Chapitre 14

3.6K 119 5
                                    

 Ne détachant pas les yeux de l'inscription et du bouquet qu'elle y a posé quelques heures auparavant, elle s'adresse à Gabriel.

— Je vous avais bien dit qu'il ne pourrait pas vous répondre.

— Emy, je suis terriblement désolé. Je n'avais pas compris qu'il n'était plus de ce monde, lui dit-il sincèrement peiné d'apprendre cette nouvelle.

— Ce n'est pas une chose dont je parle beaucoup.

— Je comprends parfaitement.

— Aujourd'hui, il aurait eu 35 ans, je viens ici chaque année à cette date, passer la journée, explique-t-elle doucement.

Gabriel se décale pour frôler la main de la jeune femme en guise de soutien. Au cours de sa vie, il lui est malheureusement arrivé de perdre des proches, mais jamais l'être aimé. Il ne peut imaginer ce qu'a dû vivre Emy. Il est déjà assez compliqué de mettre fin à une relation D/s en temps normal, surtout quand celle-ci est très intense. Le dominant souffre de ne plus avoir de soumise à ses côtés, mais c'est bien la personne soumise qui se retrouve le plus à mal.

Pendant des semaines, des mois voir des années, le dominant a façonné sa soumise à réagir, se comporter de telle façon pour qu'elle lui corresponde entièrement, jusqu'à ce que cela devienne un reflex. Alors quand tout s'arrête, cette personne se retrouve perdue, démunie, sans repaire, à l'abandon.

Il comprend maintenant la réticence d'Emy à le laisser entrer dans sa vie et surtout ce qu'il a perçu dans son regard le premier soir. Tout prend son sens à présent.

— Rentrons et si vous le voulez bien j'aimerais être à vos côtés pour le reste de la soirée, lui dit-il doucement en tendant la main.

Une main qu'Emy accepte après un dernier coup d'oeil à la dernière demeure de son premier amour. Comme attendant un signe de l'au-delà, lui donnant l'autorisation.

Le chemin du retour se fait comme à l'allée, dans le silence. Mais pas un silence pesant, au contraire l'atmosphère se trouve libérée d'un poids.

Emy se laisse glisser contre le siège passager pendant que les lignes de la route, réfléchies par les phares, défilent sous ses yeux, son cœur s'apaisant à chaque minute qui passe.

— Je ne vais pas vous forcer à parler si vous ne le voulez pas, mais si vous avez envie de vous libérer totalement je suis là, lui apprend Gabriel en posant sa veste sur le dossier du canapé.

Emy se passe les mains sur le visage en soufflant avant de s'affaler dans un coin de son canapé.

— Malheureusement je ne saurai même pas par quoi commencer.

— Par ce dont vous avez envie. Parlez-moi de lui, de votre relation, de ce qui vous fait encore souffrir.

D'abord hésitante elle finit par se lancer et lui parler du début de sa relation si parfaite avec Darius, puis de son évolution et pour finir par l'obtention de son boulot d'assistante éditoriale.

— Qu'est-ce que j'aimais ce travail, dit-elle avec des étincelles dans les yeux.

— C'est lui qui vous a demandé de ne travailler qu'à mi-temps ?

— Il m'a toujours soutenu d'abord dans mes études puis dans ma vie professionnelle, mais il n'en restait pas moins mon Maître qui me voulait à la maison quand lui y était.

— C'est tout à fait compréhensible.

— J'étais déjà heureuse qu'il ne freine pas ma carrière comme peuvent le faire certains dominants, alors nous avons trouvé ce compromis. J'adore le monde de l'édition alors décrocher un job pareil a été une chance pour moi.

— Je l'entends et le comprends parfaitement, or vous m'aviez dit être en arrêt et ne pas y être retournée depuis deux ans, c'est bien cela ?

— C'est exact, confirme-t-elle en sentant l'angoisse refaire surface.

— Pourquoi ?

— Parce que c'est là-bas que Darius est mort.


---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Lundi, un nouveau chapitre est à vôtre disposition.

Merci à tous pour les 500 lectures, j'espère que l'histoire vous plaît toujours autant.

Obedience (Les chroniques d'une affranchie) TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant