48 : Le bon choix

361 17 15
                                    

Ce soir-là, j'ai poussé la porte de ma maison soulagée. Adam n'allait pas avoir d'ennuis grâce au chantage qu'on avait mis en place avec Cloé. C'était peut-être pas très sûr comme solution, mais en attendant, elle allait se la boucler au moins pour un moment.

Dès que j'ai posé un pied dans le hall d'entrée, j'ai entendu des voix provenant du salon. L'une des deux voix m'était familière et soudain, j'ai réalisé. J'ai réalisé que ce qui était en train de se passer n'était rien de bon et que ça allait rapidement mal tourner, si ce n'était pas déjà le cas. J'ai entendu ma mère hausser d'un ton :

- Mike, t'as pas honte ?

Je suis rentrée dans la pièce, abasourdie.

- Papa ?

Mon père faisait peur à voir : il portait des habits sales et usés, sa barbe de trois jours était mal taillée et ses cheveux gras et indisciplinés. Les immenses cernes noirs sous ses yeux m'ont laissée penser qu'il n'avait pas dormi depuis plusieurs jours.

- Ma chérie, tu m'as tellement manqué, a-t-il commencé en s'avançant vers moi pour me prendre dans ses bras.

- T'es sérieux ? me suis-je exclamée en le repoussant violemment. Tu disparais pendant trois mois et tu te permets de revenir comme une fleur aujourd'hui.

- Vous êtes les deux femmes de ma vie, je n'allais pas vous abandonner...

- Pourtant c'est ce que tu as fait pendant trois putain de mois, l'ai-je coupé. T'es parti sur un coup de tête sans te soucier de ce que Maman et moi allions devenir, parce que t'es qu'un égoïste. Tout ce qui t'importe, c'est ton bonheur à toi, que tu as toujours fait passer avant ta famille !

- Eh, oh, jeune fille, tu parles autrement à ton père, s'il te...

- Ta gueule, Mike ! est intervenue ma mère. Ta fille a raison sur toute le ligne. On est fatiguées, on ne peut plus. Je ne peux plus.

- Qu'est-ce que ça veut dire ? a demandé mon père, à présent hésitant et inquiet.

- Je veux divorcer.

Je me doutais qu'un jour ou l'autre ce moment allait arriver. A vrai dire, je n'ai jamais compris comment une femme pour ma mère a pu tomber sous le charme d'un homme ignoble tel que mon père. Mais, à cet instant précis, je n'avais qu'une seule pensée en tête : que ma mère avait fait le bon choix. Et, même si j'étais conscience qu'un tas d'emmerdes allait accompagner ce divorce, je savais qu'ensemble on allait s'en sortir. Parce que c'était comme ça qu'on avait toujours fonctionné : on s'est toujours soutenue l'une l'autre et c'est ce qui faisait notre force, c'est ce qui rendait notre relation si fusionnelle.

- J'espères que tu plaisantes, a déclaré mon père, incrédule.

Ma mère a soupiré en baissant les yeux.

- J'ai pris ma décision. Maintenant sors de chez moi.

- Et tu peux me dire où je vais aller ? s'est-il enquis.

- Ça n'est plus mon problème.

Mon père nous a jeté à toutes les deux un regard plein de dédain qui m'a fait bien plus mal au cœur qu'il n'aurait dû, et puis il s'est retourné en direction de la porte.

Un fois mon père parti, je me suis installée sur le canapé à côté de ma mère et j'ai pris la parole :

- Tu as fait le bon choix, Maman.

Elle a hoché doucement la tête, le regard toujours fixé sur la table basse en bois. Je me suis éclaircie la gorge, un peu stressée à l'idée de ce que je m'apprêtais à lui annoncer.

- Maman, j'ai quelque chose à te dire.

Elle a relevé vivement la tête vers moi, une lueur d'inquiétude dans ses yeux.

- Pitié, pas une mauvaise nouvelle.

- Non, ai-je répondu en riant doucement. Au contraire.

- Tu sais, hum, Youssef, votre ami, euh...

- Oui, bien sûr. Je pense à lui chaque jour. C'est de la faute de ton père si... Mon Dieu, et s'il ne s'en sort pas ?

Alors que ses yeux commençaient à devenir rouges, je me suis empressée de poursuivre :

- Justement ! Il va s'en sortir. Enfin, bien sûr, je ne suis pas docteur mais...

- Attends, ma chérie, comment est-tu au courant de tout ça ?

- Et bien, il se trouve que son fils est dans la même classe que moi.

- Oh, vraiment ? Pourquoi tu ne me l'avais pas dit ?

- Je sais pas, ça n'avait pas tant d'importance, euh...

Elle a penché la tête su le côté et m'a regardée avec des yeux qui voulaient tout dire.

- Justine ?

Je n'avais pas envie d'aborder le sujet maintenant, je ne me sentais pas prête. Je voulais simplement l'informer de Youssef était sur la voie de la guérison, pour la rassurer.

- Quand j'ai compris que c'était le fils de Youssef, je me suis sentie obligée de l'aider. Par rapport à Papa.

- Oh, ma chérie. Ça n'avait rien à voir avec toi. Ton père est le seul et unique responsable.

- Je sais bien, mais comme nous étions, hum, amis, je lui ai proposé mon aide.

- Je te reconnais bien là, ma puce.

Si seulement elle savait ce que j'entendais par « lui proposer mon aide »...

- Bref, on a réussi à obtenir assez d'argent pour payer ses soins, alors... enfin, on espère qu'il s'en sortira.

Ma mère à de nouveau hoché la tête, pensive.

- Je suis fière de toi. (Elle a fait une pause, avant de relever les yeux vers moi.) Ça fait si longtemps que je n'ai pas vu Youssef... Je l'appréciais beaucoup, mais depuis sa querelle avec mon père nous avions coupé les ponts. Sauf que maintenant, rien ne m'empêche plus de le revoir. Oh, et son fils, qu'est-ce qu'il était mignon à quatre ans ! Je me demande s'il l'est toujours autant... a-t-elle conclu avec un léger rire.

Oh, si tu savais, Maman...


𝐉𝐄 𝐍'𝐀𝐈𝐌𝐄𝐑𝐀𝐈 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐉𝐀𝐌𝐀𝐈𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant