16- L'étoile de Noah

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CHAPITRE 16

CHARLIE

« L'étoile de Noah. »

​​Quelques jours sont passés depuis la rentrée, c'est la fin de semaine. Rien de bien palpitant, le début des cours, des présentations, des introductions... Je suis contente de retrouver mes copines mais je n'étais pas comme d'habitude aujourd'hui. Il faut dire que je m'isole, peut-être que j'ai besoin de réfléchir à tout ça. Quand je dis ça je veux dire Isaac, 5 lettres dont 2 similaires et je suis incapable de les ranger dans une case, ami ou amour ? Non, ami. Ce n'est pas possible que ce soit amour. Je ne peux pas. Je n'ai pas le droit. Puis je ne l'aime pas en plus.
Je marche d'un pas décidé en me répétant à voix basse :

– Je ne l'aime pas, je ne l'aime pas, je ne l'aime pas, je ne l'aime ...

– Tu n'aimes pas quoi ? me coupa net Isaac, me voyant passer devant le magasin de
glace.

En effet je semblais avoir oublié mon chemin, tellement mes yeux étaient figés, je marchais tel un robot.

– Toi. Et on dit bonjour d'abord. Dis-je d'un ton sec.

– Oh... excuse-moi, tu allais passer devant le glacier sans t'arrêter. Je t'ai préparé un
petit pot de glace. Tu sais celle que je t'ai fait goûter la dernière fois avant qu'elle soit victime de son succès. « Premier baiser » pour madame. Dit-il en me tendant le pot avec deux cuillères.

Je pris le pot sans même remarquer plus que ça la double cuillère ni même cet accueil attentionné. Je le remercie et m'empresse d'aller chercher mon tablier. Je n'ai pas encore de badge avec mon prénom, j'ai celui de l'ancienne glacière qui travaillait cet été.
Je n'arrive pas à faire le nœud derrière pour attacher ce foutu bout de tissu. Isaac arrive discrètement dans mon dos et me prend les ficelles des mains. Il noue délicatement le tablier avec sa sagesse naturelle. Sa présence et ses mains si fines dans mon dos, me donnent des frissons. Je lui fais face en tournant sur moi-même.
Nous sommes si proches tout à coup. Ce moment me rappelle notre rendez-vous au café, nos bouches allaient se rencontrer. Et si je l'embrassais pour de vrai, là maintenant ? Non. Je ne dois pas l'aimer. Je n'ai pas le droit. Il m'énerve. Ses cheveux bruns et lisses, ses fossettes, Il est beau, si beau. Parfois, j'ose penser que Noah aurait pu devenir comme lui et c'est ça qui m'agace le plus. Mais Noah avait des taches de rousseur, pas Isaac. Une différence qui n'est pas la seule. On se reprends ! Isaac n'est qu'un simple... glacier. Du moins en ce moment précis.
Il ouvre la bouche et dit :

– Tu sais, je voulais m'excuser. Pour la dernière fois et surtout pour Noah...

Quelques secondes passèrent sans un mot, j'étais déboussolée en entendant le prénom de mon petit frère dans sa bouche. Car même si Isaac ne cessait de s'excuser pour la bêtise de son frère, cela me rappelait toujours de mauvais souvenirs.
Le soir je regarde les étoiles et je vois son étoile, étincelante, sûre d'elle, des rayons qui tranche l'obscurité. Un peu comme toi...
Je suis glacée par ses mots. Je détourne le regard quelques minutes et je puise en moi l'énergie nécessaire pour répondre au vieux monsieur qui vient de passer le pas de la porte.
Déjà quelques heures que les clients s'enchaînent même si le monde n'était pas au rendez-vous, on sentait bien que l'automne arrivait et que la chaleur avait quitté Port D'Orée rapidement. Un temps gris qui annonçait un orage. Je n'aime pas ce temps, il faut trancher soit du soleil et de la chaleur, soit de la neige.
Kathel est rentrée sans que j'ai le temps de l'apercevoir, elle entame déjà une conversation avec Isaac. Elle porte sa robe moulante noir, ça lui va bien, c'est sûr que ce n'est pas le genre de fille à avoir à complexer sur son physique pourtant elle passait son temps à se plaindre.

– ... Je vais prendre deux cornets de glace s'il te plait ! dit-elle avec un sourire en
coin.

– Deux ? Arthur est là aussi ?

– Non, je voulais t'offrir une petite pause pour discuter. Ça te dit ?

Mais je rêve, elle ne va quand même pas draguer Isaac devant moi. Cette fille peut être une crème mais elle aime plaire et y passe tout son temps et son argent. Sauf que là, c'est trop !

– Non il ne peut pas, nous avons de la vaisselle pour laver les bacs vides.

– Ah mince, désolée et bien une seule alors, hum... Premier baiser ! Qui sait cela fera peut-être venir celui qui fera chavirer mon cœur, dit elle en jetant un regard mielleux à Isaac.

Isaac lui donne sa glace, sans vraiment comprendre le petit manège qui se jouait entre nous.
Je suis énervée. Je finis plus tôt que prévu pour me préparer pour le cinéma ce soir. Je n'ai toujours pas prévenu Kathel. Elle met un temps fou à manger sa glace et pour couronner le tout, madame a voulu rentrer à pied pour « brûler les calories de la glace ». Je trouve ça plutôt pathétique, soit tu manges, soit tu ne manges pas. Faut choisir !
Arrivées à l'appartement, je prends la première place assise sur les chaises de notre petite cuisine. Kathel doit aller à une soirée, c'est le moment de lui dire que je vais au cinéma avec Isaac. Les évènements pour la glace tout à l'heure n'étaient que futiles, là il y avait plus urgent.
Quand Kathel comprit que j'allais voir Isaac, elle voulut' s'incruster et y inviter toute la bande. Je réussis à l'en dissoudre en lui avouant que le film n'était autre qu'un film de 2h30. Trop long pour elle sans aucun doute et le sujet trop sérieux. C'est un film tiré d'une histoire vrai. Un peu curieux comme choix mais j'aime bien ce qui sort de l'ordinaire. Elle m'aida à choisir ma tenue. Je mis finalement un pantalon à carreaux noir et gris, avec un tee-shirt noir qui laissait entrevoir la naissance de mes seins, mes cheveux lâchés telle une lionne, deux petits colliers dorés, un trait d'eye-liner noir, quelques paillettes et un béret rouge pour un peu de style. Noah adorait ce béret, il disait que ça lui faisait penser à son artiste préférée, Cœur de Pirate.
Même 4 ans après beaucoup de choses me ramènent à lui, surtout en ce moment. Je stresse tellement que je ne fais que faire rouler mes cheveux blonds et longs entre mes doigts...
Je préférais tout de même une soirée au cinéma plutôt qu'une avec de l'alcool. L'alcool a saccagé ma vie et à ma dernière soirée, rien ne s'était passé comme prévu et voilà où j'en suis.
Kathel écoutait de la musique, toujours du rap, et quand ce n'est pas PNL, c'est une musique avec littéralement 3 mots : « fumer, tiser, baiser ». Okay c'est sympa deux minutes mais les paroles, sans aucun sens, vous me direz c'est mieux que les paroles sexistes des rappeurs français. Elle écoutait ça en boucle.

– Charlie tu vas être en retard, vas-y, il fait déjà nuit ! crit Kathel de la salle de bain où elle est enfermée depuis presque une heure pour se maquiller.

Je sors. Lorsque je mets les pieds dehors, je lève la tête, le ciel est rempli d'étoiles. Les nuages avaient décampé. Une étoile m'éblouit tout à coup. Le béret rouge posé sur ma tête tombe sur le sol avec un léger coup de vent.
L'étoile de Noah.

Les étoiles reposent dans tes yeux.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant