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Chapter 10

Katherine pose une main sur mon épaule, comme me retenant d'appuyer sur la poignée. Je me tourne alors vers elle, m'apprêtant à un lever un sourcil interrogateur dans sa direction. Sauf que plus aucune question ne se pose quand je vois son visage, rougi sous l'effort, et son souffle court.

— Vous êtes vraiment les mêmes... Juste pour trois étages ?

— J'ai abandonné ma carrière de sportive à l'instant où j'ai dû sortir du ventre de ma mère. Déjà trop d'efforts pour moi.

Je souris à sa remarque, puis me tourne de nouveau pour entrer chez moi. Seulement cette fille est pire que têtue, aussi sa main se resserrant sur mon épaule m'empêche-t-elle à nouveau d'accomplir mon geste. Cette fois-ci je ne me retiens pas pour lever les yeux au ciel.

— Si je dois servir de médiatrice, laisse-moi au moins reprendre mon souffle Raffa.

Je lui refais donc à nouveau face, souriant le plus faussement et niaisement du monde. Elle se redresse alors de son petit mètre soixante, inspire deux fois, me fait patienter encore plusieurs interminables secondes, puis me fait signe que je peux y aller. À croire que c'est elle qui redoute cette confrontation. Elle n'a peut-être pas tort dans un sens, elle n'est là que parce qu'elle est incapable de dire non, mais ce n'est pas non plus sa place. Pour ma part je suis étrangement impatient. J'ai attendu ce moment de vérité toute la journée. Pouvoir enfin le confronter en face à face. Alors à la seconde où je franchis ma porte d'entrée, mon sourire disparaît de mes lèvres.

— Oh God... Embrouillez-vous plus souvent les gars, genre tous les soirs... Si à chaque fois il fait un truc qui sent aussi bon à manger, je veux bien faire votre médiatrice à vie.

J'avoue qu'elle marque un point, une odeur divine se dégage de la cuisine. Je connais parfaitement Malo, il me l'a déjà fait ce coup-là. Quand il cherche à se faire pardonner, il ne trouve rien de mieux que d'acheter les gens. Comme cette fois où il m'a emmené à la mer et où il a offert Nute à ma sœur.

A peine mes pensées se sont-elles tournées vers le chien de Sam que Falcon arrive en trombe, la queue remuant déjà dans tous les sens. Il vient slalomer entre mes jambes, me reniflant sous toutes mes coutures. J'ai beau avoir pris une douche, je suppose que mon effort de course est encore imprégné dans mes pores. Je le caresse entre les oreilles pour lui faire plaisir, mais pour être honnête je ne le fais que distraitement et à peine plus de quelques secondes.

L'avantage de la cuisine, c'est que c'est la première pièce après l'entrée. Il ne me faut en somme que bien peu de temps pour la rejoindre et poser mes yeux sur le coupable du jour. Alors à ce moment je peux constater qu'en effet, monsieur a mis les petits plats dans les grands.

— Une baguette ? Une vraie ? Genre tu l'as faite venir de France ?

Malo, qui jusque-là me regardait directement, consent à tourner sa tête vers son amie et sa question absurde. Il esquisse alors un sourire tout en venant à notre rencontre.

— Non, Kitty Kat. Je l'ai achetée ici. Parce que oui, il y a aussi des boulangeries françaises aux Etats-Unis. Suffit de savoir où chercher.

Je ne pourrais pas affirmer avec certitude qu'elle l'a écouté, du moins pas jusqu'à la fin. Ses yeux ne se sont pas décrochés de ladite baguette, alors même que je me demande si une flaque de bave ne va pas bientôt se former à ses pieds. Elle contourne alors Malo pour se diriger directement vers la table déjà dressée, faisant immédiatement fi de nous. Je reste pour ma part adossé au chambranle de la porte, n'ayant toujours pas prononcé le moindre mot ni même émis le moindre son depuis mon arrivée. Je le laisse m'embrasser doucement, ne le repoussant pas mais ne bougeant qu'à peine mes propres lèvres en retour. Quand il s'écarte ses yeux scrutent les miens. Je ne sais pas ce qu'il y voit, mais les siens me renvoient une profonde incertitude. Bien. Quand il aura assez ramé à mon goût, ses bras seront de taille à concurrencer ceux d'Hulk.