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Je ne sais pas comment, mais j'ai fini par me retrouver agenouillée par terre, la main sur la poitrine et la respiration haletante. Je crois que je suis en train d'avoir une crise d'angoisse. Non, je ne crois pas, j'en suis sûre. Par contre, j'ignore bien pourquoi cela n'arrive que maintenant. J'aurais pu comprendre si ça s'était produit après la rencontre avec mes kidnappeurs ou lors de ce dîner où je me suis retrouvée face à une vingtaine de personnes que je ne connaissais pas et qui sont pourtant de ma famille. Même ma première entrevue avec le Premier ministre aurait été plus apte à me mettre dans un tel état. Mais non, c'est maintenant que ça arrive, après l'avoir vu intervenir face à son gouvernement. À ses hommes et ses femmes politiques. À peine ai-je entendu leurs premiers applaudissements, qu'immédiatement, j'ai eu du mal à respirer. La seconde d'après, je me retrouvais par terre. Suis-je tombée ? Ai-je perdu l'équilibre en essayant de me relever ?

Tout est flou et, les yeux fermés, il n'y a qu'une chose qui est claire dans mon esprit : le prénom que je viens de prononcer. Celui de la seule personne qui m'est venue en tête et qui me ramène inexorablement à ce moment où toute cette folle histoire a commencé, il y a de cela deux semaines. Je réitère la même réaction et je ne vois qu'une personne en mesure de m'aider comme il l'a déjà fait : Aiden Sutton.

La précipitation m'entoure par les gestes parfois brusques et les nombreuses voix qui s'élèvent. Je n'arrive pas à en déterminer leur propriétaire et encore moins les mots prononcés. J'imagine qu'il doit y avoir mes parents dans le tas. C'est sûrement l'un d'entre eux qui tient mes cheveux loin de mon visage, craignant peut-être que je me mette à régurgiter.

De longues minutes s'écoulent sans que je n'arrive à reprendre le contrôler de la situation. J'ai de plus en plus de mal à respirer et les larmes qui viennent d'apparaître ne font qu'empirer la situation. J'ai l'impression d'être de retour en arrière, moi qui pensais avoir réussi à avancer ces deux dernières semaines. Je n'aurais pas pu prévoir ça. Du moins, j'essaie de m'en persuader.

J'ai l'impression que je suis dans cette position et cette situation depuis une éternité. Combien de temps s'est écoulé ? J'ai le sentiment que ça fait une heure, alors que ça ne doit sûrement faire que quelques minutes. Cela me parait interminable et je ne sais comment je peux sortir de cette situation. Certains mots d'Aiden me reviennent en mémoire, mais je n'arrive pas suffisamment à me calmer pour les entendre distinctement et les prendre en considération.

Il me faut attendre son arrivée pour qu'un changement s'effectue. Je n'ai même pas besoin, dans un premier lieu, de respirer dans le sachet qu'il me tend, pour que mes respirations s'apaisent. Seule sa présence m'aide déjà beaucoup. Agenouillé à mes côtés et sa main tenant le petit sac dans lequel je respire, j'arrive à retrouver un rythme normal au bout de quelques minutes. Sans trop réfléchir, j'ai fini par poser ma tête contre son épaule. Son contact a beaucoup contribué à mon apaisement.

— Je suis désolée.

Ce sont les premiers mots que je dis, les seuls auxquels je n'arrête pas de penser depuis son arrivée. La seule chose qui m'anime maintenant, c'est la culpabilité. Je m'en veux d'avoir été dans un tel état et de ne pas avoir été capable d'appréhender cette crise ou de la gérer toute seule. Je sais que ce n'est que la deuxième fois que j'en ai une. Je n'y suis pas habituée et je ne veux pas l'être.

— Vous n'avez pas à vous excuser, mademoiselle, me rassure-t-il.

Nous sommes toujours assis sur le tapis du salon. Pour le moment, il n'y a que lui et moi, et je crains l'instant où je devrai retourner à la réalité et devoir expliquer ce qui s'est passé à mes parents. Et à toutes les personnes qui pourraient être dans la même pièce que moi. J'ai honte. Encore plus lorsque je me souviens que Lilianna était là, elle aussi. Je ne sais pas si c'est toujours le cas ou si on l'a fait sortir de la pièce, mais je suis en colère contre moi-même de lui avoir montré une telle image de moi. Cela fait à peine deux jours qu'elle me connaît, que doit-elle penser de moi ? Ce n'est vraiment pas l'exemple que je voulais lui envoyer, moi qui avais réussi à garder la tête haute jusqu'à présent.

Nos Années Volées ▬ Tome ✯✯ ©Où les histoires vivent. Découvrez maintenant