17. Escort-boy, prothèse et photomaton

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ATHENA

— Tu n'es qu'un petit dévergondé, lapin, le grondai-je avec un grand sourire.

Prince m'offrit son plus beau sourire de salope – personne ne pouvait lui arriver à la cheville d'ailleurs. Il remit en place sa coupe déjà impeccable et lissa son pull dans un geste inutile.

— J'aime baiser, je ne vois pas où est le problème.

Je gloussai devant l'air scandalisé de nos voisins de table, qui ne s'étaient sûrement pas attendue à ça lorsqu'ils avaient réservé leur table.

J'adorais avoir ce genre de conversation avec Prince en public. Vous aviez alors différentes réactions autour de vous. Moi-même je faisais partie du faible pourcentage de petit curieux qui faisait exprès d'enfoncer des écouteurs sans mettre de musique, juste pour ne pas donner l'impression d'être un vicelard épiant des conversations à tendance sexuelle.

— Tu compenses peut-être quelque chose, va savoir, le titillai-je ouvertement, plantant ma fourchette dans mon toast grillé.

Nous avions opté pour un brunch, aimant ça tous les deux. Et puis j'avais eu cette impression que ça faisait trop longtemps que nous ne nous étions pas vus, alors forcément, j'avais choisi un truc qui lui plairait, dans un restaurant qu'on appréciait tous les deux.

Prince menait certes la grande vie, ça ne l'empêchait pas de savourer des plaisirs simples. Entendez par là les endroits foireux où je le traînais.

— Et je te rappelle que c'est comme ça que je gagne ma vie. Plus ou moins.

Il but une lampée de son jus, nonchalamment appuyé contre le dossier de son fauteuil. Aujourd'hui, tenue décontractée pour lui, ce qui au passage lui saillait à merveille. Pantalon à pince sombre, un polo et des sneakers. C'était ce qu'on appelait le look sport chic. Le genre de mode qui me dépassait un peu, mais dont Kai rabâchait les oreilles à tout le monde avec. Bien que Prince vienne d'un milieu défavorisé, il avait su se mettre au pas très vite, jouant avec brio l'héritier d'une grande famille. Mais non, il n'était qu'un Escort-boy. Avec certaines transactions sexuelles selon les clients et les demandes. Il appelait ça l'évolution du métier, l'Escort-boy 2.0. Pourquoi pas.

— Tu n'es pas une pute, dis-je. Tu offres ta compagnie aux personnes qui en ont besoin. Ce que tu fais de ton cul ne devrait pas rentrer dans les termes de ton contrat de travail.

Il rit, cacher derrière son verre et son œillade me mit du baume au cœur.

— J'aime les avantages en nature, chérie.

— Surtout avec ton sugar daddy, laissai-je planer.

Je croquai à pleines dents dans mon toast, savourant le grillé sur le bout de ma langue. L'euphorie de Prince sur sa vie sexuelle trépidante ne pouvait venir que de là. Ou alors il avait réellement pris son pied avec plusieurs clients. Ce qui n'aurait rien eu de choquant de sa part. Je préférais le voir épanoui que ressasser inutilement une relation pour le moins toxique. Mais ça, je me gardais bien de lui dire. Il y avait une limite tacite en amitié qui vous poussait parfois à bien fermer votre gueule, sous peine de blesser votre ami sans aucune chance de pardon. Et je tenais bien trop à notre amitié pour nous infliger ça de moi-même. Quand il ne restait personne, je savais pouvoir compter sur Prince. Mon frère ne comptait bien évidemment pas dans l'équation.

— Je ne l'ai pas revu depuis des semaines, m'avoua enfin Prince. Et je crois que ce n'est pas plus mal.

Qu'il le dise à haute voix, qu'il ose enfin me le dire montrait combien il avait dû ressasser. Je ne relevai pas, me contentant d'attendre. Autre règle en amitié ; ne pas tout commenter. Je n'étais pas une Izzy Stevens qui parlait trop vite et qui comprenait sa connerie en voyant la tronche de son interlocuteur. En plus, Prince pouvait être horriblement susceptible sur certains sujets ou personnes. Comme ce mec le baisant dans sa limousine ou Kyle. Quoique le deuxième était sûrement pire que le premier. Aucun jugement là-dedans, juste une plate constatation.

KISS OF TIME - Dear Tomorrow - 1 [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant