ajouter aux autres. Tu as tout gâché !

Ma chute se termine avec un atterrissage dans une eau gelée. Mes mains se mettent à battre le fond, soulevant un nuage de vase qui vient m'aveugler. L'étau qui oppresse ma poitrine se resserre lentement. Je me mets à griffer l'eau, à ruer, me démenant dans tous les sens, mes poumons me hurlant leur besoin d'air. Je me débats pour tenter de revenir à la surface mais, avant que je ne l'atteigne, quelque chose me prend le pied et me tire vers le fond. Non. Elle a sauté. Elle m'a attrapé.

RF192Où les histoires vivent. Découvrez maintenant