D'instinct, je me dirigeai vers le parking où se trouvaient les six captifs. Avec un peu de chance Swann serait partie et je pourrais leur demander des explications. Malheureusement, j'avais à peine atteint la ruelle que je compris que les explications ne viendraient pas cette nuit. Une dizaine de soldats se dirigeaient dans la même direction, bloquant le passage, et je doutai que les Elémentaires acceptent de me répondre devant autant de gens.
Frustrée, je me pivotai en direction de la plage et longeai la mer, pensive. L'Elémentaire avait dit que je comprendrais pourquoi je me battais dans le mauvais camp, pourtant, même si j'en avais toujours été persuadée, je ne voyais pas en quoi cette pierre était censée me faire réaliser quoi que ce soit. L'ANH était une armée de voleurs ? Pourquoi pas oui, et aussi une armée de meurtriers et d'oppresseurs, mais ça je le savais déjà. Le vol d'une pierre à un peuple venu d'un autre monde ne paraissait pas franchement plus grave que ce qu'ils avaient fait à leur propre peuple. Il fallait que je trouve un moyen de lui parler de nouveau. Il fallait qu'il m'explique ce qu'il entendait par là.
Après une petite demi-heure de marche je m'aperçus que les lumières de la ville ne formaient plus qu'une ligne à l'horizon. Personne n'était venu m'arrêter, personne ne m'avait suivi. Peut-être me suffisait-il de continuer mon chemin... Pourtant encore une fois, je fus incapable de m'y résoudre. Cette fois-ci, ce n'était pas tant la peur qui me clouait sur place, mais plutôt une envie tenace de découvrir le sens de cette histoire. Ces créatures ne s'étaient jamais adressées à personne et pourtant à moi, elles m'avaient parlé. Je ne pouvais pas simplement les ignorer et continuer mon chemin.
Fatiguée, je m'allongeai sur le sol, savourant la caresse du sable froid sur ma peau et fermai les yeux. Bercée par le bruit régulier des vagues, il ne me fallut pas longtemps avant de trouver cet état à demi-endormie qui précède le sommeil. Alors que je m'apprêtai à sombrer pour de bon, j'entendis des bruits de pas et me redressai d'un bond. Soen approchait en progressant maladroitement dans le sable. Son corps massif cachait à lui seul une grande partie des lumières de la ville.
— Qu'est-ce que tu fiches ici ? demandai-je, surprise.
— Je pourrais te poser la même question, rétorqua-t-il. Tu essayais d'aller quelque part ?
— Oui, dans un coin tranquille où je pourrais être seule, mais visiblement ça ne risque pas d'arriver. Comment tu m'as trouvée ?
— Aaron a vu que ton traceur s'écartait de la ville, il m'a demandé de vérifier que ça allait.
Je tiquai, agacée d'avoir eu raison. Il y avait bien une puce qui leur permettait de me suivre à la trace. Je détournai le regard, afin d'éviter que Soen ne remarque ma frustration, puis je tentai de répondre avec détachement :
— Et pourquoi ça n'irait pas ?
— Peut-être que tu culpabilises d'avoir désobéi aux ordres, même si je me doute qu'il y a peu de chance que ce soit le cas, proposa-t-il en s'asseyant lourdement à côté de moi.
Ne sachant pas trop quoi répondre de peur de me trahir, je me contentai de le dévisager en cachant ma surprise. Comment pouvait-il déjà être au courant ? À moins qu'il ne soit en train de parler de ce qu'il s'était passé sur la plage.
— Ce truc dégage beaucoup d'énergie, Aaron l'a senti à l'instant où tu as ouvert cette boîte. Il s'est douté que c'était toi, et il a vérifié ta position. Evidemment il avait raison. Alors tu es satisfaite ? demanda-t-il en soupirant.
— S'il est au courant, pourquoi c'est toi qu'il envoie ? Il n'est pas censé me passer un savon, ou quelque chose du genre ?
— J'imagine qu'il voulait te laisser un peu d'espace, dit-il en me lançant un regard de travers. Et puis, de toute manière, ça n'a pas une grande importance, ce n'est pas parce que tu as vu cette chose que tu sais ce que s'est.
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Aloys (Tome 1) : lightning and shadow
Science FictionLa guerre est arrivée de nulle part, sans qu'on puisse l'empêcher. Les Elémentaires ont traversé leurs immenses portails luminescents avec un seul objectif : tout ravager sur leur chemin, détruisant jusqu'à la plus faible lueur d'espoir. Ils ne sont...