Attends-moi [Terminé]

Chapitre 9

Les sens en alerte, Lauren buvait un café au Starbucks. Elle espérait apercevoir le pompier tatoué en fin d'après-midi. Les clients se bousculaient pour s'abreuver, mais aucun, hélas, ne ressemblait à Hunter. Autour d'elle, la majorité des tables se composaient d'adolescents en rut. Leurs débats passionnés ne laissaient pas la place au doute : le sexe envahissait leur esprit. Tout comme les dernières publications Snapchat...

Lauren se considérait en marge de la société. Elle n'utilisait que Facebook, ne passait pas son temps à photographier ses plats au restaurant et ne cherchait pas à véhiculer une image d'elle-même. Elle préférait vivre au jour le jour en savourant les petits rien. Peut-être que le handicap de sa pauvre mère n'y était pas étranger. Incapable de bouger depuis une dizaine d'années, elle restait dans son lit, sous l'assistance d'une aide à domicile. Lauren avait assisté à cette fameuse chute dans l'escalier. Un accident domestique bénin pouvait conditionner le futur d'une personne. Cette leçon de vie l'avait beaucoup changé. Grâce à elle, Lauren souriait sans détour, exprimait ses pensées et profitait de la vie.

— Je peux m'installer ?

La jeune femme releva son visage. Elle considéra son interlocuteur avec un espoir certain. À l'idée que Hunter l'aborde et s'invite à sa table, elle s'en réjouissait ! Seulement, le rêve prit fin au moment où elle se rendit compte qu'il ne s'agissait que d'un vulgaire client, occupé depuis dix minutes à la reluquer de la tête aux pieds.

Mais, comment ignorer cette belle créature ? Elle ne passait pas inaperçue chaque fois qu'elle franchissait la porte d'un établissement. Sa crinière de feu lui valait des regards admiratifs. Et ce visage... ! Ce contraste entre ses cheveux et ses yeux couleur émeraude, sa peau de porcelaine laissait pantois. Pourquoi Hunter n'y succombait-il pas ?

— Non, merci.

L'homme s'offusqua un tantinet. Il insista en tirant la chaise vers lui. Lauren l'arrêta d'un geste de la main.

— Pas la peine, j'attends quelqu'un.

Qui attendait-elle, au juste ? Un pompier complètement indifférent ? Cette idée lui fit l'effet d'une gifle. En un instant, ses épaules se voutèrent et elle se maudit d'avoir cru en lui. Pourtant, une part d'elle se bornait à espérer qu'il changerait d'avis. Pour quel motif ? Était-elle déjà éperdument amoureuse comme une adolescente à la simple évocation de son nom ? Pas vraiment, mais...

Il lui plaisait... beaucoup.

La persévérance de l'individu l'exaspéra au plus haut point. Elle n'avait jamais supporté ces hommes qui n'hésitaient pas à s'imposer. Une femme ne représentait qu'un nom, un numéro, ou un fessier... Malgré toute la volonté du monde, elle peinait à ne pas être une de ces militantes féministes, prête à bondir sur le premier pervers. Avec son joli minois, elle s'exposait quotidiennement à ce genre de mâles. Pourtant, n'était-ce pas l'un de ses hommes qu'elle convoitait ? Un profond égoïste, macho et assoiffé de luxure ? Dépitée, Lauren enfila son manteau, porta son sac à main à son épaule puis quitta l'établissement.

* * *

Au dortoir de l'unité six, Hunter s'avachit sur sa couchette avec un air las après une mission particulièrement difficile. Ce lit minable possédait autant de lattes qu'un vieux joint terminé. Le pompier se couvrit d'une couverture puis tenta de fermer les yeux. Les grincements du matelas, usé par le temps, parvinrent à ses oreilles et achevèrent d'augmenter sa mauvaise humeur. Décidément, rien n'allait ! Devait-il commencer par le début ? Son ex-femme, ses parents, sa sœur, ce boulot minable, ce lit pourri ! Il en avait plus qu'assez. Hunter se retourna dans tous les sens. Où se cachaient ses collègues ? S'entraînaient-ils comme des malades alors que la nuit envahissait la ville ? Pourquoi prenaient-ils tant à cœur ce boulot ?