Chapitre 31

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Derrière les buissons, j'arrive à distinguer une entrée qui n'a pas encore l'air assiégée. Avec un peu de discrétion, je pense pouvoir m'y glisser assez facilement. Si je l'ai oublié, c'est certainement au troisième, chez la vielle dame qui nous a accueilli, cela m'étonnerait de l'avoir perdue autre part. Et puis même je me rappelle avoir posé mon bracelet et ma bague, or j'ai récupéré cette dernière. J'attends le moment opportun et me glisse jusqu'à la porte. Lorsque je m'apprête à rentrer, je vois une petite fille, elle doit avoir quoi, 4-5 ans ? Je vois de grosses larmes couler sur ses joues, avant qu'elle ne fasse un pas de plus, je bloque son petit corps frêle de mon bras.

« -Hey ! Salut ma jolie, qu'est-ce qui ne va pas ? Essayais je de demander le plus bas possible. Elle me répond entre deux sanglots:
-Mon papa et ma maman...ils sont partis..et..et...
-Chut, ça va aller d'accord on va les retrouver. Tu viens avec moi ?
-D'accord. »

J'ai la gorge nouée. Les larmes montent à une vitesse surhumaine. Je ne pourrais pas l'aider. Je n'ai aucun doute sur les pratiques du gouvernement et si ses parents sont sortis, ils ne sont certainement plus de ce monde. Cette gamine à 5 ans putain ! 5 ans et elle se retrouve orpheline à cause de ce gouvernement de merde. Je la ferai sortir d'ici, peu importe ce qu'il m'en coûte.
On dirait que les soldats n'ont pas encore envahi l'immeuble ce qui me laisse le champ libre pour me faufiler au troisième sans encombres. La porte de l'appartement est ouverte, la dame a du s'enfuir prise de panique, malheureusement, cela m'étonnerait qu'elle soit encore en vie. Je me glisse dans l'appartement la gamine à mon bras, je l'aperçois, posé sur la table de l'entrée à côté d'un cadre photo d'un petit couple qui semble heureux; bien avant que cette foutue guerre n'ai commencé. Les soldats ont dû mettre le feu au bâtiment puisque lorsque nous essayons de sortir, un nuage de fumé nous barre la route. Très bien, dans ce cas, nous sortirons par la fenêtre. Le troisième étage doit être à peut être 6 voir 7 mètres du sol. Pour moi ça devrait aller en revanche pour la fillette...c'est alors que je vois des silhouettes s'avancer en direction des immeubles en feu. Parmi elles, une que je connais trop bien, Lucas et mes amis s'approche en courant de nous.

« -Eh ! Lucas en haut ! »

Je vois le petit groupe levé la tête. Je leur montre la petite et ils comprennent rapidement que je cherche à l'évacuer aussi, mais lorsque je m'apprête à la faire passer par la fenêtre, réceptionnée par Alan et Lucas, la charpente s'effondre nous barrant le chemin. On ne distingue plus rien à travers les flammes et la fumée. Tout ce que j'entends c'est la voix étouffée de la petite fille

« -Maman ! Papa ! »

Inconsciemment je me met à pleurer. Pourquoi le gouvernement doit en arriver jusque là ?! Ne voit-il pas qu'il ne cause que misère et chaos ? Tuant sans cesse des innocents, arrachant à des parents leurs enfants tant chéris et à ses gosses les seules figures parentales dont ils disposent ? Putain pourquoi ?! J'entends l'echo de la voix de Lucas qui me crie à la fenêtre, malheureusement je n'arrive pas à l'entendre avec les cris de la petite fille et le boucan qui règne à l'intérieur de l'appartement. Il faut absolument que l'on trouve un moyen de sortir, la gamine commence à suffoquer, si nous restons ici une seconde de plus elle ne tardera pas à lâcher et moi non plus. Un chemin se fraye à travers les grandes flames jusqu'à la porte, on y arrive avec difficultés mais nous avons enfin pu sortir de l'appartement. Soudain des bruits de craquements retentissent derrière nous, je me retourne et fais face à un soldat, l'arme braquée sur la fillette qui n'arrête plus de pleurer. Une seconde plus tard, sans que je ne l'ai vu venir, le soldat est à terre, un trou béant dans la poitrine. Derrière lui, Lucas, rouge et transpirant.

« -Qu'est-ce que tu fous ?
-On a vu la fenêtre s'effondrer, Alan, Kyle et Lou sont en bas au cas tu aurais besoin d'eux pour évacuer la.. »

Je la vois, étendue sur le sol, avant de mourir le soldat a du la toucher. Ses jolis yeux bleus sont encore grands ouverts. Je les fermes le plus délicatement possible, elle ne méritait pas. Aucun ne méritait. Personne ni même les plus grands criminels.

« -Em..il faut qu'on se barre ok ? On va passer pas les escaliers d'accord, les soldats étaient en train de faire le tour de l'immeuble, c'est louche ils ne sont même pas entrés, je le sens pas.
-D'accord...je..ne te suis. »

Les larmes sont séchées presque immédiatement tellement la chaleur est immense. Lucas m'attrape par la main avant de dévaler les escaliers quatre à quatre, je ressens une douleur lancinante dans ma jambe. J'y jette un coup d'œil, et vois le sang couler à flots. En plus d'avoir touché la fille, il ne m'a pas manqué. J'ai encore plus de mal à marcher maintenant, Lucas me tirant un peu plus fort. Je respire tellement de fumée que je sens que mes poumons s'affaiblissent. Nous voilà sortis, pourtant plus un seul soldat à l'horizon. C'est alors que j'en aperçois une, cachée derrière un des arbres, elle clignote, de plus en plus rapidement, avant d'exploser avec les autres.
On doit s'enfuir. On doit partir si on veut avoir ne serait-ce qu'une infime chance de survivre. Mais Lucas qui me tirait jusqu'à présent ne me suis plus. Il est resté planté devant la porte, immobile, je le vois de dos face aux bombes qui se déclenchent les une après les autres.

« - Cours putain ! » j'ai l'impression qu'il ne m'entend pas, il reste figé comme cette maison qui durant la tempête brave vents et marées restant la seule encore debout à la fin...
Pourtant il se retourne les yeux embués rougis par la fumée, la fatigue ou bien les pleurs et me souris. Il me souris encore et encore. Il n'y a plus que nous, les immeubles qui s'effondrent dans le boucan ne semblent plus qu'à un doux vent  d'automne. La douleur à ma jambe me ramène à l'atroce réalité quelques instants après. « Pourquoi tu ne bouges pas ? ». Mais c'est trop tard de toute façon....On est déjà tous condamnés.

Je me réveille difficilement de la longue sieste que je viens de faire. A peine me réveillais je que il est planté là au bout de mon nez, le petit papier du capitaine. Il est toujours là pour m'embêter, je ne peux plus passer un moment sans que tout se ramène à lui. Est-ce que j'ai vraiment envie d'y aller ? Je regarde la pendule, 20h. Quoi ?! J'ai dormi si longtemps ? J'ai même loupé le dîner. Ce n'est pas l'envie qui me pousse à y aller, mais je dois lui parler que ça me plaise ou non. Tout d'abord il faut absolument que je remette les choses au clair entre lui et moi, puis j'ai deux trois questions à lui poser. Je me lève de mon lit avant de m'habiller et pars en direction du bureau, j'aurais une heure d'avance temps pis, avec la discussion mouvementée qui s'annonce, une heure de plus ne sera pas de refus.

Nous survivrons..Où les histoires vivent. Découvrez maintenant