Mon lit m'a paru être un rocher pointu, au sommet du quel il est impossible de trouver une position convenable. La peur de perdre mon Miraculous n'a fait qu'accentuer cette sensation de mal-être. Pire encore, mon cœur s'est lacéré sous les caresses de Tikki qui se voulaient réconfortantes, que je risque de perdre si je ne me montre pas à la hauteur.
– Tu y arriveras, m'assure-t-elle de sa voix mielleuse.
Je recouvre son corps minuscule d'un bout de ma couverture, et ferme les paupières en espérant qu'un sommeil sans rêves m'approvisionnera en force. J'en aurais besoin pour la journée de cours qui s'annonce.
Les vibrations de mon téléphone m'oblige à quitter mes draps qui avaient enfin recouvrés tout leur confort durant mon court sommeil. En récupérant mon téléphone pour éteindre ce bourdonnement incessant, j'aperçois dans l'écran ma mine blafarde, et mon regard souligné par de lourds cernes, de plus en plus noirs avec les nuits qui passent.
Tikki, toujours endormie sur mon oreiller, que je quitte avec une once de regret, agite ses petites pattes, comme si elle tentait de repousser un mauvais cauchemar. Je dépose un baiser attendrissant, qui calme lentement, mais sûrement, les ténèbres de son esprit.
Je m'installe en face de mon miroir, le matériel nécessaire pour masquer ces cercles bistre monstrueux en main. Mes traits se sont affinés durant cette période où rien ne pouvait entrer dans mon estomac hurlant pourtant à la faim. Mon teint maladif pourrait me faire passer pour un vampire.
Je tâtonne du bout de mon pinceau la poudre puis lèche avec ce dernier mes cernes pour leur donner une couleur plus claire, pour me donner l'air plus vivante, plus saine. Il est très surprenant de voir tout ce que peut masquer le maquillage.
Je fais l'effort de brosser mes cheveux ternes, et les laisse toucher mes épaules, afin d'être sûr que personne ne voit mes boucles d'oreilles, aujourd'hui. Par l'intermédiaire d'une terrible et longue réflexion, je songe à Adrien, à tout ce qui est en train de se produire entre nous deux. Je n'arrive pas à m'élever dans les cieux, pour me redéposer sur ce nuage paradisiaque, où mon corps était libéré de toute souffrance, où mon âme n'était qu'un bout de côton, s'envolant au grè des plus somptueuses des pensées qu'un être amoureux puisse avoir. Mais une raison inconnue semble me clouer les pieds sur terre, dans les abysses de la douleur. Ou plutôt, une triste réalité s'impose : je ne peux pas me permettre un tel réconfort, en échange du mal et du danger auquel je risque de l'exposer. Je sens qu'il n'y a pas que cela, mais je n'arrive pas à mettre le doigt sur cette autre chose qui empêche mon cœur de battre aussi passionnément qu'avant pour Adrien.
Mon masque mensonger posé sur ma mine exténuée par mon alter égo et tous les problèmes qui s'y rattachent, je rejoins la cuisine pour y prendre quelque chose à grignoter, et récupérer au passage un baisé attendrissant de mes parents.
Mais une vague épineuse vient s'abattre sur mon cœur recouvert de bleu lorsque je ne découvre qu'un visage morne en entrant dans la salle à manger. La porte d'entrée est grande ouverte, et le verre posé devant ma mère se remplie de ses larmes. Mes jambes flanchent, mon cœur tombe, mon âme implose.
Malgré tout, malgré la terre qui tremble de peur sous mes pieds, malgré la douleur qui compresse chacun de mes muscles, je rejoins ma mère, cette larme aussi tranchante qu'une lame de couteau glissant sur ma peau refroidit par les secondes qui s'écoulent, et la réalité qui se rapproche pour me frapper en pleine poitrine. Le sourire d'une femme disparaît aujourd'hui, un sourire s'efface, encore un. Elle a mal, son regard cri et ses larmes pleurent, pour elle, dont la force de vivre s'échappe de son corps qui se renfrogne sur lui-même, sur tout ce qui lui reste.
– Ma...
Ma voix se brise sous les sanglots qui montent douloureusement. Je voudrais refermer mes bras sur son cou, mais ai bien trop peur de lui faire mal avec mon geste, avec mes larmes, avec tout ce qui émane de moi.
Mais à ma plus grande surprise, c'est elle qui m'enferme dans une étreinte à la fois apaisante, et terriblement affligeante.
– Tout va bien ma chérie, tente-t-elle de me rassurer. Ils... Ton père... Son état s'est aggravé. Ces hommes l'emmènent à Grenoble, pour étudier son cas, et surtout s'assurer qu'il n'est porteur d'aucuns mutagène quelconque.
– Mais... les médecins, ils avaient dit que...
Elle caresse doucement mon visage perlé de larmes, sans jamais cesser de murmurer à mon oreille des mots que je ne comprends pas, alors que des hommes vêtus de blanc transportent mon père dans une sorte de capsule jusqu'à la sortie.
Mon cœur fait de terribles bonds dans ma poitrine, soudainement en proie à une intense frayeur. Je lève fébrilement une main en direction de la porte, qui se ferme derrière mon père, dont j'aperçois le visage au travers de la vitre qui le sépare de nous. Cette terreur qui tenait déjà fermement mon cœur s'accroît, lorsque je me rends compte que le visage dur mais aimable et chaleureux de mon père est affreusement boursouflé, comme celui de ces fichus mutants.
Je m'écroule sous le poids de cette vision, tétanisée par la peur de le perdre, lui aussi. Les barreaux s'enfoncent dans la terre, m'écrasent, me tiennent au piège, sous les épines du danger, de la peur, de la désolation. Le néant s'engouffre dans mon être, s'y attache comme je tente de m'attacher au peu de chose qu'il me reste.
Je voudrais tout briser, ou du moins ce qu'il reste à casser. Je voudrais tout recommencer, revenir en arrière, réussir là où j'ai échoué, à commencer par ce soir où tout a basculé. Je voudrais tellement ne plus avoir peur, ne plus avoir mal, ne plus voir les larmes couler sur les visages de mes proches et de mes amis. Mon cœur est dans la main de celui qui se cache derrière tout cela, et si je ne fais rien, il va exploser, et m'emporter avec lui. La peur est un terrible poison, qui semble être en train de réduire en poussière tout ce qui se trouve en moi.
Je ne sais plus quoi faire, je me sens tellement impuissante face à ce qui me tombe dessus. Tout cela semble être un décret de la "chance" qui me colle si bien à la peau. Je ne comprends pas pourquoi tout cela doit-il m'arriver, pourquoi maintenant ?
Tout aurait dû s'arrêter lorsque la clef a été tournée dans la serrure de la cellule de Gabrielle. Tout allait surtout être plus calme après cela. Quel être peut-il se passer du calme ?
Je m'effondre, le sol n'étant plus qu'un amas de problèmes, devenu instable avec les émotions qui s'entremêlent dans mon esprit perdu. Je ne sais plus quoi faire. J'ai le pressentiment qu'il n'y a plus rien à faire.
– Marinette, fait doucement maman en prenant mon menton entre ses doigts. Par pitié, promets-moi que tu ne sombreras pas encore une fois. J'ai besoin de toi. Si tu sens que les choses vont mal, parle-moi, mais ne retombe pas dans la dépressions, je ne le supporterais pas cette fois-ci.
Je me jette aussitôt à son cou, comme si cela suffirait à me faire pardonner toutes les souffrances que je lui ai causée ces derniers mois. Je suis tellement désolé, voudrais-je lui murmurer. Mais nos sanglots accordés masquent ma voix brisée par nos larmes.
– Je t'aime ma chérie, me confit-elle entre deux pleurs.
– Je t'aime aussi, maman.
Notre étreinte se resserre, nos corps s'ébranlent sous les battements puissants de nos cœurs, et nos cheveux ne forment plus qu'un lien, que même une scie ne pourrait briser. Je ne te laisserais pas tomber, je t'en fais la promesse.
Hey ! Voici pour ce 23ème chapitre ! Devinez quoi ? Il s'agit de mon nombre préféré, mais ce chapitre est loin de l'être... J'espère qu'il vous aura tout de même plu. Merci d'avoir lu jusqu'ici, et bonne continuation !!
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Black - A Miraculous FanFiction [Réécriture]
Fanfiction/!\ risques de spoils /!\ Marinette Dupain-Cheng a seulement treize ans lorsqu'elle découvre Tikki, qui la fera devenir Ladybug, l'héroïne tant appréciée de Paris. Voilà que quatre ans sont passés depuis cette rencontre qui a donné un nouveau tourna...