Les loges 1/2

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Salieri

Nous sommes le 16 juillet 1782, c'est un jour important pour monsieur Stéphanie et surtout monsieur Mozart. Pourquoi donc ? C'est la première de L'enlèvement aux Sérails. J'ai beaucoup aidé ce jeune compositeur à adapter le livret d'opéra de Gottlieb alors j'espère qu'il plaira au monde, même si je sais que mon nom ne sera pas cité.
Je m'assoie sur un siège auprès de Rosenberg et Stéphanie afin de voir cet opéra. Je regarde autour de moi, Stéphanie semble stressé.

« J'espère que ce ne sera pas un carnage... »

« Oooooh taisez vous. C'est vous qui avez choisis Mozart, c'est vous qui devriez payer les conséquences. » soupirait l'attendant.

J'étais déjà exaspéré, je déteste les bruits parasites. Mais tout se calma lorsque le rideau se lève. J'apercevais Mozart, si déterminé, sûr de lui. Il ne connaissait pas le danger ou la peur. Je pense que c'est ce qui me frappe le plus chez lui.

Des heures passèrent, l'empereur Joseph II n'a fait aucun bâillement jusqu'à la fin de cette œuvre. Quant à Rosenberg, j'avais l'impression qu'il a été subjugué par moment. Lorsque les applaudissements cessèrent et que le rideau tomba, tout le monde se leva:

« C'était pitoyable ! Comment est-ce que ces personnes peuvent apprécier cela ?! » demandait Rosenberg.

« Éviter de dire ça monsieur... j'ai tout de même écrit le livret... » répondit Stephanie.

« Pschhhit ! Taisez vous ! Je ne veux pas qu'un ancien domestique soit dans un tel grade. »

Il soupirait.

« Je m'en vais, je vais rejoindre ma femme, elle m'attend à la maison. » puis il s'en alla.

Gottlieb profitait des éloges que l'on disait sur cet opéra. Et moi... je suis devenu pensif. A vrai dire... depuis un moment, je ne fais que penser à Wolfgang Amadeus Mozart. Ce rire si enfantin me hante étrangement... ce sourire... Et maintenant, avoir vu sa détermination et ce regard montrant la grandeur et l'espoir me donnait des frissons dans tout le corps. Il était gracieux: ses mouvements de bras pour diriger l'orchestre dévoilaient ses longs doigts fins, ses postures montraient son habilité et souplesse, et ses yeux chocolat dévoilait sa passion débordante pour la musique. Boum boum... boum boum... je n'ai jamais entendu ces percussions auparavant. Cela se passait dans mon corps, une chaleur intense monta en moi et je n' arrivais plus à retirer le doux visage de cet autrichien. Je me rassoie un moment en mettant ma tête entre les deux mains puis reviens à mes esprits. Je me souviens de ce que je voulais faire. Je voulais aller voir Mozart pour parler de cet opéra. Je marchais parmi l'immense foule puis l'aperçoit avec sa tenue rouge pailletée... il allait vers les loges. Je l'ai suivit en accélérant le pas pendant un moment et réussi à le rattraper juste avant qu'il ferme la porte de sa loge:

« Monsieur Mozart ! Attendez !! »

« Salieri ...? Mais quel plaisir de vous voir ! »

Je m'arrête devant lui et reprend mon souffle :

« Je ne pensais jamais vous dire cela mais... vous étiez spectaculaire. »

Il était étonné par cette nouvelle. Il est vrai qu'il n'a pas trop eu de compliments de ma part.

« Oh mon ami... je suis tellement touché par vos mots ! Jamais je n'aurais imaginé entendre cela de vous ... Oh dailleurs, j'allais rentrer dans ma loge, j'ai du vin, je vous y invite si vous voulez ! » me souriait-il.

Il est vrai que depuis que nous sommes « amis », nous nous sommes rejoins dans des taverne et il a apprit quels sont les alcools qui me plaisent. J'haussais les épaules et entrais à l'intérieur. Du maquillage, des tenues et des partitions étaient présentes dans la pièce. Il y avait un grand fauteuil rouge en velours installé devant une petite table.

« Asseyez-vous, je vous en prie ! » dit-il en ouvrant une bouteille.

Le liquide rouge coulait à flot, les verres étaient magnifiques, ils étaient transparents et possédaient des motifs dorés. Il me donna un verre, nous trinquions et je gouttais à ce vin. Il était excellent, je me demande de combien il date. Je ne voulais pas en parler car... je voulais juste le voir. J'ai commencé à entamer une conversation :

« Qu'à donc dit l'empereur lorsque c'était fini ? »

« Que c'était parfait, sauf qu'il y avait un peu trop de notes. TROP DE NOTES ! Je me suis même demandé si Rosenberg avait demandé à l'empereur de dire cela. Tsss... il y a le nombre de notes qu'il faut, je sais que je suis l'un des meilleurs. Pschit pschit, je suis Rosenberg »

Il commençait à imiter la démarche de l'attendant, il est vrai que j'ai eu un sourire au coin car cela lui ressemblait bien.

Cela fait 20 minutes que je parle avec monsieur Mozart, je devrais rentrer mais je ne veux pas. J'ai l'impression d'être aimanté par cette pièce. Quoi que le jeune homme me dise, je lui sourit. Où est donc mon côté froid ? Pourquoi je ne pose pas de limites ce soir ? Serait-ce cette prestation qui m'a touché ? Je ne sais pas... je n'ai jamais ressenti ce sentiment.

«Vous n'avez pas chaud monsieur Salieri ? Vous devriez enlever votre manteau... »

Il commençait à enlever sa veste pailletée, puis déboutonnait sa chemise. J'étais paralysé, je ne répondais plus.

« Que vous arrive-t-il mon ami ? »

Je n'entendais plus rien, mon regard était fixé sur son coup... puis ses lèvres... et si, je déposais les miennes ..? Mon dieu, à quoi je pense ?!
Il s'approche de moi... il est proche... il pose sa main sur mon front.

« Mon dieu ! »

Il enleva rapidement mon manteau, puis mon noeud orné d'une broche noire et déboutonna le premier bouton de ma chemise. Il m'allonge sur le canapé.

« Que vous arrive-t-il Maestro ? Serait-ce l'alcool ...? C'est de ma faute... »

Son visage était au dessus du miens. Je levais ma main et la mettait sur sa joue. J'ai pu voir ces yeux doux et ces belles lèvres d'un peu plus près. Je crois savoir ce qui se passe ... je suis amoureux.
Mozart était perplexe... il ne comprenait pas pourquoi je commençais à toucher son visage.

« Monsieur Mozart... vous êtes si doué ... votre grâce est sans pareille... je n'ai pas les mots pour décrire votre talent... »

Le musicien rougissait.

« Monsieur Antonio Salieri, je me sens flatté par ces mots. Je ne sais comment vous remercier... »

Nous avons perdu pour l'histoire Où les histoires vivent. Découvrez maintenant