Je fais les cent pas entre les deux murs qui me retiennent prisonnière dans ce couloir, avec cette monstrueuse frustration qui me dévore à petit feu.
– Je ne comprends pas, Marinette, avoue Nino dans un soupir, son visage dans ses mains. Pourquoi l'avoir laissé seul ?
Mes ongles tombent au sol, se brisent sous mes claquements de dents.– Je... Je ne me sentais pas bien, murmuré-je dans un tremblement.
Je me frappe la tempe brusquement, comme si cela suffirait à faire sortir de ma tête tous ces choix idiots et égoïstes que je ne cesse de prendre. Le jeune homme bondis de sa chaise, les joues rougis par les griffures qu'il s'est infligé sous l'angoisse. Malgré la colère qui bouillonne en lui, il me prend dans ses bras avec une surprenante tendresse.– Marinette, tu es la dernière personne qui lui reste avec son frère, ne le laisse pas tomber une seconde fois.
Il se redresse sans pouvoir me regarder dans les yeux, comme s'il était effrayé par la vue de mes larmes.
– Les cours vont bientôt reprendre, j'y vais. Tu devrais en faire de même.
Il s'éloigne de moi dans les battements réguliers du bruit de ses pas. Il a probablement raison, mais il vaut mieux pour attendre ici, que d'assister à un cours auquel je ne comprendrais rien, l'esprit préoccupé par l'état d'Adrien. L'infirmière nous a assuré que tout irait bien, qu'il s'est juste cogné la tête, mais j'ai besoin de le voir, de lui présenter des excuses.
La porte blanche qui m'empêchait d'assouvir mon besoin s'ouvre enfin, après ces longues minutes d'attente.
– Mademoiselle, soupire l'infirmière, les cours reprennent d'ici quelques minutes, je vous prie donc de quitter l'infirmerie, s'il vous plaît.
– Non.
Je la bouscule sans la moindre hésitation afin de pénétrer dans la chambre où est installé Adrien.
– Mademoiselle Dupain-Cheng !
Elle m'agrippe violemment le bras et me tire vers la sortie, mais une autre main vient m'attraper le poignet. Une main plus douce, plus tendre, qui m'arrache quelques larmes de soulagement. Je m'échappe de l'étreinte de l'infirmière afin de me jeter au coup d'Adrien, soulagée de voir enfin le vert de ses yeux.
– Je suis tellement désolée ! crié-je, comme si j'avais peur que le bruit de mes sanglots ne prenne le dessus sur mes paroles.
– Ce n'est rien, rit-il doucement. Tu étais énervée, ce n'était pas de ta faute. C'est moi qui aurais dû demander de l'aide.
Il sèche mes larmes dans un soupir.
– Tu es bien trop indulgent, m'exaspérè-je en m'écartant de ses plaies.
– Non, je suis compréhensif.
– Et moi je suis l'infirmière, et je t'ordonne de quitter cette pièce sur-le-champ !
Elle m'éloigne de force de lui, qui me sourit, l'air de dire "On se reverra bientôt". Une promesse que je compte bien tenir. Je n'ai pas le droit de le laisser tomber une seconde fois.
***
Les aiguilles semblent avoir ralenti leur course en cette heure de mathématiques. Je fais tourner mon stylo entre mes doigts, sans pouvoir quitter cette pensée qui ne cesse de me tarauder l'esprit. Si seulement ce stylo pouvait avancer le temps. Si seulement le temps pouvait le suivre dans sa course folle entre mes doigts.– Marinette ? murmure une jeune fille à la crinière rose devant moi, t'aurais pas un stylo, s'te plait ?
Sa voix résonne étrangement dans mes entrailles, et ses mots s'enfoncent dans mes plaies, pour empêcher la propagation de mes douleurs, pour former un pansement physiologique dans mon âme. Mes doigts s'agitent dans ma trousse, pour enfin se resserrer sur un stylo noir, que je lui tends fébrilement, secouée violemment par l'attention qu'elle me porte si soudainement.
– Eh cimer ! fait-elle avant de retourner à ses occupations.
– De rien, A... Alix.
L'image de nos derniers souvenirs se morcellent dans mon crâne, et tournent pour défiler à toute vitesse sous mes paupières. Je la revois encore, m'enfiler des rollers aux pieds, et m'entraîner avec elle dans les rues de la ville, un large sourire plaqué sur son visage clair. Je me revois encore, scander son nom alors qu'elle s'apprêtait à relever un autre défi de Kim. Tout cela remonte à si longtemps, que j'ai l'impression d'avoir fait un énorme bond dans le temps. Je me souviens, de ces journées que nous passions à discuter de tout et de rien, sans jamais quitter des yeux Adrien, au cas où il s'approchait de nous. Elle m'a si souvent aidé, et je l'ai si souvent déçue, parce que j'étais trop prise par mon rôle de justicière pour réaliser mes promesses. On s'est éloigné, sans même que je ne m'en rende compte.
Le pansement se déchire, les larmes de sang reprennent leur course folle dans mon âme, sans jamais toucher le sol. Je resserre mon étreinte sur mon stylo, que j'ai cessé de faire tourner entre mes doigts, torturé par les remords. Pourquoi ai-je retenu toutes ces paroles ?
Il y a tellement de choses que j'aimerais dire, que j'aurais aimé dire, plutôt. À présent, ces paroles ne valent plus rien, comme celles que je dois à Chat Noir.La sonnerie résonne enfin, dans mes oreilles poignardées par ces mots que je n'ai jamais su prononcer.
La jeune fille avec qui j'ai partagé tant de choses se retourne et dépose mon stylo sur ma table, sans m'adresser un regard de plus, ni même une dernière parole. Elle jette son sac sur son épaule, et quitte la salle, accompagnée de personne.
Je quitte à mon tour cette pièce devenue étouffante avec le temps, sans éviter d'élever quelques murmures à mon passage. Tout le monde sait pour ce que j'ai fait à Adrien. Mais savent-ils que cela ? Je frisonne sous cette pensée, que j'éloigne aussitôt de moi, avant de devenir complétement paranoïaque.
J'aperçois au bout d'un couloir la porte de l'infirmerie, et l'envie de l'ouvrir pour ne serait-ce que prendre connaissance de l'état d'Adrien me frappe à grands coups. Mais je résiste, et poursuis mon chemin en direction de la salle de Français.
– Mari !
Je fais volte-face en direction de Chloé qui bondit aussitôt à mon cou.
– Mari ! Alya et moi, on a eu une idée pour... pour faire parler ce Black, grimace-t-elle en me serrant un peu plus contre elle, afin que ses lèvres effleurent mon oreille, et que ses mots ne soient audibles que par moi.
– A quel sujet ?
– Au sujet de Chat Noir.
Je la repousse aussitôt, le cœur beaucoup trop lourd, à présent. J'avais réussi à le mettre de côté, mais il a fallu qu'elle remette le sujet sur le tapis, encore et toujours.
– Non, cela ne sert à rien, lui assuré-je, en me rappelant toutes ces fois où j'ai tenté d'avoir une discussion descente avec lui. Ne perdons pas de vue notre objectif. Des réponses, nous finirons bien par en avoir avec Maitre Fu.
Elle hausse un sourcil, un poil sceptique. Ou peut-être pas. Je secoue la tête tout en m'éloignant, en essayant d'étouffer cette volonté de tout connaître, d'enfin faire un trait sur le mystère qui flotte autour de sa disparition depuis si longtemps. Trop longtemps.
Je pousse un râle exaspéré. Je ne sais plus ce que je dois faire. Maître sait quelque chose, même plus d'une, mais je ne sais comment lui soustraire les réponses que j'attends depuis des mois. Une larme, puis deux, m'échappent.
– Qu'est-ce que vas faire, alors ? soupire la jeune fille à la chevelure blonde.
Je pose un regard lourd de sens dans le sien, et prends mes jambes à mon cou pour passer les portes du lycée avant que la sonnerie ne retentisse.
Je dois encore essayer. Pour nous. Pour lui.
Hey ! Voici le chapitre 25 ! Quoi ?! déjà ? ah... ça passe vite dis-donc ^^ Et sinon, vous avez des hypothèses sur l'identité de Black ? Ou même sur ce qui va arriver ?
Au faite... Le dernier chapitre de cette fiction est bouclé, il ne reste plus que quelques chapitres (je ne saurais dire combien, désolé...). Donc voilà, j'espère la terminer avant la fin du mois prochain !
Bref, bonne lecture, et merci de me lire !
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Black - A Miraculous FanFiction [Réécriture]
Fanfic/!\ risques de spoils /!\ Marinette Dupain-Cheng a seulement treize ans lorsqu'elle découvre Tikki, qui la fera devenir Ladybug, l'héroïne tant appréciée de Paris. Voilà que quatre ans sont passés depuis cette rencontre qui a donné un nouveau tourna...