3/ La proposition

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De retour dans mon quotidien, je me surpris à beaucoup penser à Lola. Ses grands yeux verts me hantaient. Je repensais à leur couleur si étonnante, mais également à leur façon de se plisser quand elle souriait et à leur éclat espiègle qui les rendaient tellement fascinants. Allongé dans mon lit, je repensais à sa bouche, à ses lèvres pulpeuses... Je crevais d'envie de les embrasser, de les sentir parcourir mon corps, engloutir mon sexe. J'imaginais son corps nu, offert, allongé sur le ventre. Puis je l'imaginais relevant les fesses, en repliant ses jambes sur son ventre, creusant le dos pour  offrir son cul à mes caresses, à ma queue....
Je ramenais mes pensées au présent en soupirant.
Mais ici et maintenant, ce n'était pas Lola qui était assoupie à mes côtés. C'était Coralie, une de mes amies. On se voyait plus ou moins régulièrement depuis 5 mois. Justement, elle était venue me dire que c'était la dernière fois qu'on couchait ensemble. Elle avait rencontré un homme avec lequel elle souhaitait construire une histoire. J'en étais sincèrement heureux pour elle, et le lui avais dit.
Nous avions baisé pendant des heures, insatiablement. C'était notre dernière fois, elle devait être mémorable. Elle était une bonne amante, suçait comme une déesse et n'avait que peu de tabous. J'avais joui, plusieurs fois, elle aussi, je me sentais vidé, épuisé. Et pourtant, je pensais à Lola et à son corps...
Il fallait que je la revoie.
Mais peut-être qu'elle n'accepterait pas mes règles du jeu.
D'après ce que j'avais compris, elle cherchait un compagnon... Voire un homme à présenter à Papa-Maman qui lui offrirait le mariage et plein de merveilleux enfants. Une chose était sure, je ne cadrais pas avec cette image idyllique de la famille. Mais en attendant de trouver le fameux prince charmant, peut-être que s'amuser avec moi était envisageable. Après tout, elle n'avait que 25 ans, elle avait le temps de devenir sérieuse et de fonder une famille avec un homme respectable.
Et puis, qui ne tente rien n'a rien !
Du coup, le lendemain, je l'appelai et elle accepta de faire une balade en roller en ma compagnie le samedi suivant. J'avais vraiment envie de la revoir et puis je voulais tâter le terrain...à défaut d'autre chose. Après tout, peut-être qu'un plan cul lui ferait du bien au lieu de se torturer à cause de l'infidélité des mecs !

On avait convenu de se retrouver sur la Place de la Bourse, en milieu de matinée. J'étais arrivé un peu en avance. Il faisait beau et les rues se remplissaient déjà des promeneurs.
Les quais qui longeaient la Garonne étaient très agréables pour se promener et idéaux pour faire du roller ou du skate, à condition d'y aller de bonne heure. Après, la foule empêchait d'en profiter pleinement.
Je n'eus pas à attendre longtemps.
Quand je l'aperçus, mon cœur fit des siennes.
Putain, qu'est ce qu'elle est belle !
Elle portait un long legging noir moulant et un sweat blanc. Ses longs cheveux étaient rassemblés en une queue de cheval haute. Elle avait des tennis et tenait ses rollers à la main. En s'approchant, je remarquai qu'elle n'était pas maquillée.
En somme, elle avait une tenue de sport normale, elle n'avait pas cherché à se mettre en valeur. La déception gâcha un peu cette arrivée.  J'aurais aimé qu'elle se pomponne pour moi, qu'elle cherche à me séduire, cela aurait prouvé que je l'intéressais. Au lieu de cela, elle avait opté pour un look sportif et naturel, sans fioriture. Et pourtant, je la trouvais terriblement sexy.
Elle me fit la bise et enchaîna :
-Salut, on y va ?
-C'est parti.
Une fois, sur la promenade, elle chaussa ses rollers. J'avais pris mon skate. J'adorais faire du skate,  ça me rappelait un peu les sensations du surf.
Tout en nous baladant, on discutait, de tout de rien, c'était agréable.
On arrivait au niveau des aires de glisse. La mairie avait fait installer des parcours avec des bosses plus ou moins hautes, des tremplins, des rampes. Les jeunes aimaient bien y trainer, s'amuser à se défier en vélo, skate ou roller. Lola s'adressa à moi, un sourire aux lèvres :
-Tu sais faire des figures ?
-J'me débrouille, tu veux voir ?
-Ouais, carrément !
A cette heure ci, le terrain était encore calme. Les ados ne débarqueraient que bien plus tard, dans l'après-midi.
Je m'élançai et fis quelques figures simples. En revenant près de Lola, elle avait un grand sourire.
-Hey, mais t'es doué !
-Merci. Tu veux essayer ?
Elle s'élança à son tour mais n'avait pas l'habitude et chuta. Je m'approchai d'elle et l'aidai à se relever.
-Tu te débrouilles bien, tu recommences ?
-Non, t'es gentil mais je ne suis pas douée pour les cascades ! Je préfère te regarder, tu veux bien ?
Et comment que je veux !
J'avais passé toute mon adolescence à faire du skate, du surf, du snowboard. Sans être un champion, mon aisance impressionnait toujours....surtout les filles.
Après avoir effectué une belle série de figure et avoir réussi de beaux enchainements qui m'avaient valu des applaudissements, je commençai à chuter de plus en plus souvent. Il valait mieux arrêter, j'étais cuit. Je revins vers Lola. Elle me regardait un sourire amusé et admiratif aux lèvres.
- Quand c'est toi qui t'élances, on dirait que c'est facile... J'aime bien te regarder faire le malin.
-J'aime bien faire le malin pour toi.
Elle rougit légèrement.
Elle était plus à l'aise avec moi, moins sur la défensive. Et je commençais à penser qu'il était éventuellement possible que je lui plaise.
Néanmoins, elle gardait une certaine réserve, un soupçon de timidité. Elle maintenait une distance entre nous comme pour pouvoir fuir en cas de danger, comme ces gazelles dans la savane qui savent pertinemment que le lion est caché derrière les fourrés et qui, au moindre mouvement suspect, s'échappent laissant le prédateur sur sa faim.
-On reprend la ballade ? proposa-t-elle.
Elle s'éloigna. Je la suivais de près. J'avais une vue superbe sur son cul. Il était parfait, ni trop gros, ni trop menu, idéalement galbé. A trop le contempler, un début d'érection se fit sentir. Elle ralentit l'allure et me laissa la rattraper.
-Il est presque midi, t'as pas faim ? me demanda-t-elle.
-Un peu oui.
-Je connais un bar à nouilles thaï, t'es partant ? C'est rue St Rémi.
-Ca marche.
On fit demi-tour. Le trajet était silencieux sans être pesant. J'étais bien avec elle et j'avais l'impression qu'elle aussi aimait ma compagnie.
Elle remit ses chaussures pour rejoindre la rue et je descendis de mon skate.
Comme toujours, le petit restaurant était bondé. On décidait d'emporter nos plats et de les manger sur les bancs de la Place de la Bourse.
Depuis que ce quartier avait été réaménagé, il était très agréable. Les rues commerçantes étaient calmes et essentiellement piétonnes. Seul le boulevard qui longeait les quais étaient remplis de voitures.
On s'installa à califourchon sur un banc pour se faire face. Il faisait relativement doux en ce début février, le soleil nous chauffait agréablement.
On mangeait nos plats dans des box en cartons avec des baguettes et elle était bien plus habile que moi. Cela la fit rire de voir que je m'en mettais partout, me battant pour arriver à attraper la nourriture. Même si elle se moquait de moi, je riais aussi. C'était bon de la voir détendue, souriante.
Ayant retroussé mes manches, elle remarqua un de mes tatouages sur la tranche de l'avant bras gauche. Il s'agissait d'une inscription en basque avec une vague  en dessous et de l'écume tout autour.
-Qu'est ce que ça veut dire ?
-La mer te libère... Tu aimes les tatouages?
-J'adore.
-Tu en as ? demandai-je, curieux.
-Un, dans le dos. T'en as d'autres ?
Je remontais la jambe de mon jean dévoilant une pin-up stylisée sensuelle mais pas vulgaire avec une planche de surf derrière elle sur le profil de mon mollet. Tous mes tatouages étaient faits en nuances de noirs, sans couleur sauf des touches de blancs pour la vague et le rouge aux lèvres de la naïade.
-Ils sont sympas, le tatoueur est bon, jugea-t-elle.
-Et le tien, je pourrais le voir ?
-Il faudrait que je me déshabille, il est grand...Peut-être une autre fois.
-Qu'est ce qu'il représente ? insistai-je.
-La force et la sagesse... fit-elle avec un sourire énigmatique.
Je recommençais à me battre avec mes baguettes me barbouillant de sauce quand soudain, elle prit sa serviette et tendit la main pour essuyer mon menton.
-T'en as partout ! dit-elle en riant.
Je ne bougeai plus et la laissai faire. Elle était craquante à s'occuper de moi comme ça et je ne voulais surtout pas rompre la douceur et la complicité de ce moment. J'esquissai malgré moi un petit sourire en coin. Elle sembla prendre conscience de son geste et arrêta.
-Désolée, s'excusa-t-elle, gênée.
-Ne le sois pas, j'aime bien quand tu es toute douce comme ça avec moi.
Elle baissa les yeux et sans oser affronter mon regard, ajouta :
-Matt...écoute... T'es pas un mec pour moi.
Bim, mange toi ça !
J'encaissai et contrattaquai :
-Qu'est ce qui te le fait penser ?
-Parce qu'on ne recherche pas la même chose !
-Ca dépend... C'est sûr, j'suis pas romantique... Le prince charmant, clairement, ce n'est pas moi. J'ai bien compris que t'en avais marre des mecs infidèles, qui trompent leur nana à tout va. Mais ce n'est pas ce genre de relation que je te propose.
Elle m'écoutait, ne disait rien, j'enchainai :
-Si tu faisais une pause dans ta vie amoureuse, juste pour t'amuser, sans prise de tête ?
- Tu parles d'un plan cul, c'est ça ?
-Et pourquoi pas ? Je te propose du plaisir, rien que du plaisir. Pas de prise de tête, pas de jalousie.
Elle réfléchissait, pesait le pour et le contre. Elle ajouta à voix basse, plus pour elle-même :
-Du sexe pour du sexe...je ne sais pas si je pourrais. T'es un si bon coup que ça ? ajouta-t-elle l'air mutin.
-Pour savoir, faut m'essayer ! rétorquai-je avec mon plus beau sourire.
-Laisse-moi y penser, OK ? conclut-elle après un bref silence.
Au moins, elle n'avait pas dit non ! Elle n'avait pas tout rejeté en bloc. Elle semblait même intéressée.
Le repas se poursuivit plus calmement, on aborda des sujets moins intimes. Puis, en milieu d'après midi, nous nous séparâmes, rejoignant tous deux nos appartements.

Les yeux de Lola Où les histoires vivent. Découvrez maintenant