As Yet Untitled [ᴇɴ ᴄᴏʀʀᴇᴄᴛɪᴏɴ]

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ASH
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Les jours qui suivent ce premier aperçu du duo sont éprouvants pour moi puisque je cours littéralement entre le campus, le salon d'Alrick et le studio d'enregistrement. J'ai à peine le temps de m'installer en cours qu'il faut déjà que je me rue au shop pour régler les derniers détails de l'événement spécial  « St-Valentin » avant de sauter dans un bus pour rejoindre toute la troupe d'Apollo Faces au Smooth Sound Studio.

Lorsque j'arrive, je rejoins les garçons dans la petite salle d'enregistrement et je les écoute tâtonner pour trouver le bon accompagnement pour le texte du duo. C'est donc ainsi que je me retrouve à chanter des dizaines de fois les deux mêmes lignes de texte sur différentes tonalités et, lorsque j'ai l'impression que les garçons ont finalement réussi à s'accorder sur la même version de la mélodie et que nous allons pouvoir passer à la suite, ils reprennent quelques mesures plus tôt et s'aperçoivent que ce qu'ils ont composé la veille ne leur convient plus.

Je suggère de temps à autres et avec toutes les précautions possibles, quelques modifications tant sur les paroles que sur l'accompagnement mais je n'ai absolument pas l'habitude de faire cela et, à chacune de mes interventions, j'ai l'impression d'interrompre les garçons et de les déconcentrer. Pourtant, ils m'encouragent à leur faire part de mes propositions et finissent par reconnaître qu'ils auraient besoin d'un avis féminin plus souvent. Jem lève même un sourcil intéressé et acquiesce à quelques unes de mes suggestions tandis que je fais profiter mes amis de mon expérience personnelle pour apporter un coté un peu plus voluptueux au morceau brut qu'ils étaient entrain de composer.

Le samedi suivant, nous sommes enfin parvenus à tomber d'accord sur l'ambiance générale que nous voulions donner au morceau alors nous nous retrouvons aux aurores et commençons à enregistrer les premières pistes du duo. Nous passons ainsi la matinée à jouer en boucle le premier couplet avant de nous interrompre, épuisés. Nous avons répété un nombre incalculable de fois les mêmes mesures, parfois à l'unisson, parfois individuellement, pour parvenir à capter la meilleure version de ces quelques secondes de musique et je ne pensais pas que quelque chose d'aussi simple à première vue pouvait être aussi éreintant.

Lucy nous rejoint à l'heure du déjeuner, les bras chargés de sacs en papier fumants. Je la vois pousser avec difficulté la porte du studio, se débattant avec ses paquets pour n'en faire tomber aucun et finir par les déposer sur la table basse autour de laquelle nous avons déjà mangé bien trop  souvent cette dernière semaine. Le producteur, tout concentré qu'il est sur ce que nous produisons, n'a pas remarqué l'arrivée de mon amie et nous fait signe de reprendre au début une fois de plus.

— Jem, tu peux reprendre la quatrième mesure s'il te plaît ? Juste le riff de l'intro, et tu enchaîne avec le début du couplet.

— Encore ? se plaint le chanteur qui a dû jouer ce même passage encore plus souvent que nous.

— Oui, je crois que tu n'es pas tout à fait dans le rythme.

Jem réajuste son casque sur ses oreilles, plaque ses doigts sur le manche de sa stratocaster et s'apprête à jouer de nouveau l'intro lorsque je vois Lucy s'approcher du producteur pour lui tapoter l'épaule.

— Vous ne croyez pas que vous leur en avez assez demandé pour le moment ? interroge-t-elle en faisant sursauter l'homme en costume.

Je souris lorsqu'il se retourne pour dévisager la jeune femme qui se tient derrière lui et qu'il tente de lui faire comprendre que nous n'avons pas encore terminé ce que nous devions faire ce matin. Lucy ne se laisse pas démonter et tient tête au producteur d'Apollo Faces.
Elle ne lui laisse pas l'occasion d'argumenter plus et est intransigeante lorsqu'elle maintient que nous avons besoin de faire une pause. Ses bras croisés et son attitude protectrice de future maman font même baisser les yeux à cet homme de quasiment deux fois son aîné et il finit par céder et nous laisser sortir de la salle d'enregistrement.