MAYA

Chapitre 5: Défendre les autres a des conséquences

Je me trouve en face de ce bâtiment que je déteste tant, j'essaie de trouver la force de faire les pas qui me conduiront tout droit à ma tombe. Serait-ce vraiment une mauvaise chose après tout ?

Je lève mon pied et commence à faire un pas en avant.

« Ne reviens plus à l'école sinon tu le regretteras. »

Je m'arrête. Leurs messages ne me quittent pas, ils continuent de se répéter sans cesse dans ma tête, encore et encore, sans jamais s'arrêter.

—Soit forte, me murmurai-je.

J'essaie de me conforter comme je le peux. J'essaie de surmonter ça. Seule, mais au moins j'essaie. Alors, dans un élan de courage, je lève mon autre pied.

« Je vais te violer à l'école tu vas voir. »

Mon pied, tremblant, s'arrête dans son élan. Je ne peux pas, je ne peux pas et je ne peux pas ! Mes mains commencent aussi à trembler, tout comme le reste de mon corps.

« Si j'étais toi, je me jetterai du haut d'un pont. »

Mon cœur s'affole, ma tête se met à tourner, tout mon corps grelotte, mes mains sont moites, les larmes me montent aux yeux. Ma respiration est saccadée, j'ai la nausée et l'impression que mes jambes vont me laisser tomber alors que tout se met à tourner autour de moi.

Je fais une crise.

Certains voient mon état et se moquent, d'autres sortent leurs portables pour filmer et m'humilier. Je ne peux pas les laisser avoir ce pouvoir sur moi...

Je ferme doucement les yeux et je prends une grande inspiration puis essaie d'expirer calmement.

Plongée dans le noir, j'essaie de me remémorer de bons moments, mais je suis tellement rongée par le reste que je n'y arrive pas.

Je recommence plusieurs fois l'exercice de respiration jusqu'à ce que la sonnerie de début des cours sonne et m'interrompe. Je mets ma capuche et entre dans l'établissement.

Je suis étonnée et fière de ce qu'il vient de se passer. Au fond je ne suis peut-être pas aussi faible que ça. J'endure ça depuis un temps fou et je suis toujours là. Honnêtement je mérite une médaille...

Je me rends à mon casier discrètement. D'accord je ne suis pas aussi faible que ça mais je ne suis pas suicidaire. Quoi que... Dans tous les cas, si je dois mourir ce ne sera pas tuée par eux.

Soudain, je sens une main claquer mes fesses. Je rêve ? Je me retourne immédiatement mais personne n'est là. Évidemment ! Rien d'étonnant, il n'y a personne pour assumer ses actes ici.

Je redoute le moment où il me fera payer ce que je lui ai lancé en plein visage.

Je ne peux quand même pas rester dans la peur toute ma vie...

Il ne tombe jamais malade ? Il ne rate jamais l'école pour mon plus grand malheur. C'est à croire qu'il est immunisé contre toute sorte de maladie. Pas étonnant, lui-même en est une, il est ma maladie... Celle qui me consume à petit feu et qui me mènera tout droit à ma perte.

J'étais en train de marcher en cherchant du regard ce diable pour l'éviter quand je vois un ami à lui. C'est celui qui l'a arrêté la fois où il m'a étranglée.

Peut-être qu'il a un bon fond, lui.
Il avait agi.
Il m'a défendue d'une certaine manière. Il a empêché son ami de me tuer, il n'est pas resté après, on ne m'a pas aidé par la suite mais il m'a peut-être bien sauvé la vie.

Ça n'excuse pas toute les fois où il m'a violenté. C'était toujours devant ses amis, devant lui. Les autres eux n'ont aucun scrupule de me blesser même quand ils sont seul.

Devrai-je le remercier ? Je le regarde et j'aperçois en fait qu'il a un œil au beurre noir. Tiens, c'est bizarre.
Se fait-il violenter chez lui ? Peut-être avons-nous plus en commun que je le pensais.

Mais qu'est-ce que je raconte ?! J'ai faux sur toute la ligne, c'est lui qui a fait ça. Mais oui, pourquoi je ne l'ai pas deviné directement !
Ça ne m'étonne pas, finalement. Que ce soit ses amis, des inconnus, peu importe du moment qu'il se défoule. Quel crétin!

Il lui a fait payer le fait de l'avoir interrompu, de lui avoir donner un ordre, de me défendre, de l'avoir poussé, et de ne pas l'avoir suivi dans ses bêtises. Je disais la dernière fois que se défendre a des conséquences mais défendre les autres a aussi des conséquences.

Ses amis seraient-ils contraints de faire ce qu'il  leur demande sous peine d'être punis ?

Il m'a sauvé la vie et on le lui a fait payer ça, c'est horrible... 

J'ai de la peine, je culpabilise. D'une certaine manière c'est à cause de moi tout ça.

Je m'approche prudemment de lui, je voudrais aller m'excuser et en savoir plus... Il me voit arriver mais ne s'arrête pas de marcher pour autant. Je décide donc de l'intercepter.

—Zack...

—Dégage, me coupe-t-il en serrant les dents.

C'était glacial, de quoi me figer sur place. Aussitôt dit, il reprend sa marche, me laissant là, en plan. Je ne comprends pas... Que vient-il de se passer ? Je voulais juste le remercier...

Mais qu'avais-je espéré ? Pourquoi lui aurait été sympa avec moi alors qu'il fait partie du groupe qui fait de ma vie un enfer? Ce n'est pas parce qu'il m'a aidé une fois que maintenant ce sera toujours le cas. Je ne suis vraiment qu'une cruche !

Lorsque je relève le regard, je croise le sien du bout du couloir. D'abord il me lance un regard noir mais après il me sourit avec ce sourire qui me dégoute tant. Il sait que sa vengeance va être une horreur et il en est fière. J'allais me retourner pour fuir mais il me fait coucou de la main. Ce geste me fige. Je ne sais plus bouger ni respirer...

Il vient de déclarer la guerre.