10] Murs

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Oxelle est en maillot de bain, enveloppée dans sa serviette de plage, tongs à ses pieds et sac sur l'épaule. Elle passe la porte de derrière et monte la première marche de l'escalier lorsqu'une voix l'arrête:

-Vous ne devriez pas vous promener dans cette tenue.

Elle se retourne et se retrouve face à Honoré.

-Pardon?
-Ce n'est pas convenable. Mère ne serait pas d'accord.

Oxelle n'en revient pas. Comment un gamin de dix-neuf ose lui parler sur ce ton, la sermonner comme une enfant. Elle a déjà eu du mal à supporter le comportement de sa mère, alors il est hors de question qu'elle se soumette gentiment au bon vouloir de ce petit con.

Elle descend la seule marche qu'elle a monté et s'approche de lui pour bien lui montrer qu'il aura beau la regarder avec autant de noirceur dans ses yeux qu'il le voudra, elle n'aura pas peur de lui.
Il est pourtant bien plus grand qu'elle, et physiquement impressionnant, comme d'ailleurs tous ses autres frères et son père.

-Excuse-moi mais je ne me souviens pas t'avoir demandé ton avis sur les tenues que je peux ou non porter.
-C'est n'était qu'un conseil...
-Et bien tu peux le reprendre.

Il la regarde une seconde de haut en bas avec un air de supériorité qui exaspère tout particulièrement la jeune femme puis revient à son visage:

-Profitez. Les vacances seront bientôt terminées.
-Ne t'en fais pas, j'ai l'intention de profiter comme il se doit de cette semaine.
-Je n'en doute pas...
-Bonne journée alors Honoré...

Elle détache chaque syllabe de son prénom, un sourcil dressé de défit et après un instant et un dernier regard, il finit enfin par quitter la pièce.

Oxelle inspire enfin, réalisant qu'elle retenait sa respiration.
Elle garde quelques secondes les yeux rivés sur la porte qu'il a franchit puis monte les escaliers. Elle va dans sa chambre et prend soin de refermer à clef derrière elle alors qu'elle ne sait même pas vraiment elle-même pourquoi.
Elle laisse tomber sa serviette et retire son maillot de bain pour se rhabiller puis mets de petits chaussures en toiles pour être à l'aise. Elle attrape son livre et s'assoit sur son lit mais à peine plonge-t-elle dans sa lecture que des grattements reprennent. Elle tourne aussitôt son visage, comme si un rat allait lui sauter dessus mais rien. Cette fois il fait jour, elle peut voir parfaitement et ne manquera de répéter s'il y a des rongeurs dans cette pièce.
Elle se lève du lit et se laisse guider par le bruit. Et c'est bien du mur qu'ils proviennent, elle n'est pas folle. Elle colle son oreille contre le papier peint et écoute attentivement.

Elle prend du recul dans la pièce et regarde l'ensemble du mur pour voir s'il n'y a pas un trou ou une fissure par où les nuisibles pourraient passer. Et ses yeux se posent alors sur un bouche d'aération près du sol. Elle se met à quatre pattes et d'ici le bruit est bien plus intense. Elle essaye de voir à l'intérieur mais la grille ancienne et rouillée, sûrement aussi vieille que la maison, l'empêche de regarder correctement. Après une seconde d'hésitation elle y glisse ses doigts et tire dessus pour la retirer. Elle met un moment avant de réussir à l'enlever mais parvient à ses fins. Elle pose la grille à côté d'elle et colle sa joue contre le sol pour essayer d'être le plus proche possible du trou. Son portable l'aurait aidé à regarder à l'intérieur avec l'option lampe torche, mais elle va devoir faire sans.

La trape d'aération va uniquement vers le bas, autrement dit ces bruits ne peuvent pas provenir du mur, ce n'est en réalité que la résonance de quelque chose qui vient de plus bas.

Elle remet la grille en place, se relève et sort de sa chambre. Elle regarde le mur du couloir, qui est le même que celui de sa chambre et n'y voit aucune trape. Elle décide de descendre les escaliers et trouve une trape de ce même mur porteur. Elle vérifie qu'il n'y a personne et se met une nouvelle fois à quatre patte pour regarder et écouter. Et à sa grande surprise, le bruit ne vient pas de cet étage, mais toujours d'en dessous.
Il y a bien une cave puisqu'elle a vu Prosper et y accéder de l'extérieur, mais il y a donc forcément un accès par ici.
Elle jette un coup d'œil dans le couloir mais ne voit pas où ça pourrait être. Elle regarde la seule porte juste à côté de l'escalier. Elle hésite, sait qu'elle ne devrait pas faire ça... mais finit par se décider et ouvre. Et comme elle s'en doutait se retrouver en haut d'un escalier descendant dans l'obscurité. Elle cherche à tâtons l'interrupteur et allume. La lumière et grésillante et peu rassurante mais Oxelle ne s'est jamais laissé effrayer facilement alors elle s'engage dans les marches.

Une fois en bas il n'y a rien à part une autre porte. Elle s'en approche, y colle son oreille et entend de nouveau ces grattements.

-Putain de rats...

Elle veut simplement les voir de ses propres yeux et comme ça pourra clamer haut et fort qu'elle en a bien vu et qu'ils doivent faire quelque chose pour faire cesser ces bruits.
Elle pose donc sa main sur la poignée, prête à ouvre et être mise en face de ces bestioles, mais avant qu'elle ne puisse une ouvrir une main se referme violemment sur le sienne.
Oxelle, prise par surprise, pousse un cri de surprise et fait volte face.

Elle se retrouve alors nez à nez avec Prosper, sa main toujours fermement posée sur la sienne...

OxelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant