Dans les songes de Kaelia [Terminé]

Chapitre 44 : Une simple promenade de santé

Je cours au plus vite que je peux pour lui échapper en montant les marches des escaliers deux par deux. Mon souffle est court, quant à mon cœur, j'ai l'impression que celui-ci ne va pas tarder à me lâcher si je ne ralentis pas le rythme. Malheureusement, ma petite taille par rapport à Borac et mon endurance, qui laisse à désirer, me font défaut. Il me rattrape en un rien de temps en m'empoignant le bras farouchement pour lui faire face.

— Mais tu es malade ma parole ! me crie-t-il dessus sans prendre garde que sa voix résonne contre les pierres sombres du château. Tu cherches à te faire tuer, c'est ça ?

C'est avec la peur au ventre et un rythme cardiaque effréné que je le regarde avec les yeux ronds, surprise de sa dernière phrase. Ce n'est pas lui qui cherche à me tuer plutôt en me livrant directement au roi.

— Amaël m'avait prévenu que tu étais une casse-pied, et encore je pèse mes mots, mais il ne m'avait pas dit que c'était à ce point ! s'énerve-t-il en m'agrippant plus fermement le bras pour me ramener dans la direction d'où l'on vient.

Je ne comprends rien à ce qui se passe. Il est finalement de mon côté ou non ? J'allais lui poser la question, mais celui-ci continue fou de rage.

— Tu veux vraiment mourir décapité devant toute la population de Malurn ou c'est juste une passion de faire chier le monde ?

Je le regarde alors honteuse de ma tentative de fuite ratée. Si je pouvais creuser un tunnel pour m'enfuir six pieds sous terre pour cacher mon malaise, je le ferais sans aucune once d'hésitation. Il a le don de me faire me sentir mal rien qu'en me scrutant de cette manière avec ses yeux noirs et sa voix grave à en faire trembler les murs. Il est si remonté contre moi qu'il n'arrête pas de ruminer que je suis irresponsable, inconsciente et d'autres mots peu flatteurs à mon égard. J'ai l'impression de n'être qu'une gamine écervelée pour lui.

— Pourquoi ? osé-je demander avec une toute petite voix qui sort du plus profond de ma gorge.

— Pourquoi, quoi ? m'engueule-t-il en se retournant vers moi avec son regard d'ébène.

— Pourquoi m'avoir envoyé ici dans le château du roi si ce n'est pas pour me livrer à Okrutan ?

Soudainement, sans que je le voie venir, il se frappe la tête avec sa main et se met à la tourner de gauche à droite. Face à son geste, qui veut tout dire ce qu'il pense en ce moment, le rouge me monte aux joues. Je me sens encore plus bête que tout à l'heure.

— Tu crois vraiment que j'allais te donner au roi ? Amaël me couperait les couilles si jamais quelqu'un touche, ne serait-ce qu'à un seul de tes cheveux. Je tiens à avoir une descendance !

Rien que le fait d'imaginer qu'Amaël lui enlèverait sa capacité de procréer en deux temps, trois mouvements, si jamais je ne survivrai pas, m'amuse autant que cela me perturbe. Rien que d'entendre le prénom d'Amaël me fait oublier ma gêne, qui s'était emparée de mon corps quelques secondes auparavant. Pourquoi celui qui m'agace au plus haut point tient-il à ce point à moi ? Et surtout pourquoi cela me fait-il sourire, de concevoir qu'il puisse penser à moi, à me protéger ?

— Donc, pourquoi ? demandé-je pour me sortir Amaël de l'esprit.

— Vous êtes tous les deux des casse-bonbons !

— En même temps, si tu répondais à mes questions au lieu de me fournir d'autres informations, je n'aurais pas à être chiante ! rétorqué-je un brin amusée par la situation.

— À ton avis, quel endroit va être inspecté en dernier par les gardes du roi ? Okrutan n'est pas si intelligent pour penser que tu pourrais te cacher dans sa propre demeure. Il va commencer par fouiller toutes les maisons et notamment celle d'Amaël pour te trouver, mais en aucun cas cet endroit ne lui viendra en tête. Enfin pour le moment. Et au cas où, son cerveau déciderait de fonctionner comme par enchantement, nous avons des sentinelles de notre côté qui s'occupe de la surveillance du château grâce aux fines caméras, presque imperceptibles, que tu vois ancrées au mur, dit-il en me les montrant du doigt.