Chapitre 17 : Le combat final (partie 1)

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Je resserre la sangle de mon sac à dos tout en écoutant les dernières recommandations de Kalyel. D'ici quelques minutes nous attaquerons le groupe de rebelle qui nous donne tant de fil à retordre. La camionnette est blindée, les participants s'agitent autours de moi créant un boucan d'enfer. J'essaie de faire abstraction du bruit et de ne penser qu'a ma mission mais toutes ces pensées parasites me disperse. 

Certains chahutent tandis que d'autres gardent un air contrarié, celui qui n'augure rien qui vaille. Kalyel freine brutalement, nous sommes arrivés plus tôt que prévu. Cachés derrière un talus, nous descendons à tour de rôle de la camionnette puis nous faufilons jusqu'à apercevoir le point de rendez-vous des rebelles. Apparemment ils sont occupés ; tous agglutinés autour de celui qui doit être leur chef, curieusement son visage m'est familier ... bien que je sois trop loin pour deviner de qui il s'agit. Les rebelles gobent ses paroles tels des fanatiques idolâtrant leur maître suprême. Nous décidons de nous approcher légèrement afin d'écouter ce qui se dit. 

Des bribes de paroles entrecoupés nous reviennent. Nous en sommes les principaux sujets. Il est question des dérives de notre gouvernement. Pour ne pas changer ils nous accusent de tous les torts, ils insistent sur la nécessité de revenir à l'ancien temps. Celui où l'homme et non pas la nature était au centre des préoccupations. Selon eux, le réchauffement climatique a débuté bien avant l'ère industrielle et l'homme n'est en aucun cas responsable. Je suis outrée, j'ignorais que ces individus étaient climato-sceptiques ... 

Le maître des lieux continue son discours en nous donnant des détails très instructifs sur leur projet d'attaque nucléaire. Je m'approche délicatement afin de lui soutirer des informations sur cet étrange personnage.
- Peux-tu me dire de qui il s'agit ?
Il garde les mâchoires serrées, signe de sa colère tout juste maintenue et réponds :
- Tu le connais très bien, certes il a perdu pas mal de poids mais regarde plus attentivement ! 
Soudain la vérité me saute aux yeux :
- Non ! c'est une blague ? Ça ne peut pas être Yoni ??! 
- En chaire et en os ! 
- Mais comment et pourquoi ? 
-Il est très malin, il a réussi à fausser compagnie à nos forces armées et s'est créé à l'abri de tous
une petite armée de soldats ! 
- Qu'allons nous faire ? 
- Le plan reste le même, je m'occupe de lui, tu restes à couvert .
- Quoi ? Non ! Je veux t'aider .
- Comme convenu, tu fais le guet et tu contre-attaques si quelqu'un essaie de m'atteindre ! 
- Bon c'est d'accord, on y va ? 

- Encore deux petites minutes ! Il faut attendre le moment propice ! 

Je bous littéralement, je saute à pieds joints pour essayer de calmer ma nervosité grandissante .
Soudain il s'exclame :

- On y va ! 
Nous nous faufilons à travers les buissons en faisant le moins de bruit possible. Une jeune femme appartenant au groupe des rebelles semble particulièrement aux aguets. Je la vois jeter des regards circulaires tout autours d'elle, elle tient dans la main ce qui ressemble à un talkie walkie d'occasion bien que ce modèle soit complètement dépassé.

 Soudain son regard se pose sur nous avec insistance bien que nous soyons en grande partie cachés par les feuillages. Inquiète elle fronce les sourcils et s'approche en gambadant. Kalyel me tient fermement la main tout en glissant des ordres à voix basses à mes collègues. Aussitôt fait, la jeune femme est maîtrisée par Lacov. Sans un bruit elle est ligotée, le talkie walkie qu'elle tenait dans la main lui est confisqué, tandis que Adis la dirige en silence vers la camionnette. 

Du côté des rebelles une légère agitation se fait ressentir. Certains chuchotent à voix basse alors que Yoni (dont l'égocentrisme n'a pas d'égal) continue son discours dénué de sens. Nous continuons notre progression jusqu'à la place centrale, quand tout à coup une alarme se déclenche. Les rebelles sont tout de suite à l'affût. C'est le moment, nous nous précipitons à l'unisson tel un seul corps dans la mêlée. Sur leurs visages se lie la consternation. Les femmes pour la plupart frêles et sans défense sont extrêmement faciles à maîtriser. Elles crient et pleurent tout en nous injuriant. Leurs yeux sont injectés de sang, leurs peaux pâles comme la mort, je me demande si elles n'ont pas étaient délibérément droguées.

 En ce qui concerne les hommes c'est une autre histoire, certains sont armés de revolvers, des coups de feu de toute part se font entendre ; comme convenu je me mets à couvert, tout en gardant un oeil sur Kalyel. Ce dernier avance à grands pas vers la place centrale où Yoni lance des ordres à tout-va. Je l'entends ordonner à un homme de se rendre immédiatement dans la centrale pour lancer le code A. Qu'est-ce que le code A ? Je décide de contrer l'ordre de mon bien-aimé et de le suivre. 

Je m'élance à sa poursuite tout en gardant une certaine distance pour ne pas me faire remarquer. Nous nous faufilons dans les bois, l'homme continue sa route d'un pas pressé, nous traversons un cours d'eau puis longeons une rivière sur plusieurs kilomètres. Autours de moi c'est le silence, seul le bruit du vent et les respirations saccagées du soldat brise la tranquillité des lieux. A bout de souffle, je finis par me demander si je n'ai pas été piégée. Soudain se dresse devant moi une ancienne centrale nucléaire bien qu'en très bon état. 

À l'abri de tous, nous n'aurions pas pu la débusquer nous-mêmes. Je me rends compte de l'énormité du projet de Yoni, cette centrale est comme neuve, en parfait état de fonctionnement . Cela doit faire des années qu'il travaille sur sa rénovation. La centrale semble déserte, je me demande comment le code A, quoi que ça puisse être, pourra être appliqué sans main d'œuvre pour soutenir le soldat. Ce dernier se faufile à travers une minuscule porte après avoir tapé un code digital . 

Je retiens la porte juste avant qu'elle ne se ferme et entre à mon tour. Ce que je vois défi l'entendement, une armée de robot humanoïde s'affaire à toutes sortes de tâches. Je reste subjuguer face à la beauté et à la précision de leurs mouvements bien que profondément choquée. Je pensais que tous les robots de cette dimension avaient disparus faute de ressources énergétiques et de matières premières nécessaires à leur création. Je ne peux qu'imaginer la quantité d'énergie nécessaire pour recharger toutes ces machines. Je comprends mieux pourquoi l'électricité nous fait autant défaut dans les villes et les campagnes ...

Une colère sourde s'empare de moi, j'ai l'impression d'avoir été dupé pendant toutes ces années. Je repense à mes concitoyens obligés de vivre dans l'obscurité et la misère tout cela pour permettre à d'autres de s'enrichir. Plus déterminée que jamais je suis de près l'homme qui se dirige dans la salle des commandes.

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