Chapitre XIII

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J'en restai bouche bée.

Un prince de sang. C'était un prince de sang.

J'hésitais entre hurler ou me cacher. J'avais un sérieuse envie de pleurer. Je pense qu'aucun juron n'aurait pu égaler celui qui retentissait à cet instant dans mon esprit. Honteuse -non, j'étais mille fois au-delà de la honte-, je croisai les bras et regardai obstinément ailleurs.

- Vous auriez pu me le dire. Ça m'aurait évité de me ridiculiser.

- Que voulez-vous que je vous dise ? Répliqua le prince -il allait falloir que je m'y fasse. Tout d'abord, j'ignorais que vous ne faisiez pas partie de mon peuple. Et vous, ne pouviez-vous pas me dire que vous aviez grandi chez les Hommes ?

Cette fois-ci, j'en sautai de mon lit, pieds nus sur le sol de pierre. Legolas, surpris de ce mouvement soudain, eut juste le temps de me rattraper par le coude avant que je ne manque de m'écrouler. Je me débattis, le repoussant pour me laisser tomber sur le lit en criant :

- Que vous ont dit mes sœurs ?! Que vous ont-elles dit ?!

- Rien, justement, répondit-il. Vous les avez bien élevées, apparemment.

J'enfouissai mon visage dans mes mains.

- Prince Legolas, croyez-vous que votre père acceptera de m'accorder une audience ? Demandai-je d'une voix blanche.

- Que se passe-t-il ? M'interrogea-t-il.

Dans ma tête, j'établissai un rapide compte-rendu de la situation. Notre cachette avait été éventrée, les assassins de mes parents nous traquaient, les elfes risquaient de découvrir notre identité. Pilier de mes sœurs : moi. Mon support : moi. Alliés : personne.

- Laurelin ?

Chacun avait une façon différente de prononcer mon prénom. Earine le criait, Nessimelle le chantait -quelle coïncidence !-, Maura le disait d'une voix tranchante. Le prince, lui, semblait presque le chuchoter, avec un accent métallique sur la dernière syllabe.

- Je dois veiller à la sécurité de mes sœurs, monseigneur, répondis-je. Je n'ai guère d'autre choix que d'affronter votre père, si vous me permettez l'expression.

Son visage se ferma brusquement, il sembla reculer dans les ombres.

- Bien. Je lui ferais part de votre requête.

Je regrettai immédiatement mes paroles. Moi qui avait espéré que l'elfe se range à nos côtés venais de réduire tout mes espoirs à néant.

- Vos sœurs arrivent.

- Comment le savez-vous ?

Comme il haussait un sourcil, j'entendis au loin des cris.

- Dépêches-toi ! Allez, tu es vraiment lente !

- Et toi, tu vas aussi vite qu'un escargot asthmatique !

Immédiatement, je me redressai et affichai un sourire sur mon visage. Il ne manquerait plus que je craque maintenant.

Mes sœurs déboulèrent dans la pièce, leurs robes humaines tournoyant autour d'elles. Elles se jetèrent sur moi pour me serrer dans leurs bras.

- Fînwë ! S'exclama Nessimelle en manquant de m'étrangler tant elle me serrait fort contre elle.

- Eh ! Je n'ai pas survécu aux araignées pour mourir d'étouffement ! Riai-je.

Ma sœur me relâcha quelque peu, sourit.

- Tu vas bien ?

- Oui. Je suis au summum de la forme !

Elle rit un peu, pour moi, mais je vis qu'elle était soulagée. Du coin de l'œil, je constatai que le prince Legolas avait quitté la pièce. Earine me regarda en froncant les sourcils.

Trois paires d'yeux... BleuesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant