DESPITE LIES (histoire intégrale)

34 ~ 6 années et 8 mois plus tôt

Je ne savais pas comment je m'étais retrouvée là. Mais voilà les faits: j'étais bel et bien devant la porte du hangar, le poing en attente, ne sachant pas si je devais annoncer ma venue ou non. Je ne savais même pas si Matt était là ou pas. Je ne savais même pas ce que je pouvais bien lui dire. Je ne savais même pas si il voudrait me parler. Et au final, je ne savais même pas si j'avais moi-même envie de lui parler.

Mais je l'avais dans la peau.

J'inspirais. Tremblante, je frappais trois petits coups sur la porte. À peine une minute plus tard, Clay vint m'ouvrir. Il écarquilla grand les yeux en me découvrant. Oui, lui tout autant que moi, ne s'attendait pas à ce que je sois ici.

— Il n'est pas là, annonça-t'il, connaissant déjà le motif de ma venue.

Je ne pouvais pas rentrer chez moi. Je n'aurais pas encore une fois le courage de venir frapper à leur porte, je le savais très bien.

— Tant pis, dis-je. Je vais l'attendre ici.

Je n'attendis pas sa réponse et poussais légèrement plus la porte pour pouvoir entrer dans le hangar. Clay se décala. En entrant, j'entendis des grognements.

— Tu veux me tuer ou quoi? entendis-je au loin.

Je reconnus la voix de Travis résonner jusqu'à moi.

— Et il n'est pas là? Vraiment, Clay?

Je me retournais vers ce dernier qui haussa les épaules. Matt était là. 

J'arrivais dans la grande pièce qui leur faisait office de salon et découvris Matt et Travis en train de se battre à mains nues. Le spectacle était d'une violence brutale. Cela faisait une semaine que je ne les avais pas croisé. De là où je me tenais, je pouvais observer le dos nu et couvert de bleus de Matt. Travis non plus n'était pas dans un bon état, son visage était tuméfié. J'imaginais que Clay ne devait pas être mieux sous son tee-shirt.

Ce dernier se racla la gorge bruyamment ce qui arrêta le crochet du droit que Travis allait asséner à Matt. Tous deux se tournèrent vers l'origine du bruit puis me dévisagèrent. Les voir de face était encore plus effrayant. Leurs respirations étaient saccadées, leurs visages en plus d'être tuméfiés, étaient pleins de sang. Celui de Matt était même enflé sur le côté droit. Sa peau, normalement bronzée, me paraissait d'une pâleur inquiétante sous tous ses bleus et tatouages. 

Mon coeur s'arrêta lorsque son regard accrocha le mien. Il était vide, vidé. Ses bras tombèrent le long de son corps, ses genoux ployèrent et il se laissa tomber par terre. Ses yeux n'avaient pas quitté les miens.

— Matt, est-ce que ça va, mon pote? lui demanda Clay qui s'avançait déjà vers lui.

Il ne lui répondit pas. Ses yeux se fermèrent et il inspira bruyamment. Je lançais un regard à Travis qui me comprit immédiatement. Il fit un signe de tête à Clay et tous deux disparurent à l'étage.

Je m'avançais prudemment, silencieusement, la gorge serrée. Les paupières de Matt étaient toujours closes, sa tête renversée en arrière.

— Tu es dans un mauvais état, réussis-je à articuler.

Je l'entendis jurer puis il se releva d'un coup et je sursautais en sentant ses bras me serrer contre lui. Il nicha son visage dans mon cou et je frissonnais. Ça y est, j'avais l'impression d'être enfin de nouveau capable de vivre.

— Putain ce que tu m'as manqué, Zoé.

Une larme dévala le long de ma joue. Il me serra encore plus fort. Presque à me faire mal, mais la sensation était tout autre. Il décolla son visage de mon cou et me regarda, comme s'il m'inspectait. Je vis ses yeux passer de mes yeux, remonter jusqu'à mon front, descendre sur mon nez pour finir sur ma bouche. Et je crois que j'en fis de même avec lui. Seulement, ce que je constatais devait être beaucoup plus effrayant que ce qu'il voyait, lui.