37 - A travers le brouillard

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— Il est parti, annonça Élise en refermant la porte derrière elle.

Roulée en boule sur son lit, les genoux sous le menton, Maddie resserra ses bras autour de ses jambes.

— Ok, murmura-t-elle.

Élise vint s'asseoir à ses côtés et lui demanda doucement :

— Est-ce que ça va ?

Maddie hocha silencieusement la tête. Elle avait ignoré tous les appels d'Anthony depuis qu'elle l'avait quitté, mais le jeune homme, bien décidé à parler de vive voix avec son ancienne petite amie et à plaider sa cause, avait conduit jusqu'à Felice un beau matin et s'était inopinément présenté devant la porte de sa chambre. Le visage épuisé, les traits tirés, il semblait n'avoir pas dormi depuis des jours. C'était Élise qui l'avait accueilli en lui disant de but en blanc qu'il n'était pas le bienvenu.

Elle l'avait attrapé par le bras et traîné au rez-de-chaussée.

— Maddie n'a aucune envie de te voir pour le moment et ne pas respecter son choix ne plaide vraiment pas en ta faveur, avait-elle déclaré sèchement.

Anthony était au bord des larmes.

— Je veux m'expliquer, détailler le pourquoi de la photo que Maddie a vu sur internet.

Ils s'étaient arrêtés à l'extérieur du dortoir. Élise avait lâché Anthony et avait planté son regard dans le sien. Elle y avait vu une telle tristesse qu'elle avait changé de ton, sa voix s'était adoucie.

— Il faut que tu laisses Maddie tranquille. Tu lui expliqueras tout ce que tu veux quand elle sera prête à t'écouter. La harceler n'arrangera en rien la situation.

Anthony avait baissé la tête et reniflé.

— Mais c'est si bête. Toute cette situation est si bête.

Élise lui avait tapoté affectueusement l'épaule.

— Je comprends. Je te promets que je vais prendre soin de Maddie mais pour le moment, il faut que tu acceptes de la laisser prendre ses distances. Elle en a besoin. D'accord ?

Anthony avait acquiescé à contre-coeur. Il voulait vraiment voir Maddie, lui c'était ça dont il avait besoin. Il allait tourner les talons quand Élise lui avait annoncé :

— Je vais être totalement franche avec toi, c'est moi qui ai découvert la photo de toi et de cette fille. Je faisais des recherches pour le journal et je suis tombée dessus. Tu comprends que je ne pouvais pas cacher ça à Maddie, hein ?

Anthony l'avait regardé et avait répondu spontanément :

— Oui, je comprends. Tu n'as rien fait de mal. C'est moi qui ai déconné. J'aurais dû parler de tout ça à Maddie, il y a bien longtemps. Je ne peux pas te blâmer. J'aurais agi pareil pour un de mes amis.

— Je suis contente que tu penses ça, parce que mon but n'était pas de m'immiscer dans votre couple, ni de causer des problèmes, mais de protéger mon amie.

Anthony avait esquissé un sourire triste.

— Je te le redis, je comprends.

— Ok. Tant mieux. Je n'ai absolument rien contre toi, sache-le. Je ne suis pas là pour te juger et je n'influencerai Maddie dans aucun sens. C'est votre histoire.

— J'apprécie, avait lâché Anthony tout bas.

Puis il avait tourné les talons et, tête basse, s'en était allé.

Élise prit Maddie dans ses bras et lui demanda :

— Tu veux savoir ce qu'il m'a dit ?

— Non.

Le silence tomba.

— Très bien. Si tu veux en parler, je suis là. Je ne t'embêterai pas à te poser des questions, ok ?

Maddie acquiesça tandis qu'Élise l'embrassait sur la joue. Elle se leva et attrapa son sac de cours.

Plusieurs minutes après qu'Élise eut quitté la pièce, Maddie prit une grande inspiration, se leva de son lit et alla chercher un de ses cahiers. Pour éviter qu'Anthony ne revienne à l'improviste, Maddie avait l'idée de lui écrire une longue lettre dans laquelle elle lui dirait ce qu'elle pense de leur couple depuis leurs entrées respectives à la fac.

Elle écrivit plusieurs pages, lui parlant de la distance qui s'était instaurée entre eux. De l'impression qu'elle avait qu'il avait changé. De son attitude depuis qu'il était entré dans sa fraternité. De sa déception face à cette photo. De son incompréhension qu'il n'ait pas été honnête avec elle, alors qu'elle n'avait pas manqué de l'être après le baiser lors de la soirée d'Halloween. De sa tristesse. De sa détresse. De son besoin de temps pour comprendre ce qu'elle voulait.

Anthony avait eu beau lui répéter encore et encore dans ses messages que ce n'était pas ce qu'elle croyait, qu'il n'y avait rien entre cette fille et lui, que l'inconnue s'était jetée sur lui lors de la fête et qu'il ne l'avait pas draguée, Maddie faisait la sourde oreille. Toutes ces informations là, ce n'était pas le plus important. Ce qui l'avait profondément blessée, c'était que son petit ami lui ait caché des choses tout en la faisant culpabiliser du baiser avec Nate qu'elle n'avait en aucun cas provoqué.

Maddie vécut les jours suivants dans une espèce de brouillard. Elle vaquait à ses occupations, respectait ses horaires de cours et de travail à la bibliothèque mais son esprit était ailleurs. Elle se sentait fatiguée et elle n'avait qu'une envie : retourner chez elle retrouver ses proches et se reposer.

Alors, dès que vint le moment des vacances de Noël, dès qu'elle sortit de son dernier cours, elle ne réfléchit pas une seule seconde. Elle fonça récupérer sa valise dans sa chambre, prête depuis plusieurs jours, embrassa Élise en lui souhaitant de bonnes fêtes et quitta le campus. Elle n'assisterait ni au spectacle prévu le soir-même ni ne participerait à la fête organisée juste après, que tous les étudiants attendaient avec impatience. Mais elle s'en fichait complètement. Ce qui lui importait était de retrouver le calme de chez elle, la chaleur de son foyer et l'amour de sa famille.

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