25 : Réconfort mutuel

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Je n'aurais jamais dû venir à cette soirée. Je ne cessais de me répéter cette phrase alors que je fixais, impuissante, le corps d'Elias allongé au milieu de la pièce. Antoine ainsi que d'autres personnes s'affairaient pour qu'il reprenne connaissance, en vain. Je l'ai entendu crier à quelqu'un d'appeler une ambulance. Moi, je restais plantée là, debout, sans savoir quoi faire. Parfois, on me bousculait mais je n'arrivais pas à faire un pas pour laisser le passage. Mon cerveau s'affolait et mon cœur tambourinait dans ma poitrine car je n'avais qu'une chose en tête à cet instant précis : c'est à cause de moi qu'ils se sont battus. A cause de moi qu'Adam est devenu fou de rage. A cause de moi qu'Elias est dans cet état. Et ce sera à cause de moi s'il ne se réveille pas. Et ça, je ne me le pardonnerais jamais.

C'est alors que l'image d'Adam hors de lui, énervé comme jamais je ne l'avais vu, me frappe de plein fouet. Où était-il passé ? J'ai parcouru la pièce du regard sans l'apercevoir. Tout à coup, je suffoquais. J'avais beaucoup trop chaud et je ne savais plus comment respirer. Je me suis alors enfin décidée à faire un mouvement pour quitter cette maison de malheur.

Arrivée dehors, j'ai pris une grande bouffée d'oxygène. L'air frais dans ma gorge me faisait un bien fou mais rapidement, j'ai commencé à avoir des frissons. La légère robe à bretelles que je portais ne suffisait apparemment pas à me protéger de cette froide nuit de septembre. J'ai passé mes bras autour de mon corps pour tenter de me réchauffer un peu et j'ai commencé à marcher. Adam n'avait certainement pas beaucoup bu mais j'ai jugé imprudent de le laisser seul après ce qu'il venait de se passer. J'ai alors aperçu un cabanon de jardin. Étant donné que c'était la seule construction dans ce jardin et que je n'avais trouvé Adam nulle part ailleurs, je m'en suis approchée, espérant l'y trouver.

C'est alors que je l'ai vu, assis sur le muret séparant la propriété de celle des voisins. Alors que je m'avançais vers lui, il n'a pas esquissé le moindre mouvement. Il a gardé la tête baissée, les yeux rivés au sol.

- T'es là, ai-je dit en m'asseyant à côté de lui. Je t'ai cherché partout.

Il a tourné la tête vers le cabanon, fuyant mon regard. Sympa.

- Pourquoi ? a-t-il lâché dans un souffle.

- Pourquoi quoi ?

- Pourquoi tu as cherché à me retrouver ? Pourquoi t'es pas restée à l'intérieur pour aider les autres à essayer de réparer ma connerie.

Il a levé les yeux vers moi. Des yeux rougis et fatigués.

- Pourquoi tu ne me détestes pas ?

L'expression qu'il affichait me brisait le cœur.

- Comment veux-tu que je t'en veuille de m'avoir défendue ? Certes, je suis contre la violence. Ça ne résout rien et je suis convaincue qu'il existe d'autres moyens de régler les problèmes. Mais tu as fait ça pour moi. Qui sait ce qui serait arrivé si tu n'avais pas été là, ai-je répondu en plantant mon regard dans le sien.

- Justine, Elias est un vrai con. Encore plus quand il est bourré. Tu n'aurais pas été la première fille à en subir des frais, si je ne l'avais pas arrêté. Mais malgré tout ça c'est mon pote. Et je m'en veux terriblement d'avoir perdu le contrôle à ce point. Ce n'était encore jamais allé aussi loin entre nous.

La machine commençait à se remettre en marche dans ma tête. Adam était allé plus loin que d'habitude. Et tout ça pour quoi ? Ou plutôt pour qui ? Pour moi. Je n'en revenais pas. Je lui ai alors posé la question qui me brûlait les lèvres depuis l'incident.

- Pourquoi tu as pris ma défense ?

Il a semblé réfléchir un moment avant de déclarer :

- Parce que je ne voulais pas qu'il t'arrive quelque chose. Crois-moi, le Elias bourré n'est pas beau à voir. Il a déjà fait du mal à assez de filles. Je n'aurais pas supporté qu'il t'en fasse à toi aussi.

Ça alors, quelle révélation. Adam le dur à cuire aurait donc un cœur et souhaiterait le meilleur pour ses amis ? Pourquoi cet Adam-là n'était-il jamais apparu jusqu'ici ? Je préfère largement celui-ci au Adam froid et distant avec les sourcils toujours froncés.

Ne sachant pas quoi dire, craignant de briser ce moment qui semblait hors du temps, j'ai attendu qu'il fasse ou dise quelque chose. Malgré le froid et l'obscurité de la nuit, je me sentais bien, près de lui et sous les étoiles.

- Tu grelottes, a-t-il dit.

- Non, ça va.

Il a tenté de retirer son sweat mais j'ai posé ma main sur son bras.

- Ça va, je t'assure.

- Sois pas idiote, il doit faire à peine dix degrés.

Et il m'a tendu son sweat que j'ai fini par enfiler sans rechigner, la raison ayant pris le dessus sur la fierté. Je me sentais en sécurité dans son vêtement encore chaud et empreint de son odeur.

Quand j'ai relevé la tête, il me regardait avec de grands yeux. Ses prunelles me transperçaient et le temps a soudain semblé s'arrêter. Mais c'est alors qu'un son strident a fendu la nuit, tout proche de nous : des sirènes de pompiers.


𝐉𝐄 𝐍'𝐀𝐈𝐌𝐄𝐑𝐀𝐈 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐉𝐀𝐌𝐀𝐈𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant