Vingt-Neuf

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— C'est un véritable succès !

C'est ce que grand-mère s'exclame en entrant dans le salon en ce bel après-midi du dimanche. Nous sommes tous les quatre installés autour de la table, un jeu de société posé dessus. Nous profitons de ces quelques heures de répits après une semaine chargée, en famille. Nous nous réjouissons des derniers mois qui ont été compliqués, des batailles gagnées. Nous prenons une pause, avant de continuer nos vies avec son lot de surprises, de bonheur et de déceptions.

Grand-Mère s'installe à mes côtés et m'adresse un large sourire. Un sourire fier et soulagé.

— Tous les articles de journaux sont très élogieux, poursuit-elle.

— Je sais, maman, lui répond la Reine. J'ai eu des retours de mon secrétaire particulier depuis hier.

— Et alors ? Parce que monsieur Rochon peut t'apporter les nouvelles avant moi, je n'ai plus le droit de me réjouir ?

Au moment où elle a entendu le surnom, Lilianna s'est mis à pouffer. Quant à moi, je tente de me retenir de rire, mais en apercevant son regard, je craque. Notre père se joint à nous, laissant son épouse pantoise tandis que grand-mère sourit fièrement.

— Je suis certaine que mon secrétaire particulier sera ravi de connaître le surnom que tu lui donnes, maman, rétorque la Reine.

— Peut-être que ça lui fera sortir le balai qu'il...

— Maman ! s'exclame-t-elle avec effroi. J'espère sincèrement que tu n'allais pas dire ce que je pense que tu allais dire.

— Tu ne dois vraiment pas l'aimer, intervient Lilianna avec amusement.

— Mon aversion pour cet homme est plus forte à chaque début d'année, approuve-t-elle avec dégoût. Il est grand temps de le mettre à la retraite, Hellen.

— Je pensais que tu étais venue pour te réjouir de la première sortie officielle de ta petite-fille ? Ou bien n'était-ce qu'un prétexte pour t'immiscer dans les décisions du palais ? Y aurait-il un autre membre du personnel sur lequel tu souhaiterais donner ton opinion ?

— Eh bien, maintenant que tu le dis, j'aimerais beaucoup que tu renvoies également Madame Millet.

— Madame Millet ? Es-tu sérieuse, maman ? Habituellement, tu ne taris pas d'éloges à son sujet.

— Justement, en voilà tout l'intérêt. Je ne pourrais jamais l'embaucher si tu ne t'en défais pas.

Maman hoche négativement la tête d'un air réprobateur. Grand-mère, elle, est toujours aussi satisfaite d'avoir taquiné sa fille, mais je reviens suffisamment vite dans son esprit pour qu'elle se tourne vers moi et me colle un baiser sur la tempe.

— Alors, quelle sera la prochaine sortie officielle ? s'extasie-t-elle.

— Maman, enfin ! soupire la Reine. Laisse-la un peu respirer voyons. Cela a demandé plusieurs mois pour qu'elle soit prête pour la journée d'hier, tu pourrais peut-être retourner à la case « réjouissance » avant de revenir sur celle des projets, d'accord ?

— Très bien, Hellen. Je suis désolée, je ne voulais pas mettre ma petite-fille mal à l'aise. T'ai-je mise mal à l'aise, mon ange ? dit-elle en se tournant vers moi.

Je ne m'attendais pas à ce que je puisse enfin intervenir dans cette conversation entre les deux femmes de la pièce, je mets donc un moment avant de répondre.

— Non, grand-mère.

Son enthousiasme est adorable, comment pourrais-je lui en vouloir ? Il est certes exact que je préfère attendre encore quelques jours avant de parler de la prochaine sortie, mais la fierté que je lis dans ses yeux m'apportent que des ondes positives. Ça me fait du bien.

Nos Années Volées ▬ Tome ✯✯ ©Où les histoires vivent. Découvrez maintenant