𝐉𝐄 𝐍'𝐀𝐈𝐌𝐄𝐑𝐀𝐈 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐉𝐀𝐌𝐀𝐈𝐒

5 : Troublée

- Bon, eh bien, elle était occupée, a dit Hervé en me regardant, la mine coupable.

J'ai hoché la tête, toujours troublée. Que faisait-il là ? Ok, Justine. Tu ne le connais pas. Sa vie ne te regarde pas. Rien de tout ça ne te regarde.

- Hey, ai-je dit en rejoignant les deux tourtereaux.

- Salut ! ont-ils dit en chœur.

On a continué à marcher dans des couloirs vides. Des couloirs en bleu et blanc, des couloirs tristes, des couloirs de lycée, quoi. Parfois on voyait un ou deux élèves assis par terre, en train d'écrire sur un cahier, ou bien contre un mur, avec des écouteurs dans les oreilles. C'est facile, je me suis dit, de passer pour une élève normale qu'on ne remarque pas. J'aurai juste à faire comme tout le monde et tout ira bien.

Quand la visite a été terminée, on est retournés dans la classe, mais cette fois une femme nous y attendait. On a repris les places qu'on avait choisies plus tôt.

- Bonjour, je suis Madame Lagarde, votre professeure principale pour cette année de seconde. Tout d'abord, je vous souhaite la bienvenue dans ce...

- Épargnez-nous vos beaux discours, l'a interrompue Cloé, vous n'êtes même pas à l'heure. Vous avez intérêt à avoir une excuse en béton.

- Ça ne vous regarde pas. Et vous feriez bien de redescendre d'un ton si vous ne voulez pas vous prendre une heure de colle. Le jour de la rentrée, ce serait dommage, a-t-elle renchéri accompagnant sa réponse d'un sourire faussement innocent.

Cloé a croisé les bras et regardé ses deux acolytes d'un air de défi. Les jumelles ont croisé les bras à leur tour et les trois Barbies ont fixé la prof d'un air mauvais.

- Elles se rendent compte qu'elles font pitié ? me chuchota Naomie.

Trois coups ont été frappés à la porte et une seconde plus tard, on a vu entrer Adam. Il a tendu un billet de retard à la prof.

- Il y en a qui commencent bien l'année, à ce que je vois, a-t-elle dit en le regardant, et à ce moment-là, je ne sais pas pourquoi, j'ai eu envie de l'étrangler avec sa ceinture verte en fausses écailles de crocodile.

Adam a baissé la tête. Elle a pris le papier et l'a lu. Je l'ai vue froncer légèrement les sourcils.

- Bon, allez vous asseoir. Et enlevez-moi cette capuche.

Adam s'est exécuté en se dirigeant vers le fond de la classe où il s'était installé plus tôt le matin.

- On peut savoir où vous allez ? Je ne sais pas comment ça se passera dans les autres cours, mais avec moi, tant qu'il y a des places devant on les occupe. Asseyez-vous à côté du jeune homme, a-t-elle dit en désignant Gabriel. Vous êtes... ?

- Gabriel, a-t-il répondu avec un sourire.

- Très bien, merci Gabriel.

Adam s'est installé à coté de lui, ce qui signifiait juste devant Naomie et moi. Il a passé une main dans ses cheveux. Il sentait bon, un mélange d'agrumes et de quelque chose de plus doux, comme de la vanille. Ne vous inquiétez pas pour cette analyse détaillée, j'ai toujours eu l'odorat assez développé. Il a fait un check à Gabriel.

- Salut, mec.

- Yo.

Puis il s'est tourné vers nous et nous a souri.

- Salut.

- Salut, a répondu Naomie.

Il m'a regardée, comme s'il attendait quelque chose.

- Ah, euh, salut.

Il a ri doucement avant de se retourner. De ma place, je pouvais apercevoir son profil. Ses longs cils foncés, son nez droit, la ligne de sa mâchoire... Mais qu'est-ce que tu fous, Justine ? Arrête de déconner, tu nous fais quoi là ? Je n'en savais rien. Je ne savais pas ce que je faisais et ça me faisait flipper.