A mon réveil, j'étais assise sur un siège pour le moins inconfortable et d'épaisses sangles me maintenaient immobile. Mes poignets étaient liés l'un à l'autre par des menottes en acier qui me coupaient la circulation du sang. Ma tête, comme le reste de mon corps semblait en feu. De petits éclats de verres étaient encore logés dans ma peau, mais je ne les sentais même plus, seuls mes yeux m'indiquaient qu'ils étaient toujours là. Je pris quelques instants avant de m'apercevoir que j'étais non seulement entourée d'une trentaine de soldats, mais également, à en juger par le bruit du moteur et les secousses, dans un avion. En me voyant réveillée, quelques soldats me jetèrent des regards curieux.
— Marc ! Amène une autre dose, la donz est réveillée !
Je reconnus la voix de l'un des hommes qui m'avaient poursuivie dans l'église. Il était assis juste en face de moi et me lançait un regard mauvais.
— Déjà ? C'est pas croyable, je lui en ai donnée assez pour assommer un cheval.
L'autre ricana, en observant son ami se démener pour se détacher et pour se rendre à l'avant de l'avion où étaient sûrement stockés les calmants.
— C'est vrai que tu as tué plus de cinquante Elémentaires d'un coup ? souffla ma voisine en me détaillant de la tête aux pieds.
Je pensai un instant à lui répondre, mais mon attention fut captée par l'un des hommes qui me faisait face. Contrairement aux autres, il ne portait pas l'uniforme vert des soldats. Il portait une cuirasse noire qui s'arrêtait à ses épaules, laissant ses bras totalement nus à l'exception d'un appareil fixé à son poignet. Son pantalon noir semblait également renforcé par endroits par des plaques en métal de la même couleur. Il tenait deux épées de la taille d'un bras, à l'horizontal, sur ses genoux et était manifestement occupé à les laver du sang qui les maculait avant que je ne me réveille. Il était évident que cet homme-là était d'un grade bien supérieur aux autres ou du moins qu'il avait davantage d'expérience au combat. Il dégageait quelque chose de différent, un relent de son pouvoir peut-être ? Quelque chose qui dictait à mon instinct que ce type, était dangereux. Pourtant il était jeune comparé à certains soldats, dont ceux qui m'avaient capturée. À peine quelques années de plus que moi, entre vingt-deux ans et vingt-cinq ans, pas plus. Pas vraiment l'âge d'un vétéran donc. Je devais déjà le dévisager depuis un moment lorsque agacé, il releva les yeux et les plongea dans les miens. Là seulement, je le reconnus : c'était l'homme que j'avais croisé à la sortie du bar, le fameux « supérieur » désagréable.
Ses cheveux étaient ébouriffés et ses yeux gris me dévisageaient avec une curiosité glaciale. Son visage était comme taillé dans le roc, parsemé d'une fine barbe qui lui donnait un air encore plus sévère que la veille. Sans trop savoir quoi, je lui trouvai quelque chose de magnétique, bien qu'il m'inspirait également une certaine méfiance. Il me fixait comme un prédateur fixe sa proie avant de l'abattre. Les muscles tendus, à l'affût, prêt à sauter à la gorge du premier ennemi qu'il verrait. Un peu plus loin dans l'avion, d'autres portaient la même tenue, mais ils étaient avachis, détendus et s'échangeaient quelques blagues en me jetant de temps en temps un regard. Je voulais bien croire que je faisais tâche dans le décor comparée à eux et à leurs tenues impeccables, mais ça restait assez gênant. À croire que j'étais la seule ici à avoir vécu l'attaque de Paris, hormis cet homme bien sûr, dont les lames étaient encore couvertes du sang des Elémentaires. Je reconnus rapidement le dénommé Nao assis en compagnie des autres membres de son groupe.
— Sale journée hein ? lâcha-t-il avec un sourire amusé.
Je n'eus pas le temps de lui répondre qu'une seringue se planta sauvagement dans mon bras. Cette fois-ci la douleur passa inaperçu au milieu du puit de souffrance qu'était désormais mon corps, mais je ressentis presque aussitôt ses effets et sombra une nouvelle fois sans avoir pu résister plus de quelques secondes.
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Aloys (Tome 1) : lightning and shadow
Science FictionLa guerre est arrivée de nulle part, sans qu'on puisse l'empêcher. Les Elémentaires ont traversé leurs immenses portails luminescents avec un seul objectif : tout ravager sur leur chemin, détruisant jusqu'à la plus faible lueur d'espoir. Ils ne sont...