Chapitre Dix-Sept: Il paraît qu'une rumeur court...

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Allez, Ya. On devrait rentrer.

La petite quitta Beurk après une ultime caresse et laissa son frère les reconduire à la maison. Malheureusement, leur retour ne se passa pas comme prévu.

— Que faites-vous dehors à une heure pareille, garnement?

Un homme aux cheveux grisés par les ans fit irruption à l'entrée du château. De l'autre côté de la muraille, tous les cherchaient hardiment depuis près d'une heure.

— Votre mère se fait un sang d'encre, petit inconscient!

— Lâchez-moi, Monsieur le précepteur ! Vous me faites mal!

Le vieillard était fou de rage. Tout ce qu'il tentait d'inculquer à son élève lui glissait au-dessus de la tête. Les leçons, l'étiquette et la politesse ; il ne retenait rien. Cette fois, pris la main dans le sac, ce sale marmot allait passer un mauvais quart d'heure.

Il le traîna au travers du jardin par le bras – qu'il manqua de lui arracher jusqu'aux appartements de ses parents. U avait beau crier et se débattre, rien n'y fit. Ya retourna se coucher en pleurant, mais se fit discrète pour ne pas être disputée davantage.

Sa chambre se trouvait à côté de celle de son frère. Elle avait bien essayé de s'endormir pour oublier, mais c'était impossible. Leur père hurlait à en faire trembler les murs, il tournait encore et encore dans la salle en gesticulant comme un forcené.

Il expliqua une vingtaine de fois que l'extérieur était plein de dangers, qu'il ne fallait pas s'y aventurer seul et encore moins en mettant la vie de sa petite sœur en danger. Il grogna qu'il n'était pas n'importe qui, qu'il avait le devoir de se tenir convenablement à l'âge de neuf ans, qu'il ne pouvait fausser compagnie au monde entier sans prévenir personne, ce monde qui, comme il l'avait déjà dit, mais qu'il se répétait, se trouvait hostile pour quelqu'un de son rang, car les êtres mal intentionnés étaient nombreux en ce monde alors qu'ils vivaient en un lieu relativement paisible, et que, en apparence, rien ne pouvait lui nuire, mais un incident est si vite arrivé qu'il valait mieux ne pas prendre le risque de perdre le prince, l'héritier au trône qui, un jour, s'il le méritait, prendrait la place de son père le roi, même si, aujourd'hui, il était certain que l'enfant n'en serait pas tout à fait capable.

Et U écoutait sans un mot, sans se défendre. Il ne pouvait nier les faits. Il avait commis une faute et se sentait prêt à payer pour deux – il n'avait pas d'autre choix, de toute manière.

Ya aurait aimé faire quelque chose pour son frère. Pour une fois, il avait voulu l'aider. Pour une fois, ils s'étaient amusés tous les deux sans que tout ne vire au drame. Sans qu'une dispute éclate ou que l'un d'eux se blesse. Mais non. C'était une malédiction. Ils ne pouvaient être heureux ensemble.

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Midi sonnait au pendule. Entre deux sessions de travail acharné, tous les paliers profitaient d'un temps de repos bien mérité. Sorenn avait un peu de mal à vivre le moment présent, toujours occupé à ressasser ses rêves. Heug et Celkie étaient de corvée de cuisine, Ilam visitait Zora tandis que Sirius et Ayah finissaient encore plus tard que les autres, comme d'habitude. Alors Horace restait seul face à l'androïde sur l'une des grandes tables du réfectoire.

—Dis, Horace... que faisais-tu, avant ?

Le sage posa le livre qu'il feuilletait et laissa retomber sa cuillère dans son bol.

PANDORA-IV [Les enfants de Kirisben]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant