Mes yeux piquent. Ma tête est lourde et mes membres sont tellement engourdis, que j'ai du mal à bouger, ne serait-ce que le bout de mes doigts. Qu'est-ce qu'il vient de se passer ?
Je tente avec difficulté de me redresser et, en me relevant, je me rends compte presque instantanément que je ne suis pas là où j'étais, il y a quelques secondes. Comment se fait-il que je sente le froid que me procure la pierre ? Comment puis-je entendre les oiseaux qui gazouillent ? Et surtout pourquoi puis-je voir, si je suis morte ? Bordel ! C'est quoi ce délire, encore !
J'observe avec stupéfaction la roche grise sculptée qui se trouve en face de moi. Mes yeux s'écarquillent de plus en plus en apercevant les lettres dorées finement apposées sur la stèle qui se dresse devant moi. Amélia Nada, décédée le 16/01/2014. Pourquoi est-ce que je suis sur la tombe de ma mère, accroupie, la tête posée sur mes bras ? Et surtout pourquoi ai-je la sensation d'une main chaude sur mon épaule ?
Pendant quelques instants qui paraissent être plusieurs heures, je n'ose plus bouger pour voir si cette sensation va finir par disparaître ou non. Malheureusement pour moi, c'est bien tout le contraire qui se passe, car la tension sur mon épaule est de plus en plus insistante. Prise de panique, je me retourne si vite que je manque de me briser les côtes avec le bout de la tombe.
Un hurlement d'angoisse ou de joie, je ne sais plus trop, sort de ma bouche surprenant la personne en face de moi. Cette dernière, les yeux écarquillés, fait un bond en arrière presque aussitôt.
— Je ne comprends pas, comment est-ce possible ? m'écris-je en lui, sautant dans les bras avec entrain.
L'homme que je croyais mort se tient devant moi, droit comme un bâton, tandis que je le serre de plus en plus fort. L'émotion que je ressens en moi est si forte que des larmes de joie s'échappent de mes yeux sans que je ne puisse les retenir. Désarçonné par mon si soudain câlin, il ne bouge pas d'un pouce. Une part de moi est un peu vexé de savoir qu'il ne me le rend pas à son tour, mais d'un autre côté cela me passe au-dessus. Avec tout ce que je viens de vivre, c'est le cadet de mes soucis.
Au bout de quelques minutes, il se dégage de mon emprise en apposant ses mains chaudes de part et d'autre de mes épaules, puis pose son regard dans le mien en m'observant comme si j'étais un extraterrestre.
— Je peux savoir ce qu'il te prend ? déclare Amaël.
Je le scrute confuse. Il est mort devant moi quelques instants plus tôt. Son sang s'est déversé jusqu'à mes genoux et il ose me demander ce qu'il m'arrive ! Mais ma parole, qu'est-ce qu'il lui arrive plutôt ?
— Je te retourne la question ! Tu viens de crever devant mes yeux, abruti ! Alors, excuse-moi d'être contente de te retrouver !
Prise d'une pulsion soudaine, je m'avance légèrement vers lui pour l'embrasser tendrement pour lui prouver à quel point il m'a manqué. La réaction de ce dernier est quasiment inexistante. Il n'est pas comme d'habitude et c'est peu dire, car il ne réagit pas du tout même. Il reste encore plus droit que tout à l'heure. Il est décidément vraiment étrange, mais je m'en fous. Je suis si contente de pouvoir le sentir à nouveau.
Après mon baiser à sens unique, qui n'a pas duré très longtemps, vu le malaise qui commence à s'installer, je me décale lentement de lui en le scrutant attentivement. J'ai comme l'impression d'observer un homme vivant, mais totalement mort à l'intérieur. Cette sensation est très étrange. Il a l'air complètement perdu dans ses pensées, ce qui ne lui ressemble pas du tout. Quelques secondes après, ses yeux bleus rencontrent les miens et je peux y lire son incompréhension.
— Alors là, il va vraiment falloir que tu m'expliques ce qu'il t'arrive ! déclare-t-il d'un ton qui se veut sec, mais je remarque aisément la pointe d'excitation dans sa voix.
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Dans les songes de Kaelia [Terminé]
RomanceEntre ses cauchemars et sa vie à l'université, Kaelia ne sait plus où donner de la tête. Toutes les nuits, c'est la même chose. La mort de sa mère vient la hanter et la soudaine apparition d'un jeune homme, autant dans ses rêves qu'à la faculté, la...