M'endormir a été une excellente idée.
Je ne préfère même pas imaginer comment j'aurais été si j'étais restée éveillée durant tout le vol. Le stress m'aurait envahie et j'aurais pu faire une crise de panique à tous les coups... Et, dans un avion, ce n'est pas franchement l'idéal. Ou alors, j'aurais ennuyé les hôtesses de l'air, fait du bruit, changé d'activité toutes les dix minutes.
En clair, j'aurais été un enfant qui va pour la première fois à l'école, ressentant à la fois deux émotions : l'excitation et l'angoisse dues à la nouveauté. L'annonce de la descente imminente de l'appareil a eu pour effet de me réveiller... et de me provoquer des crampes au ventre. J'ai accepté ce voyage sur un coup tête, surtout poussée par Lily. Maintenant que j'arrive à destination, je regrette amèrement ce choix. Mais ça, c'est tout moi : quoi qu'il puisse arriver, je finis toujours par le regretter. C'est en mettant ma ceinture que j'ai un déclic.
« Non, pas toujours ! », pensé-je.
Malgré ma tristesse, je ne regrette pas d'avoir fait face à mes parents et d'avoir enfin, pour le plus grand bonheur de Lily et surtout le mien, rompu ce lien malsain qui m'a uni à eux pendant vingt-six ans. Je n'arrive pas encore à déterminer l'impact que cela aura sur ma vie. Après tout, ça ne s'est passé qu'hier. Je suis encore dans un état second, quoiqu'un peu meurtrie par la réaction de ma famille, enfin l'inaction, devrais-je dire. Néanmoins, je vais enfin réussir à guérir mes blessures et à me construire sans leur influence néfaste.
C'est désormais clair et j'ose enfin me l'avouer : j'ai été un accident pour eux. Ils ne m'ont jamais souhaitée et, inconsciemment, je suis devenue l'exact opposé de Candice, leur fille tant adorée, qui a réussi économiquement et socialement.
Je tourne la tête vers le hublot, encore en proie à mes démons. Je ne dois plus y penser. Si j'ai fait face à mes parents, c'est pour éviter de me torturer mentalement. J'ai fait ça pour pouvoir avancer, pour pouvoir être heureuse. Désormais, je ne vais plus entendre leurs remarques cinglantes sur ce que je porte ou les énièmes éloges au sujet de Candice. Ce temps-là est révolu et je compte bien revenir changée de mon voyage à Los Angeles.
Apercevoir le territoire américain à travers la fenêtre arrive bizarrement à m'apaiser. Jamais, ô grand jamais, je n'aurais pu imaginer que je vivrais une telle situation. J'entends par là, m'envoler pour un autre continent. Bien que la partie « être invitée par un acteur très célèbre » est également assez... incroyable, dans son genre en tout cas. Je sais que j'aurais pu en faire jalouser plus d'une, mais je n'arrive pas à mettre Jake sur un piédestal. C'est probablement mon rapport avec l'argent (merci mes parents), qui fait ça.
Je n'ai pas pour principe de juger quelqu'un en fonction de son compte en banque, mais j'ai eu l'opportunité, bien malgré moi, de côtoyer les personnes de la « haute société » des Midlands de l'Ouest. Autant dire que cette expérience m'a coupé l'envie de me marier avec un haut fonctionnaire, et cela dès mon plus jeune âge.
Je pense que c'est ce qui peut expliquer, en partie, ma réaction lorsque Jake est apparu sur le seuil de mon appartement. Il ne s'est sûrement pas attendu à une telle attitude de ma part, lui qui est adulé par des milliers (ou plutôt des millions) de jeunes filles et femmes. Repenser à cette rencontre me fait rire ! Que la situation a été des plus surprenantes...
Plus nous descendons et plus mon cœur tambourine dans ma poitrine. Depuis toujours, j'essaie d'éviter les circonstances dans lesquelles je ne suis pas en position de force. Celles qui peuvent tourner au cauchemar et où je n'ai pas de sortie de secours. Pourtant, je me suis jetée la tête la première dans cette aventure des plus surréalistes. Si je n'avais pas une assez bonne maîtrise de moi, une crise d'angoisse aurait très bien pu se déclencher à l'instant et j'aurais eu des difficultés à respirer. Mais, lorsque les roues touchent l'asphalte, je suis surprise d'être totalement calme... Enfin, peut-être pas « calme ». Disons plutôt terrifiée intérieurement et sereine extérieurement. Lily, quant à elle, aurait été plutôt excitée. Nous nous complétons bien, elle et moi, et j'ai hâte de retourner en Angleterre pour lui raconter tout mon séjour dans les moindres détails. Mais pour avoir quelque chose à raconter, il faut en premier sortir de l'avion, ce que je suis la dernière à faire.
VOUS LISEZ
Scènes Coupées | Tome ☆ : Silence ! [/en réécriture]
Roman d'amour"Je crois que même si une Abigail du futur m'était apparue et m'avait raconté tout ce que j'allais vivre dans les prochains mois, je ne l'aurais certainement pas crue. Après tout, comment aurais-je pu ? Tout ce qui s'est passé et se passe en ce mome...