Chapitre 10

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Cette journée, qui avait mal commencé, fut monotone, pour ne pas changer. Une fois retournée dans ma chambre, je suis restée dans mon lit jusqu'à la sortie. J'ai continué à pleurer jusqu'à ce que plus aucune larme ne veuille couler. Je suis alors restée au lit, sans bouger, à regarder le vide. J'ai refusé de manger, je n'avais pas faim. Étonnamment, les employés n'ont rien dit, ils ont repris les plateaux et les dossiers du mariage pour les rendre à ma mère.

Je me suis sentie vidée de toute force et je n'avais envie de rien faire. Je crois même que je n'ai pas changé de position de toute la journée, trop épuisée pour le faire. À un moment, mes yeux ont cherché à se fermer mais, quand j'ai essayé de dormir, c'est le rêve de l'autre nuit qui m'est revenu. Des nouveaux passages s'y sont ajoutés, me montrant tous Ulysse qui me faisait subir les pires horreurs en riant à gorge déployée. Son rire me hante, autant que son affreux sourire et ses yeux illuminés de cette lueur malsaine.

Je me répète sans cesse qu'épouser Jacen est la meilleure option qui s'offre à moi. Tout ce que désir Ulysse c'est posséder à lui seul mes capacités, il ne cherche que le pouvoir. Et je tente de toutes mes forces de me convaincre que mon fiancé n'est pas comme lui. Pourquoi le serait-il ? Je suis certaine qu'il ne me fera aucun mal. Mais une partie de moi me hurle que ce ne sera pas le cas et qu'absolument tout le monde désir la même chose de moi. Si c'est le cas, je ne suis en sécurité nulle part. alors je dois fuir, loin, très loin, dans un autre pays. Peu m'importe si le reste du monde est totalement détruit et radioactif, je guérirais.

Quand l'heure de ma sortie est arrivée, l'employée est venue me chercher et a attendu que je me lève sur le seuil de la porte. Je n'avais pas envie de sortir mais je me suis dit que ça me ferait sans doute du bien de prendre l'air, alors j'y suis allée. Je devais avoir une tête d'enterrement avec mes yeux rougis et mes cernes, mais personne n'a réellement relevé, même si certains patients me regardaient étrangement. FF274 a même pensé que j'allais devenir comme TF213, je l'ai lu dans sa tête. Et à la seconde où cette idée lui a traversé l'esprit, elle s'est éloignée de moi, par précautions. Peut-être que c'est vrai. Ulysse cherche sans doute à me rendre complètement folle pour donner une raison de me descendre.

Je suis allée dans les jardins, comme à mon habitude et je me suis assise sur un banc. Notre banc. J'étais toute seule et mon regard s'est perdu dans le vide. Adrian aurait pu être à côté de moi et nous aurions pu discuter ensemble, et même rire. Mais non, je suis toute seule sur ce banc, avec ma conscience et ma solitude, alors qu'il doit être en train de se faire torturer. C'est de ma faute, je suis la pire des amies.

Mais je me suis rapidement habituée à être en tête à tête avec la solitude, et tous les fantômes qu'elle apporte avec elle. C'est la seule qui me tient compagnie à longueur de journée sans rien dire, sans me juger ou me punir. Elle se contente d'être là, avec moi, faisant seulement son travail. Je ne lui ai jamais vraiment donné de nom, pourtant, depuis toutes ces années où elle m'accompagne, j'aurai dû le faire.

La demi-heure s'est écoulée tellement vite, je n'ai pas vu le temps passer. L'employée vient me dire doucement qu'il faut rentrer. C'est la première à me montrer un peu de compassion en dix-huit ans, il faut un début à tout je suppose. Je me lève machinalement et effectue le même circuit que d'habitude. Je passe de longues minutes sous la douche à ne rien faire ou penser, je reste simplement immobile, le regard fixé sur quelque chose qui n'existe pas. Je me suis mise à suivre le chemin d'une goutte et quand elle s'écrase sur le sol carrelé, j'en choisi une autre et fait la même chose. Parfois, deux se font la course et je parie sur celle qui s'écrasera en premier. Je gagne presque à chaque fois.

J'ai juste envie que tout ceci s'arrête, être loin de ce Centre qui ne m'a apporté que du malheur. C'est l'enfer sur Terre. Mais je sais que, même si part le plus loin possible, ils continueront à me suivre et à me faire passer ces foutus tests, mariée ou non, Ulysse me l'a promis. Vous ne serez jamais tranquille, et vous mourrez en servant le gouvernement.

RF192Où les histoires vivent. Découvrez maintenant