Chapitre trente: Un bal au clair de Lune

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Sorenn ouvrit les yeux. Le monde lui parut étrange, les premiers instants. Il ne gisait plus sur le sol froid du palais, allongé au milieu de l'herbe ponctuée de fleurs d'or. Le son des vagues et l'odeur du sel vinrent à lui presque immédiatement. Lorsqu'il se mit sur ses deux jambes avec une aisance intrigante, les premiers grains de sable chaud caressèrent le bout de ses pieds nus. La mer était toute proche.

Il prit une grande inspiration pour mieux ressentir cette paix environnante. Quel bonheur de se sentir si léger ! Plus aucune douleur ne tentait de l'assaillir. Il porta ses mains à son visage pour replacer une mèche derrière son oreille et découvrit avec stupeur que les étranges symboles qui couvraient son corps n'avaient pas disparu. Ces derniers ressemblaient à ceux qu'il possédait lors de sa transformation sans en être tout à fait identique. Et ils ne brillaient pas. Se trouvaient simplement là, sur sa peau, comme des traces de peinture indélébile.

Cette analyse le conduit à observer ses pieds, ses jambes puis son corps tout entier, enveloppé dans un large tissu immaculé. Ses blessures n'existaient plus. Avaient-elles seulement existé ?

Il secoua la tête, confus. Vivait-il un rêve ou venait-il de s'éveiller d'un cauchemar ? Le monde qui l'entourait lui semblait plus que réel. Il percevait le bruissement des brins de lavande et le bourdonnement des insectes, sentait la légère brise lui caresser les cheveux et l'océan l'appelait à la force son écume. L'envie de rejoindre la mer le tiraillait mais la crainte de l'inconnu le maintenait sur place. Sorenn ignorait où il se trouvait et comment il était arrivé là. Il aurait pu rester à attendre pour toujours si une voix n'était pas venue éclaircir ses rêveries.

— Au mauvais endroit, au mauvais moment, n'est-ce pas ?

L'adolescent se retourna sur-le-champ. Le plus beau des sourires illumina son visage. Sirius se tenait sur une dune voisine, heureux et bien vivant. Sa silhouette ne comportait plus aucune trace du combat. Pas de bleus. Pas de sang. Pas de larmes. Un long manteau blanc remplaçait ses vieux vêtements souillés et, pour la première fois, laissait libres ses bras et ses chevilles.

Le cadet fut surpris de voir que son frère, tout comme lui, possédait de mystérieuses marques des genoux jusqu'au cou, bien plus foncées, qui rappelaient la teinte violette de son pouvoir.

Sorenn se rua vers Sirius pour le serrer dans ses bras de toutes ses forces, mais son geste fut tellement brusque qu'ils dégringolèrent jusqu'en bas de la pente. Ils se relevèrent en riant de bon cœur.

— Si tu savais comme j'ai eu peur...

Alors que l'adolescent tenta de toucher les cheveux du prince, celui-ci se recula, par réflexe. Le visage du cadet se ternit aussitôt.

— C'est un rêve, hein ?

— Que – qu'est-ce que tu racontes, encore ?

Sorenn se crispa, croisa ses bras contre lui comme pour se protéger de son aîné et du monde qui l'entourait. Son regard s'attarda sur son frère duquel émanait une aura aux couleurs étincelantes. Dans ses yeux délivrés du maléfice scintillaient de véritables étoiles.

— Tu es mort, Sirius. C'est impossible. Tu es mort.

— Tu es probablement mort avec moi, alors !

Sirius appuya sur la joue de Sorenn. Ils étaient en chair et en os. Tous les deux. Cela ne pouvait être un rêve. À moins qu'il ne s'agisse du plus agréable des rêves. Le capitaine du Pandora IV continua son petit jeu et finit par le pincer si fort que l'autre le repoussa en grognant.

— Mais ça va pas, non ? Attends, tu vas voir !

Ils commencèrent à se chamailler, se cherchaient mutuellement et se poursuivaient comme deux petits garçons.

PANDORA-IV [Les enfants de Kirisben]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant