Dans les songes de Kaelia [Terminé]

Chapitre 32 : Le règne de la terreur

Tout à l'heure, quand Sophia m'a dit qu'on se rendait à leur quartier général, où se trouveraient sans doute leur chef et son mari, je ne m'attendais pas à aller dans un endroit pareil. Les lieux ressemblent plus à une usine désaffectée qu'à un siège abritant leur organisation secrète. Au moins, personne ne va penser les rechercher dans un site comme celui-ci.

Une odeur de chien mouillé et de moisissure règne en maître, à croire que les bactéries sont les seules à séjourner entre ces murs. L'envie de rendre mon déjeuner m'a traversé l'esprit à plusieurs reprises.

En contemplant le peu de choses se trouvant dans le bâtiment, je ne prête pas attention à là où je mets les pieds, et malencontreusement, je heurte un amoncellement de tonneaux. Celui en haut de la pile vient s'écraser violemment au sol, et provoque, dans sa chute, un son à réveiller les morts.

— Oups, murmuré-je à l'intention de la mère d'Amaël, qui se retourne vers moi avec le regard noir.

— Fais attention. Le moindre bruit pourrait nous faire repérer !

Je hoche la tête et continue de la suivre jusqu'à ce que l'on arrive devant une vieille porte en métal. Sophia entre la première et une voix agacée, qui m'est familière, parvient à mon oreille. Amaël a l'air sur les nerfs et bizarrement cette image de lui me plaît bien. Quand Sophia me fait signe de me montrer, je passe à travers l'ouverture et aperçois celui, qui a hanté mes nuits durant quelques semaines, ainsi que deux autres personnes bien plus âgées, dont l'un, qui est sans aucun doute le père d'Amaël, au vu des traits de son visage.

Le jeune homme se trouvant devant les deux autres me regarde avec un air surpris. Il ne devait pas s'attendre à me revoir sur sa planète. Je ne peux pas m'empêcher de lui sourire en retour. Je suis un peu troublée de me retrouver ici, comme étant le centre d'attention de tout le monde présent dans cette vaste pièce.

Amaël reprend aussitôt son attitude sûre de lui et demande à sa mère d'une voix autoritaire de fermer la porte, sans jamais rompre notre contact visuel. Il n'a pas le temps de m'adresser la parole, que l'homme aux cheveux gris me regarde et me parle.

— Tu es le portrait craché de ta mère, Kaelia, me dit-il en venant me prendre dans ses bras.

Ce geste si soudain et affectueux me perturbe, mais pour ne pas le blesser, je lui rends son câlin. Passé ce moment d'émotions, il m'invite à m'asseoir sur un cageot de fortune près d'Amaël et de son père. Des milliers de frissons enveloppent, subitement, mon corps, comme chaque fois quand je passe à proximité de lui. Sentant son regard posé sur moi, je préfère l'éviter et me concentrer sur le vieil homme, qui m'a serré dans ses bras.

— Nous allons vous laisser faire connaissance. On a du boulot avec ton entraînement, n'est-ce pas Amaël ? déclare son père en le conduisant vers la sortie munie de leurs épées.

Savoir qu'il va me laisser toute seule avec un individu, qui m'est totalement inconnu m'angoisse. Devinant sans doute la peur, qui s'installe au sein de mon corps et de mes yeux, Sophia propose à l'aîné de rester avec moi. D'un hochement de tête, je la remercie. Je me sens plus sereine avec une figure féminine à mes côtés, à défaut de ne connaître personne.

Je ne peux m'empêcher de regarder Amaël s'éloigner. Ce dernier n'a jamais cessé de m'observer jusqu'à ce que la porte se referme, à croire qu'il est encore sous le choc de me voir. Une fois, les garçons partis dans une autre pièce du bâtiment, l'homme prend la parole avec sa voix grave.

— Je me présente, je suis Loukas, un vieil ami à tes parents. Et surtout bienvenue sur Malurn. Ta mère t'en a un peu parlé ?

Je le regarde avec de grands yeux, sidérée par la prestance qu'il dégage. Tu m'étonnes que tout le monde est à son écoute. Je lui fais signe que non, car je ne me souviens pas de ce que m'a dit Amaël et ma mère n'a fait que l'évoquer brièvement. Il poursuit alors gaiement, ravi de pouvoir raconter leur histoire.