Souffrance et doutes

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Audrey

                   Presque deux mois sont passés depuis mon arrivée en France. Mes parents sont venus me chercher en catastrophe, car dans mon dernier moment de lucidité, j'ai eu la bêtise de les appeler. Dans un sens, c'est ironique. Je suis partie pour devenir mature et indépendante mais c'est l'inverse qui s'est produit. Je voulais savoir... Peut-être que le personnel hospitalier aurait des informations à me donner, après mon accouchement... J'étais désespérée. L'infirmière m'a annoncé avec regret que mes bébés étaient décédés. Mort subite du nourrisson. Je crois que ce sont ces derniers mots qui m'ont achevé. Depuis que j'ai raccroché à la gare, mon esprit s'est vidé. Aucun mot ne sortait de ma bouche tout au long du trajet.J'étais incapable de dire ce qui s'est passé. Mon cœur rempli de douleur, voulait arrêter de battre. Ou plutôt, chaque battement devenait insupportable. Je voulais disparaitre... Ce monde est tellement pourri... Arrivée à la maison, je suis montée dans ma chambre. Ma démarche de zombie n'a pas alerté Granny. En fait, jem'en fichais de ce qu'elle disait ou pensait. Allongée sur mon lit, je me suis roulée en boule, pleurant toutes les larmes de mon corps. Hurlant de douleur, je ne la supportais plus.


                    Mes journées se ressemblent. Pour moi, plus rien n'a d'importance. Notre médecin de famille a diagnostiqué une dépression, il me prescrit des médicaments... Daniel a dû lui parler de ce qui s'est passé.Avant que le docteur n'arrive, mon frère a essayé de discuter avec moi. Je lui ai raconté tout ce que je savais et lui ai dit de me ficher la paix. Il a été la dernière personne à qui j'ai adressé la parole. Après ça, plus aucun mot n'est sorti de ma bouche. Je n'ai pas quitté mon lit, durant plusieurs semaines. Les mêmes pensées tournaient dans ma tête. La cruelle vérité :je suis au chômage, expulsée d'un pays que je considérais comme ma deuxième maison, le potentiel père de mes enfants m'a quitté en me traitant comme un chien et mes bébés sont morts. Je ne peux plus manger, ni boire tellement je me sens mal. La moindre nourriture que j'ingère, finit dans les WC après un bref passage dans mon estomac. Le stress et les cauchemars sont mon quotidien. Au bout d'un moment, j'ai la vague impression que mon pyjama est devenu trop grand. Bah ! Quelle importance. Tiens... J'ai soif. Et la salle de bain est de l'autre côté du couloir. Mais j'ai tellement soif que je me lève quand même. C'est bizarre, l'espace semble difforme... J'ai du mal à tenir debout. J'essaie de me rattraper avec la barrière de l'escalier. Cependant, elle m'échappe des mains et je tombe tout en me cognant la tête contre le bois. Ma chute n'est pas amortie par la moquette rose et j'entends le bruit de mon crâne heurtant le sol. C'est la dernière chose dont je me souviens avant que les ténèbres m'engloutissent.


Daniel

                    Grand-mère se plaint encore une fois que ma sœur ne descende pas pour être avec elle et lui tenir compagnie. Rien d'étonnant. D'abord, ma grand-mère n'est pas quelqu'un de très agréable. Même avec moi, surtout depuis mon mariage. Seulement, je suis la seule personne disponible aujourd'hui.Maman, en tant que nourrice, est partie emmener les enfants qu'elle garde au parc et papa enseigne la physique chimie à des lycéens. J'ai pris un congé supplémentaire pour voir Audrey. Ma pauvre petite sœur n'est plus que l'ombre d'elle-même. Nous avons tout essayé mais rien à faire. Elle refuse de s'alimenter, manque de sommeil et est en état quasi permanent de stress. Peut-être que c'était une mauvaise idée qu'elle aille aux États-Unis. Non en fait, le mauvais plan était qu'elle revoit cette famille de riche complètement tordus ! Combien de fois elle a pleuré à cause de Nathaniel et de Samuel Summers ? Ma sœur a eu du mal à reprendre sa vie en main a été à deux doigts de la dépression...Pour en revenir à ma grand-mère, elle dit qu'Audrey fait de la comédie et qu'elle n'est pas malade. Bestemor ne l'a pas vue depuis qu'elle est rentrée. Si elle voyait son état, elle verrait bien que ma petite sœur est dans un sale état. Quand je suis monté dans sa chambre et que j'ai vu qu'elle avait beaucoup maigri...Ça m'a fait mal au cœur. Certes, elle n'a jamais été obèse mais ses formes ne sont plus ce qu'elles étaient. La graisse a diminué ainsi que ses muscles, on dirait presque une rescapée des camps de concentrations. Ses traits sont tirés, ses joues creusées... Mais comment faire pour l'aider ?

[Lemon] Surprise, Baby !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant