Vingt-Quatre

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Le regret de ne pas l'avoir regardé une dernière fois s'installe en moi sans attendre alors que je n'ai fait que quelques pas. Mais c'était au-dessus de mes forces. Je n'arrive pas à trouver les mots... Mon cerveau commence sérieusement à me taper sur le système en ce moment précis.

Après la sécurité et toutes ces procédures qui n'ont pas réussi à me faire oublier, j'arrive dans la zone commerciale. Je jette un coup d'œil à mon téléphone : il me reste deux heures avant que ne décolle mon avion. Je pourrais très bien me rendre directement dans le salon privé réservé aux passagers de la classe affaire, mais je préfère finalement flâner un peu. Je me dis que je trouverais sûrement une occupation parmi toutes ces boutiques, mais la plupart d'entre elles ne m'intéressent pas (comme les grandes marques) ou je ne les connais même pas !

C'est donc mon ventre qui prend le pas et me conduit vers l'entrée d'un Starbucks : au moins, pas de risque, je sais ce qui m'attend à l'intérieur. Je me glisse dans la file, sors mon portefeuille et laisse mes yeux glisser sur les étals qui regorgent de pâtisseries en tous genres. J'opte pour un simple beignet avant de payer et de sortir avec hâte en voyant la masse de personnes qui ont toutes décidé de boire un petit café.

En dehors de l'enceinte, il y a toujours un monde fou et j'ai l'impression qu'il ne me faudrait pas grand-chose pour que je me mette à suffoquer. Je crois que le mieux, maintenant, c'est d'arrêter de flâner et de rejoindre le salon privé de la classe affaire. J'ai du mal à m'y repérer et je dois demander mon chemin trois fois avant d'enfin arriver devant les portes vitrées qui mènent à un peu de paix. Après avoir vérifié que j'étais bien en règle (grand Dieu, il ne faudrait pas qu'un citoyen de la classe économique ne puisse entrer par mégarde !), j'accède finalement à la salle.

Celle-ci est plutôt grande et bien plus silencieuse que le grand hall que je viens de quitter. Ça fait du bien aux oreilles, mais aussi à mon cœur qui commence doucement à s'apaiser. Je m'installe très rapidement à la première place que j'aperçois et y dépose mon sac à main sur le siège d'à côté avant d'en extraire ma petite gourmandise.

Certains me jettent des regards alors que je sors le plus silencieusement possible le beignet de son emballage bruyant. Mais qu'ont-ils tous à me regarder comme... Ah voilà pourquoi ! Mon regard tombe sur le bar non loin de nous qui propose, lui aussi, de quoi se rassasier. Ces passagers ne doivent certainement plus avoir fait la file à un Starbucks depuis longtemps et ont vite repéré l'intruse que je suis.

— Souhaitez-vous un café pour accompagner votre beignet ? me questionne une serveuse que je n'avais pas vu arriver.

— Oh non, mais merci quand même.

Même si elle tente de le cacher, je perçois une certaine surprise dans ses traits. Je suis à deux doigts de me demander ce que j'ai bien pu faire (encore), mais elle se met doucement à sourire avant de rejoindre son poste de travail.

— Elle ne semble pas habituée à la gentillesse des clients, me fait remarquer une voix familière.

Je lève le visage vers mon nouvel interlocuteur et souris doucement en le reconnaissant.

— Oh, bonjour Carver, le salué-je d'une voix pleine de sympathie.

Mais, au-delà du calme que je peux laisser paraître, c'est un tout autre sentiment qui essaie de se frayer un chemin : de l'enthousiasme. Ou quelque chose d'un peu plus fort peut-être.

Je suis assez contente de le voir, je dois bien l'avouer. Je ferai moins attention aux regards qu'on me lance maintenant que j'ai quelqu'un à qui parler.

Carver s'installe à mes côtés, mon sourire l'ayant suffisamment invité à me tenir compagnie. À peine a-t-il eu le temps de déboutonner sa veste, que la serveuse est déjà de retour, apparemment sous le charme de Monsieur Marsh.

Scènes Coupées | Tome ☆ : Silence ! [/en réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant